La Wallonie actrice de la législation européenne environnementale

Toudi mensuel n°66-67, janvier-février-mars 2005

Le Parlement wallon a adopté en mai dernier, les projets de décrets relatifs aux Livres I (Dispositions générales et communes) et II (Code de l'Eau) du Code de l'environnement, instruments qui rassemblent plus d'un quart de siècle d'activités législatives et réglementaires du pouvoir wallon dans le domaine de la politique de l'environnement. Ces deux livres ne constituent que la première étape d'un processus de codification qui devrait prendre fin en 2007. Quelques semaines plus tard, la deuxième édition du tableau de bord de l'environnement était rendue public par l'administration wallonne de l'environnement. Ces deux événements nous permettent de dresser, ou du moins d'essayer, un état des lieux de la politique environnementale wallonne dans la lignée du numéro spécial de TOUDI n°63-64 « Wallonie, état des lieux ».

L'environnement, matière internationale et wallonne

La politique de l'environnement est presque née en même temps que la régionalisation. En effet, la Conférence des Nations Unies sur l'environnement qui s'est tenue en juin 1972 à Stockholm, a été l'événement qui a fait de l'environnement une question majeure au niveau international. L'année suivante apparaît pour la première fois au sein du gouvernement belge, un ministre de l'environnement en la personne du CVP Jos De Saeger. Toujours en 1973, la Communauté européenne adopte son premier programme d'action sur l'environnement pour les deux années à venir, les États européens posaient ainsi la première pierre de l'action communautaire en ce domaine. La Loi Perin-Vandekerckhove est votée le 1er août 1974. Ne disposant pas d'une majorité qualifiée, le Gouvernement de l'époque a créé des institutions régionales à « titre préparatoire » à l'application de l'article 107 quater, celles-ci sont compétentes pour la chasse, la pêche, les forêts et la politique de l'eau. Au fil des réformes institutionnelles (1980, 1988, 1993), la Wallonie a acquis d'importantes compétences dans le domaine de l'environnement et de la conservation de la nature. Il faut toujours garder à l'esprit cette « origine » internationale et européenne de la politique environnementale pour mieux saisir l'action du pouvoir wallon en ce domaine. Les dispositions européennes et internationales en matière d'environnement constituent en effet la base de la politique et des législations environnementales des autorités étatiques. Les principales instances internationales développant des conventions ou autres dispositions en matière d'environnement sont l'Organisation des Nations Unies (ONU) et son Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), la Commission économique pour l'Europe des Nations Unies (UNECE), le Conseil de l'Europe et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Plus encore que le droit international, le droit européen constitue la base de la politique étatique en matière d'environnement. En témoignent les très nombreuses réglementations wallonnes qui y trouvent leur origine : le réseau Natura 2000, les objectifs de qualité de l'eau et de l'air, les permis d'exploitation, les études d'incidences, la gestion des déchets et la reprise des emballages, la réglementation SEVESO, la surveillance des émissions des installations industrielles... La Région wallonne est donc un acteur à part entière des engagements que prend l'État belge sur les scènes européenne et internationale. Depuis la régionalisation par étapes successives de l'environnement, les Régions détiennent, dans le cadre de leurs compétences, la responsabilité des relations internationales en environnement. Les positions que défend l'État belge dans les négociations européennes et internationales nécessitent donc une coordination permanente entre l'ensemble des acteurs régionaux et fédéraux concernés. Pour l'État belge, ce sont les Ministres régionaux qui assurent, en rotation actuellement de 6 mois, la tenue du siège belge au Conseil environnement de l'Union européenne. Le Ministre fédéral de l'environnement est assesseur. Les décisions du Conseil se préparent dans des groupes de travail européens où l'État belge est représenté par des experts des administrations régionales et/ou fédérales (en fonction du sujet négocié), et par des agents de la Représentation permanente de la Belgique auprès de l'Union européenne. Les positions belges défendues aussi bien au sein de ces groupes de travail qu'au sein du Conseil des Ministres lui-même, sont coordonnées, entre toutes les autorités régionales et fédérales concernées, dans le cadre du Comité belge de Coordination de la Politique Internationale de l'Environnement (CCPIE) instauré en 1995 par un accord de coopération entre les Régions et l'Autorité fédérale. Ces derniers sont donc, dans le respect de leurs compétences respectives, totalement impliqués dans la négociation des dispositions européennes en matière d'environnement, la Wallonie étant ainsi un acteur à part entière de la législation européenne. Dans le cadre de sa politique de l'environnement, la Région wallonne est tenue de se conformer à la législation européenne, elle doit transcrire, dans les délais, les dispositions européennes dans son arsenal législatif, et mettre en œuvre les moyens pour les appliquer et contrôler leur respect. Pour chaque acte, la réalité institutionnelle belge impose en premier lieu de vérifier, entre toutes les autorités belges, qui détient la compétence pour transposer. Une transposition correcte et dans les délais du droit européen n'est pas une tâche facile. Les différentes actions intentées contre l'État belge et de nombreux autres États membres devant la Cour de Justice européenne le démontrent. Toutefois, le Contrat d'avenir pour la Wallonie a fait de la résorption du retard de transposition l'une des priorités du Gouvernement wallon. Au cours de la législature 1999-2004, le pouvoir régional a comblé son lourd retard accumulé durant le long mandat (11 ans) à la tête de l'environnement du ministre Guy Lutgen. Les dossiers les plus préoccupants demeurant sont ceux relatifs à l'eau et en particulier la qualité des eaux de baignade, la teneur en nitrates et les eaux résiduaires urbaines.

