Relations Wallonie-Bruxelles et idée(s) de Nation

Toudi mensuel n°12, juin-juillet 1998

Le colloque La Communauté française et après? organisé par La Revue Nouvelle, TOUDI et Les Cahiers Marxistes le 9 mai dernier a réuni une centaine de participants venant de Wallonie, Bruxelles et de l'étranger (France, Danemark, Russie, Italie) et de Flandre ( Kas Deprez, fidèle à tous nos rendez-vous). Nous remercions nos lecteurs d'avoir suivi ces débats ardus au cours d'une journée d'été: nous y donnerons suite, sous la forme d'une publication, mais aussi à travers de contacts jugés fructueux par tous et dont le «témoin» français Jean Le Dû estima qu'ils étaient exempts de toute agressivité antiflamande. Inge Degn jugea que nous avions trop peur de parler d'identité, intimidés par la tradition «antiethnique» française et républicaine. Giovanni Carpinelli insista sur le fait que demeure une Belgique où des liens sont à gérer entre Flandre, Bruxelles et Wallonie. Notre ami russe Konstantyn Pozdnyakov, dans un français parfait, pointa surtout le danger de nationalisme. Jean Le Dû souligna que l'identité wallonne serait l'effet d'un mimétisme: s'il y a culture flamande, il faut une culture wallonne (pourtant, le lundisme, qui considère qu'il n'y a de culture en Belgique que française, à l'exclusion de tout trait propre, opère une coupure profonde entre culture et politique et aboutit à une schizophrénie regrettable). Le groupe GOUPIL, venu de La Revue Nouvelle parle d'une «Communauté politique Wallonie-Bruxelles», en référence à un projet plus qu'à une identité. On pourrait rétorquer à cela la remarque de Jean-Marc Ferry: «On a peine à croire que nos identités puissent se stabiliser suffisamment avec les procédures argumentatives d'une discussion rationnelle pourvue de la Publicité que procurent les grands médias de masse, tant que ces derniers intègrent mal la mémoire critique qui pourrait conférer une réelle profondeur à nos espaces publics.» Nous sommes réticents face à un rattachisme absolu qui nierait les longs rapports avec la Flandre qui nous façonnent (la Flandre faisant partie de l'identité wallonne, en reniant ce «passé», nous blessons/tuons la Flandre en nous et nous-mêmes). Nous ne voudrions pas d'une communauté politique, tabula rasa. Certains d'entre nous ont découvert grâce à un Louvet, l'intensité du Congrès national wallon de 1945. Certes, le passé idéologisé donne au groupe des raisons idéologiques d'exister, mais c'est aussi de vraies raisons que de savoir des compatriotes tendus vers cette liberté et indépendance que «nous ne perdrons pas». En croyant que F.André, par sa défense de la Nation, prônait seulement l'identité de la culture et de la communauté politique, Hugues Dumont, relayé par Le Soir, nous a condamnés comme «complexés» ou «nationalistes» et redit que la «Communauté française» serait postnationale puisque n'identifiant pas État et culture (deux identités la composent, bruxelloise et wallonne). Mais l'identité postnationale n'est pas un dépassement interne aux nations. Elle résulte de nations établissant le lien identité culturelle/ identité politique, mais se dépassant dans une communauté politique supérieure, dépassement externe. La «Communauté politique» Wallonie-Bruxelles ne serait postnationale que dans un cadre européen, la part «Nation» ne pouvant venir que de la Wallonie. La Belgique ne peut dépasser une Wallonie qu'elle a laissé tomber après la guerre. Voici la communication de François André.

