Léopold III régna longtemps après son abdication

8 May, 2009

Histoire de la monarchie belge

Le relatif apaisement qui suivit le dénouement de la "question royale" [NDLR: le 1er août 1950, Léopold III fait annoncer qu'il se retire en faveur de son fils Baudouin qui assume dès lors ses prérogatives et qu'il abdiquera si le calme revient: il abdique de fait quelques mois plus tard] devait permettre à Albert [NDLR, le frère cadet de Baudouin Ier et l'actuel roi des Belges] de poursuivre sa formation tout en se mettant totalement en réserve de la monarchie. Contrairement à Baudouin, il n'était pas amené à rencontrer régulièrement le monde politique. Et plus précisément encore ceux qui, quelques années auparavant, étaient entrés en collision frontale avec son père. Certes, comme le roi Baudouin, il vivait encore avec ses parents au château de Laeken mais il ne devait forcément jamais participer aux entretiens officiels de son frère et de son père. Il était, en effet, fréquent au début du règne de Baudouin, que les hommes politiques reçus en audience rencontraient à la fois le Roi en exercice et celui qui ne l'était plus depuis peu. Cela débouchait parfois sur des situations très gênantes d'autant plus que la princesse Lilian [la deuxième épouse de Léopold III] venait ellle aussi se joindre à eux.

L'abdication de Léopold III n'avait pas clos le chapitre douloureux des rapports difficiles, car nombre d'hommes politiques avaient l'impression que le vrai patron du Palais demeurait Léopold III.

C'est dans cette optique que les socialistes avaient demandé que celui-ci s'installe définitivement à l'étranger avec ses proches mais les sociaux-chrétiens avaient écarté cette possibilité. Ils estimaient que l'idée n'était pas mauvaise en soi mais qu'elle aurait sûrement des effets contraires à ceux que l'on escomptait. Cela risquait tout simplement de replonger le pays dans un chaos certain. Car Baudoin manquait de bouteille et surtout de confiance en soi. Pire encore: il ne parvenait pas à cacher son aversion pour ceux qui, à ses yeux, avaient précipité la chute de son géniteur. Mais de là à continuer à se comporter comme un gentil fils obéissant face à son auguste père, il y avait quand même une marge. Et pourtant Joseph Pholien qui dirigea le gouvernement PSC-homogène de la mi-août 1950 à la mi-janvier 1952, a rapporté avoir été très gêné lors d'une audience au palais où le roi Baudouin avait été prié par ses parents d'aller chercher un cendrier pour l'excellence sociale-chrétienne.

Christian Laporte, Albert Ier, Premier roi fédéral Racines, Bruxelles, 2003, p. 33.

Au milieu des années 50 encore, cette situation avait été dénoncée comme une dyarchie par la revue Le Flambeau. On sait qu'en 1960 toujours, cette influence de Léopold III continuait à être importante, capitale même en ce qui concerne le Congo. Elle cesse après le mariage de Baudouin fin 1960.

Voir aussi Le discours antiwallon (anti-démocrate) de Pierre Mertens (dans "Une paix royale")