En outre, la Région wallonne fait face à diverses plaintes en matière de protection de la nature (Natura 2000) et de déchets, même si celles-ci ont tendance à se résorber progressivement. Enfin, la Wallonie doit informer l'Union européenne de ses performances environnementales. Pour ce faire, elle doit produire en moyenne une trentaine de rapports par an sur les thèmes de l'eau, des déchets, de la nature et surtout de l'air. A côté de ces rapports dits obligatoires (car soumis à sanction en cas de non-respect), d'autres rapportages internationaux créent des obligations « morales » et politiques (ceux pour l'Agence européenne de l'environnement, pour l'OCDE, pour les Nations Unies...).

Le droit wallon en matière environnementale

La codification du droit wallon en la matière constitue une sorte de « reconnaissance » de l'action menée depuis 30 ans. Le Livre Premier énumère et décrit les grands principes de la gestion de l'environnement. La législation environnementale wallonne n'indiquait pas explicitement quels étaient ses objectifs et grands principes. Cette innovation en droit wallon s'inspire de la Charte de l'Environnement déposée en juin 2003 par le Gouvernement français à l'Assemblée Nationale. L'environnement et, notamment, les espaces, paysages, ressources et milieux naturels, l'air, le sol, l'eau, la diversité et les équilibres biologiques font désormais partie du patrimoine commun des habitants de la Région wallonne et sous-tendent son existence, son avenir et son développement.

Le livre premier consacre d'autres grands principes, certains inspirés des traités européens, il s'agit des principes de prévention, d'intégration, de précaution, du pollueur/payeur, de correction des atteintes à l'environnement, du droit d'accès à l'information en matière d'environnement, de vigilance.

Le Livre II ou Code de l'Eau intègre l'ensemble de la législation wallonne portant sur l'eau et consacre diverses avancées importantes. Il assure la transposition de la directive/cadre européenne sur l'eau (DCE) de 2000 ce qui a pour effet de réorganiser la gestion de l'eau en Wallonie sur base du concept des bassins hydrographiques internationaux. La gestion des bassins hydrographiques wallons devient donc internationale. Elle est coordonnée via les Commissions internationales de la Meuse (CIM) et de l'Escaut (CIE), déjà en place. Il réorganise fondamentalement la gestion des cours d'eau suite notamment aux transferts de certaines compétences provinciales. Désormais tous placés sous la tutelle directe de la Région, les cours d'eau seront gérés pour toutes les fonctions qu'ils remplissent : économique, sociale et environnementale. Les contrats de rivière reçoivent une base décrétale. Le livre deux consacre leur nature volontaire et associative, mais les invite à se réorganiser selon le principe « un contrat de rivière par sous-bassin hydrographique ». Enfin, la Société publique de Gestion de l'Eau (SPGE) assurera la compétence du démergement, nécessaire au maintien hors eau des anciens bassins miniers du Hainaut et de la Région liégeoise.