Dans le cadre du présent atelier de réflexion, nous souhaitons examiner les relations Wallonie-Bruxelles à la lumière de l'idée toujours moderne de Nation. Même si depuis la fin de l'URSS le monde industrialisé a perdu son caractère bipolaire, même si l'on parle d'économie mondialisée ou globalisée (que cela soit réel ou supposé), il nous semble que face à cela, les gens éprouvent le besoin d'un cadre de référence proche : entre l'individu et l'universel, c'est jusqu'à nouvel ordre le cadre national qui peut jouer ce rôle. Il n'est donc pas question dans notre chef de dépasser ce cadre, Toudi s'est toujours opposé à l'idée d'Europe des Régions et considère que le concept d'identité post-nationale ne peut s'appliquer au cadre belge. Pour éviter toute confusion, nous examinerons schématiquement en premier lieu les deux approches dominantes lorsque l'on évoque l'idée de Nation et de nationalisme. Nous tenterons ensuite de tracer les contours d'une définition plus contemporaine de la Nation qui montrera pourquoi la Wallonie et la Flandre sont, selon nous, sur le point d'accéder à ce stade historique. Pour ceux qui s'en étonneront, c'est délibérément que les aspects juridiques et économiques des relations Wallonie-Bruxelles seront laissés de côté, ils font en effet l'objet d'ateliers de réflexion distincts.

Les théories du nationalisme ou le nationalisme sans la nation

1. Les théories ethno-nationales

A.D Smith dans son ouvrage The ethnic origins of nations insiste sur l'élément culturel ou ethnique du nationalisme, ce dernier étant considéré comme le noyau ethnique pré-moderne. Le nationalisme est un phénomène interne à une communauté culturelle et/ou ethnique qui est né dans le sillage du sécularisme des Lumières et de la formation de l'Etat moderne. Pour qu'un Etat ne soit pas condamné à l'instabilité voire à la fragmentation, il doit refléter la division quasi universelle du genre humain qui est celle séparant entre elles les communautés culturelles telles que façonnées par l'histoire. La Nation n'est alors rien d'autre qu'un groupe ethnique conscient de lui-même. Outre la grande imprécision du concept même d'ethnie, Smith semble ignorer la persistance des divisions ethniques et l'évolution constante des ethno-nations, certaines ethnies disparaissant, d'autres s'affirmant. Dans la réalité, la Nation moderne peut être liée à une caractéristique ethnique mais celle-ci est insuffisante pour la déterminer: ainsi, aucune Nation d'Europe occidentale n'est «ethniquement pure».

2. Le nationalisme comme réponse à la modernité

E.Gellner dans son célèbre ouvrage Nation & Nationalism met en avant le rôle des facteurs socio-économiques dans l'émergence de l'identité nationale, le processus de modernisation enclenché par la révolution industrielle non seulement conduit, mais a besoin de la création de nations et d'Etats-nations.

Ces derniers devenant l'élément unificateur d'une société de masse qui a perdu les liens sociaux propres à la civilisation agraire, ils permettent la mobilité sociale par le biais d'un monopole sur l'appareil éducatif et assurent une certaine stabilité sociale par la création de cultures nationales homogénéisées. Selon sa boutade tant plagiée, ce sont les nationalistes qui font la nation. L'Etat-nation permet donc de compenser les forces aliénantes et dépersonnalisantes de la modernité en offrant un processus de re-socialisation au sein d'une communauté imaginaire. Il y a donc un lien indissoluble entre l'Etat moderne et une culture nationale. Gellner semble toutefois oublier que la modernité en elle-même n'est pas un phénomène neutre et non-conflictuel, elle créée en effet de nouvelles divisions sociales qui peuvent jouer un rôle central dans l'essor du nationalisme.

3. Le nationalisme outil de la lutte des classes

E.Hobsbawn dans Nations & Nationalism since 1780 considère que le nationalisme est enraciné dans la logique oppressive et exploiteuse du capitalisme, il est l'outil idéologique de la classe dominant ce système c'est à dire la bourgeoisie. L'intérêt national n'est rien d'autre que celui de la classe au pouvoir, le nationalisme devenant l'un des moyens lui permettant de maintenir cette suprématie. L'Etat-nation sera donc le cadre de l'exploitation mais aussi de la résistance du prolétariat, il exprime la lutte des diverses classes entre elles au sein d'une Nation divisée. Dans les sociétés victimes de l'impérialisme des puissances capitalistes, le nationalisme peut par contre devenir le moyen d'expression des exploités et des opprimés réclamant la possibilité de façonner leur destin propre. Le nationalisme permet donc soit le maintien de la suprématie de la classe dominante soit l'émancipation des peuples victimes de l'impérialisme dans le cadre d'une économie globalisée. Il est donc le résultat des transformations socio-économiques et socio-politiques que provoquent le capitalisme, il est le reflet des divers conflits d'intérêts qu'a provoqué l'interrelation des ces deux types de transformations.

