Po Julyin Lahaut

Toudi mensuel n°28-29, mai-juin 2000

Ce poème de Laurent Hendschel a une histoire. Nous l'avions publié déjà dans le tome 4 de la revue TOUDI (annuel, Enghien, 1990, p. 197). Laurent Hensdchel l'a retravaillé. On peut le trouver sur le site Internet de Lucien Mahin. Ce poème a été lu à la fondation du mouvement républicain flamand le 15 mars dernier, traduit en néerlandais à partir de la traduction française qu'y a incrustée L.Hendschel.

Texte d'une très grande beauté et d'une merveilleuse finesse. Tout l'épisode de la mort de Lahaut est mis entre parenthèses, renvoyant à l'occultation des événements de juillet 50 en Wallonie. La traduction de «ki n' aveut seu brêre avou les bèdots» serait mieux rendue par «l'homme qui n'avait pas subraire avec les bèdots (moutons)» Laurent Hendschel appelle cette occultation les «blanches pages». Elles ne le resteront pas... Lahaut qui «mord le soleil» c'est une allusion au surnom de Lahaut dans les camps de la mort L'homme qui avait le soleil dans sa poche, surnom qui lui fut donné par un noble polonais, compagnon de Lahaut dans les camps. Et que Jean Louvet reprit comme titre de sa célèbre pièce.

Ce poème est l'une des plus énergiques protestations contre l'amnésie wallonne : «blankès blankès pådjes di cwè cåzoz»

Ces pages blanches, nous nous acharnerons à les remplir des signes de notre libération. Julien Lahaut ne mourra plus jamais.

On djoû,

one sawouce,

on vistreuve one corone sul cabu d'on

rwè

[Un jour, quelque part, on vissait une couronne sur la tête d'un roi]

(a on momint

gna one sakî k' s'astampé èt criyî

one sacwè

insi : Vive li rèpublike)

[Soudain, quelqu'un se lève et crie quelque chose comme: Vive la République]

on pô pus tård

gn a deus djins k' mousnut èmon l' cia

ki n' aveut seu brêre avou les bèdots

ki n' s' aveut seu têre avou les moyas

[Un peu plus tard, deux personnes pénètrent chez celui qui n'avait pas pu suivre les convenances, qui n'avait pas su se taire avec les muets.]

gn a deus djins k' mousnut è s' måjo

- deus djins k' on n' conirè måy leus vizadjes -

èt distcherdjî leus

fiziks

èt mascårder

l' lomé

Julyin Lahaut

ki

tot

d' on

côp

hagne

li

solia.

[Deux personnes pénètrent chez lui - deux personnes dont n ne connaîtra jamais l'identité - et déchargent leur fusil et abattent le nommé Julien Lahaut qui soudain, mord le soleil]

dispeuy adon

on-z a rmètu do djane

sul corone sitritchiye

di rodje då rwè

[Depuis lors, on a remis du jaune sur la couronne éclaboussée de rouge du roi ]

on-z a rtapé do mwartî

su les cruwåds

èt del tchåss

dins les lives

[On a remis du mortier sur les herbes folles et de la chaux vive dans les livres]

les bèdots brêynut

les moyas s' têjnut

blankès blankès pådjes

di cwè cåzoz

[Les moutons bêlent, les muets se taisent. Pages tellement blanches, de quoi parlez-vous ?]

Lorint Hendschel, divin: Cink pititès ôdes, Les Cahiers Wallons, avril 1992 et TOUDI annuel, n° 4, 1990, p. 197 (sous une autre forme, ici retravaillée).

Site de Lucien Mahin (où se trouve aussi ce texte) http://www.walon.open.net.ma/