Le tableau de bord de l'environnement wallon

Comme pour l'édition 2003, ce deuxième Tableau de bord de l'environnement wallon (TBE) vise à mettre à la disposition de chacun un outil d'analyse permettant de suivre, de façon synthétique, à l'aide d'indicateurs environnementaux pour divers thèmes, l'état de l'environnement wallon et l'évolution de facteurs essentiels qui l'influencent. Ce document est basé sur les données disponibles et validées les plus récentes. Ces éditions annuelles et systématiques du tableau de bord s'inscrivent dans la lignée des rapports sur l'état de l'environnement, édités par la Direction générale des Ressources naturelles et de l'Environnement (DGRNE) depuis 1992. Outre ces éditions annuelles, il est prévu d'éditer un rapport plus complet et plus analytique sur l'état de l'environnement wallon en 2006.

Signalons d'emblée une nouveauté : la présence via un chapitre particulier mais aussi de manière horizontale de la thématique Environnement & Santé. La Région wallonne a mis sur pied une équipe spécifique (la Plate-forme Scientifique Environnement- Santé, basée à l'ISSEP), afin de collecter des données permettant d'améliorer les connaissances en la matière, c'est à dire les répercussions sur la santé de l'état de l'environnement. Par exemple : une zone d'habitation est située prés d'un incinérateur ou d'une décharge, cela peut-il avoir des conséquences sur la santé des habitants ? Ces données devraient permettre de construire des indicateurs qui seront intégrés dans les prochaines éditions du Tableau de bord de l'environnement wallon. Des considérations sur cette problématique sont insérées dans les chapitres Eau, Air, Bruit, Transports et Ménages. Examinons maintenant sommairement, les grandes tendances qui se dégagent de l'examen des divers chapitres du tableau de bord 2004.

AIR

La Wallonie est sur la bonne voie puisqu'elle a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 2,9 % entre 1990 et 2001 et ce, malgré une évolution défavorable dans le secteur des transports. La mise en œuvre des mesures actuellement envisagées devrait aboutir à une réduction de 5,5 % en 2010. La Région devra donc probablement acheter des permis d'émissions à l'étranger pour satisfaire ses engagements internationaux. Les émissions de substances acidifiantes ont également diminué (d'environ 30 % entre 1990 et 2001). En ce qui concerne la qualité de l'air, d'importants pics d'ozone ont été enregistrés au cours de l'été 2003 (températures et ensoleillement exceptionnels), ce qui confirme la difficulté de maîtriser cette pollution. Il en est de même pour les particules en suspension (PM10), dont les concentrations dans l'air dépassent encore localement les valeurs définies pour la protection de la santé, particulièrement dans les zones industrielles les plus sensibles. Par contre, la situation s'améliore pour le soufre, le plomb et les métaux lourds, pour lesquels les concentrations sont en constante diminution.

EAU

Malgré une densité de population élevée, les ressources en eau ne sont pas surexploitées en Wallonie, du moins à l'échelle de la Région. Les prélèvements représentent toutefois chaque année environ deux tiers des réserves renouvelables en eau souterraine. Depuis quelques années, l'état des eaux de surface s'améliore, particulièrement au niveau de la pollution organique et de l'eutrophisation (azote, phosphore). Cette réduction de la pollution se traduit par une hausse généralisée de la qualité biologique des cours d'eau et une mise en conformité de trois-quarts des zones de baignade officielles. Cette évolution positive résulte principalement de la diminution des rejets d'eaux usées industrielles et des efforts importants consentis dans le domaine de l'épuration collective et individuelle.

La capacité des stations d'épuration publiques a en effet presque doublé en une décennie, atteignant 2,5 millions d'équivalents habitants en 2003. La situation est plus problématique pour les eaux souterraines, où les concentrations en nitrates et en pesticides sont en constante augmentation dans certaines nappes.

SOLS

Le sol constitue une ressource peu renouvelable, dont la dégradation en Europe résulte principalement de phénomènes d'érosion et de pollutions locales et diffuses.