4. Le conflit Métropole-Périphérie

B.Anderson dans Imagined communities reprend et affine les théories énoncées ci-dessus. Le nationalisme devenant chez lui la capacité d'une société donnée d'inventer ou de réinventer une communauté d'intérêts possédant une continuité historique, un passé commun et des expériences présentes rattachées à des aspirations futures. Le nationalisme d'après la deuxième guerre mondiale est issu du conflit opposant le nationalisme d'ordre mythique, populiste, révolutionnaire et articulant des revendications socio-économiques de la périphérie et de celui de l'élite étatique des métropoles essayant de maintenir l'unité et la stabilité nationales en faisant appel à un intérêt national tout aussi mythique.

5. L'approche stato-centrée

Cette approche très populaire parmi les auteurs français fait naître le nationalisme avec la constitution à partir de Richelieu de l'Etat moderne. Il est l'idéologie liant une société civile à un Etat possédant un territoire donné et réclamant un pouvoir général et universel sur la vie publique des ses citoyens. Le nationalisme est la doctrine politique légitimatrice de l'union entre la souveraineté politique et la citoyenneté nationale et qui fusionne la Nation, la société civile et l'Etat dans une seule entité ayant pour vocation la définition et la poursuite de l'intérêt national.

La communauté des citoyens ou la Nation sans le nationalisme

Cette approche a surtout été mise en avant par Dominique Schnapper dans La communauté des citoyens. La Révolution française a consacré le concept d'une citoyenneté reposant sur des droits mais aussi des devoirs. Les droits, c'est l'Etat de droit en général et la Déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen en particulier. Les devoirs c'est la séparation entre la sphère privée et la sphère publique, en clair, on peut être ce que l'on veut dans sa vie privée, à condition de respecter la souveraineté nationale et certaines valeurs civiques. On pourrait synthétiser ces valeurs civiques par le triptyque, à la fois universaliste et local, de Liberté-Egalité-Fraternité. Dans ce cadre, la République est une révolution perpétuelle, un idéal sans fin qui se confond avec la démocratie, la laïcité et la souveraineté nationale. Les échecs rapides de la I ère et de la IIe République ont montré que le sentiment d'appartenance à une collectivité, de même que l'adhésion à certaines valeurs, ne suffisent pas à créer une citoyenneté. Selon le philosophe P-A. Taguieff , toute vie sociale présuppose une identité de groupe ou collective, en un mot une identité nationale. Cette identité française va se former tout au long du XIXe siècle et va être affirmée par la IIIe République. Ne dissimulons pas les faits, cette identité est en grande partie imaginaire, c'est ce qui fait sa force et son danger. «L'identité c'est un cadre, une structure vide que l'on remplit de façon plus ou moins arbitraire avec des représentations, des valeurs, des croyances, des intérêts, des formes d'attachement et de loyauté qui sont des faits culturels. C'est une forme vide saturée d'imaginaire, un horizon par rapport auquel les gens vivent, pensent, sentent. Un point de repère en même temps qu'une source de sens.»