L'exportation des particules de sol érodées vers les cours d'eau est évaluée à environ 750 000 tonnes par an en Région wallonne. Ces quantités auraient augmenté ces trente dernières années de 14 % à 155 %, selon les bassins hydrographiques. Cette évolution s'explique entre autres par des pluies de plus en plus érosives et des sols agricoles de moins en moins couverts pendant la période de l'année la plus critique pour l'érosion hydrique. En ce qui concerne la pollution locale des sols, la Région wallonne a répertorié environ 6 000 sites potentiellement contaminés. Les superficies qui ont fait l'objet d'une décontamination ont presque quadruplé entre 2000 et 2003, grâce notamment aux importants moyens financiers dégagés. Actuellement, les risques de contamination des sols par les activités industrielles à risque sont en général limités. Le tout récent décret « Sols » de la Région wallonne vise principalement à accélérer les procédures d'assainissement et permet de désigner les responsables de la pollution (historique et actuelle) des sols, et ceux qui devront supporter, le cas échéant, le coût de la dépollution. Le travail à accomplir est encore conséquent mais il est en bonne voie si les efforts actuellement consentis sont maintenus voire renforcés.

OCCUPATION DU TERRITOIRE

D'une superficie totale de 16 844 km2, la Région wallonne compte 200 habitants au km2 (soit 2 hab./ha), ce qui la place parmi les régions les plus denses de l'Union européenne. La moitié des Wallons habitent des zones urbanisées où l'on dépasse 25 hab./ha (ce qui concerne environ 3% du territoire). C'est principalement au détriment des terres agricoles que l'urbanisation a progressé, gagnant 48 000 ha depuis 1980 (+27 %). La localisation diffuse des logements, des industries, des commerces et des services publics (terres bâties) implique le développement des infrastructures et des équipements, lesquels génèrent des pressions sur l'environnement. D'autre part, l'augmentation des transports due à la dispersion des activités, contribue à l'accroissement de la consommation d'énergie et à celles d'émissions polluantes. Les plans de secteurs constituent la base légale de l'affectation du sol (zones destinées à l'urbanisation, zones agricoles, zones boisées, etc.). En 2004, le Gouvernement wallon a adopté une révision thématique des plans de secteur permettant l'inscription de 35 nouvelles zones d'activités économiques, pour une superficie totale de 1 600 hectares. De même, suite à la modification du CWATUP, les zones d'extension d'habitat sont devenues des zones d'aménagement différé. Cela concerne 18 500 ha - soit un peu plus de 1% du territoire - qui peuvent être affectés à tout type d'urbanisation par les Communes. Si des mesures complémentaires ne sont pas prises, ce potentiel d'urbanisation risque d'augmenter les pressions exercées sur l'environnement.

BIODIVERSITÉ ET CONSERVATION DE LA NATURE

Comme dans beaucoup d'autres régions du monde, l'érosion de la biodiversité se poursuit en Région wallonne : 422 espèces des groupes faunistiques et floristiques étudiés sont menacées d'extinction à l'échelle régionale, sur un total de 1 491 espèces suivies, soit environ 28 %.

Les poissons, les papillons de jour et les reptiles présentent les situations les plus précaires puisque, respectivement, 55 %, 66 % et 71 % de leurs espèces présentent un statut de conservation défavorable (espèces éteintes ou menacées au niveau régional). La perte, la fragmentation et l'altération des habitats sont des causes majeures à l'origine de cette situation. L'Union européenne s'est fixé comme objectif de stopper la perte de biodiversité d'ici 2010. L'approche privilégiée est d'essayer de concilier les différents usages d'un territoire avec les impératifs de protection des espèces et des habitats, plutôt que de tenter d'isoler la nature des activités humaines.

Le réseau Natura 2000,qui couvre environ 13% du territoire régional, se met en place dans ce sens. Si l'objectif principal est la conservation d'espèces et d'habitats menacés, toutes les activités humaines n'en sont pas exclues pour autant. Les sites particulièrement rares ou fragiles (milieux ouverts et zones humides, en particulier) nécessitent quant à eux une protection plus stricte: éléments-clés des réseaux écologiques, ils en constituent les réservoirs des populations d'espèces. Fin 2003, la Région wallonne comptait un peu plus de 9500 ha de zones strictement protégées, soit environ 0,5% du territoire régional.

MÉNAGES

Selon les enquêtes d'opinion, les habitants de Wallonie se déclarent en grande majorité préoccupés par la détérioration de l'environnement, et se disent prêts à réaliser des efforts. Toutefois, la mise en pratique d'actes respectueux de l'environnement reste encore limitée. Entre 1991 et 2003, le nombre de ménages en Wallonie a augmenté de près de 10 %, pour une hausse de 3% environ de la population. La taille moyenne des ménages est donc en diminution, passant de 2,51 à 2,37 personnes. Cette évolution influence notamment la consommation d'énergie résidentielle. Des tendances encourageantes sont observées concernant les émissions de gaz à effet de serre et la consommation d'eau au niveau résidentiel qui demeurent globalement stables jusqu'en 2001. En revanche, en termes de transports privés, plus de trois-quarts des distances parcourues pour se rendre au travail, à l'école et dans les commerces, ainsi que pour satisfaire les activités de loisirs, sont effectués en voiture.