Vers une nouvelle approche de la nation et du nationalisme

Ces deux approches nous semblent présenter le défaut d'isoler nation et nationalisme alors que ces deux phénomènes sont évidemment liés et se suivent souvent de près. Si l'on se base sur les critiques émises par le philosophe français Gil Delannoi, la première approche qui est essentiellement le fait d'auteurs anglo-saxons repose sur l'idée que puisque nous savons ce qu'est un Etat, une culture, une classe sociale, inutile de rechercher une définition à la Nation, celle-ci n'étant que la rencontre d'un Etat et d'une culture ou d'une classe sociale. L'entité «Nation» ne présente aucune existence autonome, toute idéologie nationale apparaît dès lors comme une forme de nationalisme. Donc si c'est le nationalisme qui définit la Nation, l'aspiration à la souveraineté passe déjà pour nationaliste, on se trouve donc face à des modèles qui connaissent l'Etat, la culture, les classes sociales, le nationalisme et sous-estiment la Nation. L'approche française fait quant à elle de la Nation une entité spécifique possédant une valeur propre et irremplaçable, elle n'est en rien assimilable à un Etat, à une culture ni même à un Etat-nation. Caractère et destin, volonté et mémoire, l'idée de Nation apparaît comme réactive et libératrice, ce modèle va alors progressivement se poser en modèle universel messager du Droit et de la Raison. Pourtant, et c'est la raison pour laquelle nous ne sommes pas rattachistes, l'originalité du modèle français le cantonne dans sa particularité, on ne peut simplement opposer la bonne Nation aux mauvais nationalismes, toute idéologie nationale étant sur le bord du nationalisme et aucune Nation ne pouvant se passer de ce ciment rhétorique et propagandiste. La vision française a un peu trop tendance à perdre de vue l'essence du phénomène national pour le confondre avec les notions de République et de Démocratie. Réduire la Nation à l'ethnie, à une culture nationale, aux classes sociales est contraire à l'histoire mais on ne peut se baser sur l'exemple des nations européennes qui ont réussi l'intégration de minorités nationales pour forger un idéal national supra-ethnique pour généraliser ce modèle. Une Nation démocratique ne peut être ethnique, mais, selon le même principe, elle ne peut pas non plus être cosmopolite. Elle n'est donc pas a priori malade du nationalisme ou vaccinée contre lui, sa réussite tenant justement à cette ambiguïté.

Quelle conclusion Delannoi tire-t-il de cette double critique ? Il faut en premier lieu maintenir la distinction entre le concept de Nation et le nationalisme mais aucune caractéristique concrète (langue, ethnie, territoire, religion, culture) n'est suffisante et nécessaire pour définir la Nation. La médiation politique est indispensable à toute entité nationale, mais celle-ci reste une forme vide, ouverte et aléatoire. Taguieff définit la Nation comme l'indicible, c'est ce qui EST. Par contre, Delannoi considère que l'on peut plus facilement mettre en évidence les grandes caractéristiques du nationalisme. Ce dernier comprenant en général les traits suivants : la peur du déclin, la réaction contre le présent au nom du passé ou de l'avenir, l'organicisme pour lequel l'individu peut être sacrifié pour le bien de l'ensemble de la communauté et l'usage de la propagande comme outil de mobilisation populaire. C'est donc l'histoire qui progressivement met en place des «communautés de destin», mais le seul destin historique ne suffit pas à transformer un groupe en nation, celle-ci étant idéalement comprise comme une communauté de délibération, de décision et de dessein. Il faut donc reconnaître qu'il n'existe pas de cheminement unique vers la Nation, elle est bien un lien concret et rhétorique entre le passé et le futur d'un groupe, mais ce lien reste indéterminé car il résulte à chaque fois d'une expérience collective singulière et contingente à chaque communauté de destin. Si l'on adopte cette définition de la nation comme la rencontre entre l'histoire et un imaginaire collectif, il me semble que nous pouvons considérer la Wallonie et la Flandre modernes comme deux communautés de destin possédant chacune un imaginaire propre et distinct mais aussi interpénétré. Ces deux Régions, par l'intermédiaire de cheminements historiques différents, sont sur le point de devenir des Nations, mais ce qui leur manque à toutes deux, c'est une vision claire des valeurs communes qui leur sont propres, valeurs étant simultanément source de sens, points de repère et lien entre le passé et le futur. Cette vision nous paraît importante car il ne peut y avoir, à notre sens, de vie sociale et civique sans loyauté et fidélité à des valeurs communes. Selon nous, il n'existe actuellement aucune communauté de destin et aucun imaginaire commun (certainement pas la belgitude désincarnée de certains) entre la Wallonie et Bruxelles. Ce état de fait n'exclut nullement et à priori la mise en place future d'une telle communauté de destin entre la Nation wallonne au berceau et la métropole bruxelloise mais il faudrait préalablement que les citoyens de ces deux entités expriment une telle volonté. Le délitement progressif de l'Etat belge est l'un des moteurs possibles de cette création.