Plusieurs politiques sont menées actuellement dans l'optique de modifier les comportements par le biais de campagnes de sensibilisation et d'éducation, et par la mise en œuvre de mesures favorisant des choix respectueux de l'environnement tels que les labels ou les primes.

ENTREPRISES

En Région wallonne, trois quarts de la création de richesse (PIB) proviennent du tertiaire. La croissance de ce secteur va de pair avec une hausse de ses besoins en énergie. De son côté, l'industrie absorbe près de la moitié de la consommation finale d'énergie. La reconversion progressive vers des productions moins énergivores et l'utilisation de combustibles plus propres ont cependant permis de réduire les émissions atmosphériques (gaz à effet de serre et émissions acidifiantes), issues de la combustion. Le traitement des eaux usées industrielles a aussi permis de diminuer leur charge polluante d'environ 30 % en quelques années. Le gisement de déchets industriels a augmenté jusqu'en 2000, mais plus de 80 % des déchets des grandes et moyennes entreprises sont valorisés. En 2003, très peu d'incidents ont été signalés dans les 81 sites à risque d'accident majeur identifiés en Région wallonne. La prise en compte progressive de l'environnement par les entreprises se traduit également en termes de choix de gestion. Les investissements environnementaux, par exemple, sont de plus en plus intégrés aux processus de production. D'autre part, les démarches proactives, telles que les engagements volontaires d'amélioration continue des performances environnementales (accords de branches, certification), sont en progression, même si la certification ne concerne encore qu'une proportion limitée d'entreprises.

AGRICULTURE

Le secteur de l'agriculture, qui occupe la moitié du territoire de la Région wallonne, est un acteur important en ce qui concerne l'aménagement et la gestion de l'espace rural. Les pressions qu'il exerce sur l'environnement sont principalement liées au niveau d'intensification de la production (mécanisation, utilisation d'intrants), relativement élevé par rapport à la moyenne européenne, ainsi qu'aux changements d'occupation du sol. Ces derniers se traduisent par une diminution globale des surfaces agricoles couvertes pendant l'hiver (prairies et céréales d'hiver). L'activité se concentre aussi dans un nombre de plus en plus réduit d'exploitations. Dans ce contexte, les principaux problèmes environnementaux d'origine agricole sont les risques de pollutions diffuses par les nitrates dans les eaux de surface et souterraines, la maîtrise des impacts de l'utilisation de produits phytosanitaires sur différents compartiments de l'environnement, ainsi que la réduction de biodiversité en milieu agricole. Différents outils ont été mis en place pour limiter ces pressions sur l'environnement : mesures agri/environnementales, Programme de gestion durable de l'azote (incluant les effluents d'élevage), permis d'environnement ou encore réseau Natura 2000.

FORÊTS

Les forêts occupent environ 545 000 hectares, soit le tiers du territoire de la Région wallonne. Conséquence d'une sylviculture autrefois principalement orientée vers la production, la forêt actuelle est peu diversifiée : 64% de la superficie est couverte par des peuplements monospécifiques d'épicéas (31%), de chênes (21 %) ou de hêtres (11 %). Près de 90 % des surfaces participent de manière plus ou moins intensive à la production de bois. Le solde inclut notamment des milieux comme les landes, fagnes ou étangs, qui ont souvent un grand intérêt faunistique et floristique. La forêt doit aussi faire face à différents problèmes comme les maladies, les dépérissements ou les fortes densités de gibiers, sans oublier dans certains cas les pressions liées au tourisme. Globalement, l'état de santé des arbres s'améliore, même s'il reste préoccupant pour certaines essences. Les prélèvements sont actuellement inférieurs à la production, ce qui se traduit par une augmentation des volumes de bois sur pied. La gestion forestière évolue progressivement pour rencontrer les préoccupations environnementales. La forêt wallonne est notamment entrée dans un processus de certification dont l'objectif est de promouvoir une gestion forestière viable économiquement, respectueuse de l'environnement et socialement bénéfique. Un peu plus d'un tiers des forêts sont actuellement certifiées. Par ailleurs, l'implantation d'essences de qualité, adaptées aux conditions locales, et suffisamment diversifiées est favorisée.