Nous pensons que ces deux entités doivent demeurer distinctes et autonomes, ce qui pourrait prendre la forme d'une fédération ou d'une confédération d'Etats. La création d'une telle fédération après la disparition (toujours hypothétique) de l'Etat belge ne pourrait résulter que du respect de certains grands principes : - Une volonté populaire librement déterminée et exprimée au sein de ces deux entités - Ce nouvel Etat fédéral sera une République et aura sa capitale politique et administrative à Namur, il est hors de question de récupérer les Cobourg-Habsbourg par la petite porte de service - Les droits de la minorité flamande de Bruxelles et de Wallonie ainsi que ceux de la communauté germanophone seront protégés. Les institutions bruxelloises et des cantons de l'Est seront conservées. - Cet Etat sera d'une manière ou d'une autre associé à la République française. Ceux qui souhaite une telle union entre la Wallonie et Bruxelles devraient comprendre que la Communauté Française de Belgique est sans doute la plus mauvaise préparation qui soit à cette issue. Celle-ci provient en effet du nationalisme romantique qui sévissait en Flandre au XIXe siècle, nationalisme pour lequel ne pouvaient faire partie de la communauté nationale que ceux qui partageaient sa langue, sa culture, en un mot son sang et sa «race». Une telle base n'est aujourd'hui plus possible tant d'un point de vue éthique que pratique, la présence sur le sol des trois Régions d'innombrables nationalités et cultures obligeant à dépasser cette vision de la vie collective. L'appel à la solidarité de langue et de culture on a vu ce que cela a donné en Yougoslavie, les Wallons refuseront toujours d'être les «Grands Serbes» de l'Etat belge (mais nous en serons peut être les Slovènes ?). L'existence d'une Région Bruxelloise forte où l'ensemble de ses habitants (donc y compris ceux qui ne possèdent pas la nationalité belge) gèrent de manière commune, et non par le biais de la COCOF et de la COCON, toutes les matières régionales et communautaires ainsi que l'affirmation de nations wallonnes et flamandes ouvertes et modernes sont les plus sûrs moyens d'éviter tout dérapage fatal. La Belgique n'a jamais été multiculturelle comme le pensent certains, seuls la Wallonie, la Flandre et Bruxelles le sont réellement. La grande question à laquelle ces 3 entités devront répondre dans l'avenir est la suivante :

Est-il possible de sauvegarder un projet universaliste et intégrateur tout en garantissant la diversité des cultures ? Deux réponses sont fréquentes. Soit le néo-nationalisme ou le nationalisme xénophobe qui réduit la citoyenneté à la nationalité elle-même pensée comme une identité biologico-culturelle. le néo-nationalisme excluant de la citoyenneté, de la communauté nationale toute les minorités qu'elles soient ethniques, culturelles, religieuses. Citons deux exemples géographiquement proches: le Blok en Flandre et le Front National en France. L'autre réponse est le communautarisme, l'ethnicité ou le multiculturalisme qui est le miroir positif du point précédent. C'est le modèle anglo-saxon qui marche relativement bien, mais ce modèle exclut de la citoyenneté toute la population puisque l'individu en est réduit à n'être que le représentant de sa minorité. Il n'y a plus que des minorités divisibles à l'infini (hommes, femmes, Italiens, Irlandais, Juifs, Chicanos, Noirs, etc.), le «melting pot» s'étant transformé en «salad bowl». A Toudi, nous préférons une troisième solution, nous pensons que pour l'instant on n'a toujours rien trouvé de mieux que la souveraineté nationale, la République et la laïcité. Cette question nous apparaît en tout cas bien plus importante que celle de savoir si les deux Nations en gestation dans le cadre de l'Etat belge doivent accéder ou pas à la souveraineté étatique.

François ANDRE

(Mons, colloque du 9 mai 1998)

Références:

Gil Delannoi, Destin commun et destin communautaire. De l'utilité de distinguer et de définir nation et nationalisme, Institut de ciences politiques i socials, Barcelonne, 1995.

A Taguieff, La République menacée, coll. Conversations pour demain, éd. Textuel, Paris, 1996.

AD Smith, J. Hutchinson (editors) Nationalism, Oxford University Press, Oxford, 1994.