TRANSPORTS

L'utilisation de la route est prépondérante pour le transport des personnes et des marchandises en Région wallonne, couvrant respectivement plus de 90 % et 80 % de la demande. Ces taux d'utilisation des transports routiers figurent parmi les plus élevés en Europe, influencés notamment par le transit international. Bien que de moindre importance par rapport à la route, les transports par rail et voies fluviales sont en croissance. Le trafic aérien quant à lui continue son essor sur les aéroports de Liège et de Charleroi. L'intensification des transports, tous modes confondus, engendre des pressions sur l'environnement : consommation accrue d'énergie (+21% depuis 1990), émissions de gaz à effet de serre (+23 % depuis 1990) et autres polluants, fragmentation du territoire, détérioration des écosystèmes. Certaines de ces pressions portent, à divers degrés, atteinte à la santé humaine : rejets de particules, bruit, etc. Les voitures et les camions génèrent aussi des impacts plus spécifiques comme les congestions, l'insécurité routière et le stress. Bien que les évolutions technologiques permettent aujourd'hui de minimiser les pressions de certains modes de transports sur l'environnement, les bénéfices sont compromis par l'augmentation générale du nombre de véhicules et de kilomètres parcourus. Les effets combinés de plusieurs directives européennes ont conduit toutefois à la réduction des émissions de substances acidifiantes des transports routiers (-26 % depuis 1990). Par ailleurs, des accords de branche conclus avec l'industrie automobile favorisent la diminution des émissions de gaz à effet de serre des véhicules neufs. Mais des efforts supplémentaires sont nécessaires, notamment en termes d'aménagement du territoire, de comportement individuel et d'organisation des transports en commun afin de maîtriser l'augmentation de la demande en transports, et favoriser l'utilisation de modes de transport moins dommageables pour l'environnement.

ÉNERGIE

En Région wallonne, le rapport entre la consommation totale d'énergie et la création de richesses (intensité énergétique) est parmi les plus élevés d'Europe. Ceci s'explique notamment par l'importance historique de l'industrie lourde dans le paysage économique wallon. L'intensité énergétique globale tend néanmoins à diminuer, grâce à l'émergence d'activités industrielles et tertiaires moins énergivores et à plus haute valeur ajoutée, ainsi qu'à l'amélioration de l'efficience énergétique de processus de production existants.

En ce qui concerne les sources d'énergie, on constate d'une part une réduction importante de la consommation des combustibles fossiles les plus polluants (charbon et dérivés), et une hausse de l'utilisation du gaz naturel. D'autre part, l'augmentation de la consommation de produits pétroliers est notamment liée à la croissance de la demande en transports. Globalement, la part des sources d'énergies renouvelables, en hausse, n'est encore que de 2,1% du total des besoins en énergie. Dans ce contexte, les principaux objectifs de la politique énergétique régionale sont la maîtrise de la demande en énergie dans les différents secteurs (industrie, tertiaire, ménages) et le recours accru aux combustibles moins polluants et aux sources d'énergies renouvelables. Un mécanisme de soutien à la production d'électricité issue de sources renouvelables ainsi que la promotion de politiques d'utilisation rationnelle de l'énergie destinées à l'industrie, au tertiaire et aux ménages ont notamment été développés.

DÉCHETS

La priorité en matière de gestion des déchets est à la prévention et plus particulièrement à la réduction des quantités de déchets générés. En pratique, cependant, les actions de prévention menées jusqu'ici n'ont pas été suffisamment efficientes en Région wallonne pour contrecarrer l'augmentation globale des quantités de déchets accompagnant la croissance économique. En effet, si le gisement des déchets ménagers se stabilise, les quantités de déchets industriels, de déchets dangereux ou de boues de stations d'épuration augmentent. En revanche, des avancées importantes s'observent dans le domaine de la valorisation. D'une part, la fraction très élevée des déchets industriels valorisés dépasse les objectifs prévus. D'autre part, les collectes sélectives progressent et, de 1997 à 2002, deux fois plus de déchets ménagers ont été valorisés. L'instauration et le développement de mécanismes d'obligation de reprise de certains déchets (pneus, piles, emballages, etc.) devraient améliorer ces performances. Tous les objectifs de valorisation ne sont toutefois pas atteints : le taux de valorisation en Région wallonne des déchets dangereux demeure inférieur aux objectifs (mais ceux-ci incluent la valorisation à l'étranger), et celui des boues de stations d'épuration diminue depuis 1999. En ce qui concerne l'élimination, près de 4 millions de tonnes de déchets sont encore dirigées annuellement vers les centres d'enfouissement technique (CET). Plus de 30% des déchets ménagers et près de la moitié des déchets dangereux sont éliminés par ce biais. Dans le but de réduire ces pourcentages, un calendrier d'interdiction progressive de mise en CET a été adopté par le Gouvernement wallon. Par ailleurs, pour résorber un important retard en matière de dragage et de curage des cours d'eau, 732000m3 de sédiments devraient être gérés annuellement, pendant 20 ans.

BRUIT

L'exposition quotidienne à des niveaux sonores dépassant 55 décibels (A) (moyenne pondérée sur le jour et la nuit) porte atteinte à la qualité de vie et à l'état de santé des personnes. Elle entraîne par exemple de la nervosité, des troubles du sommeil et des perturbations de la communication. En Europe, le taux d'exposition de la population au bruit continue de croître, suite notamment à l'augmentation des transports. En Région wallonne, les zones bruyantes se localisent principalement dans les grandes agglomérations telles que Liège, Charleroi, Mons et Namur, le long de certaines portions d'autoroutes et lignes ferroviaires, ainsi qu'autour des aéroports de Liège et de Charleroi. Toutefois, la cartographie exacte des zones de bruit n'est pas encore disponible, et il n'y a pas non plus d'estimation du taux d'exposition de la population au bruit. La transcription de la directive européenne «bruit» en droit wallon impliquera de disposer de ces informations au plus tard en 2007.

TOURISME

Les incidences du tourisme sur l'environnement sont très peu quantifiées. Les données disponibles concernent principalement l'hébergement alors que les pressions sont aussi largement liées au tourisme d'un jour (trafic routier, affluences locales...) et aux activités de loisirs (pressions sur les milieux naturels, bruit...). Le développement d'indicateurs en ce domaine sera l'une des tâches des prochaines éditions du tableau de bord.

Conclusions

Même si la Wallonie ne peut résoudre seule toute une série de problèmes d'ordre européen ou mondial dans le domaine de l'environnement comme, par exemple, le changement climatique, son pouvoir n'est pas négligeable. Il est clair qu'un énorme effort a été produit dans la politique de l'eau, en particulier le traitement des eaux usées. Il est aussi clair que la qualité de l'air s'est améliorée, que certaines avancées ont été enregistrées dans la politique des déchets ainsi que dans celle des sols. La mise en place tant retardée des zones protégées à statut spécial a replacé la Région dans la moyenne de l'Union européenne. Ce qui est inquiétant pour l'avenir, ce serait de voir augmenter l'urbanisation et donc la fragmentation de l'espace régional. Prévoir des nouveaux zonings industriels est une bonne chose, mais si ceux-ci sont au milieu de nulle part, c'est faire peu de cas des conséquences sur la mobilité et la consommation d'énergie. Ces deux derniers secteurs sont les véritables défis des années à venir, toute amélioration, voire même tout ralentissement des tendances négatives actuelles, exigera des mesures radicales qui susciteront clairement le mécontentement d'une partie de la population. En outre, une partie des compétences en cause sont toujours gérées par l'Autorité fédérale (SNCB, fiscalité, etc.) ce qui ne facilitera pas la tâche du gouvernement wallon ainsi privé de certains leviers indispensables, le feuilleton du RER ou celui de la mise à grande vitesse de la ligne Bruxelles-Namur-Luxembourg en sont des exemples récents. La question clé est finalement celle que devraient se poser toutes les sociétés occidentales : comment arriver à ce que la croissance économique n'engendre pas de pressions irréversibles sur le « patrimoine » environnemental et la santé de la population présentes et à venir ?

Le Tableau de bord de l'environnement wallon 2004 est disponible gratuitement sur simple demande (par courriel : eew.dgrne@mrw.wallonie.be ou par téléphone au 081/33 51 24) mais vous pouvez également le télécharger au format pdf sur : http://environnement.wallonie.be/eew/. Par ailleurs, un résumé du Tableau de bord est disponible sur ce site Internet.