Compte rendu de Woke de Bart De Wever

6 December, 2023


Woke de BART DE WEVER

Bart De Wever m'a fait l'honneur de m'envoyer son livre intitulé Woke [ Kennes éditions, 2023, 19,99 €] où il s'en prend à cette tendance en Occident, le mot veut dire quelque chose comme « éveillé » en anglais. Surtout à propos de ce qui paraît fonder nos sociétés en Europe et en Amérique du Nord. Les grands personnages, « les héros et les saints » comme aurait dit Bergson. Dont selon lui, le rayonnement a permis les progrès de l'Esprit, redevables à ses yeux de personnes qui, de fait, en acte, incarnant générosité, ouverture, fraternité, sont les vrais moteurs de ces progrès que ne peuvent pas être les seuls principes -inefficients par eux-mêmes. Il cite en exemple Socrate et Jésus-Christ. Ces deux personnages ne sont pas les seuls à incarner cette efficience ni à mouvoir l'Histoire, mais sont emblématiques de ce que veut dire le philosophe de l'intuition.

Or, pas mal de ces « héros » ou « saints » (si ces deux-là sont moins discutés, ce qui ne veut pas dire qu'ils soient indiscutables), une foule d'autres sont de fait mis en cause. Et, écrit BDW, plus généralement, « pas un jour ne se passe sans que les médias flamands nous rappellent notre propre vilenie : une identité inventée qui sert de couverture à l'exclusion ; un passé rempli de pages sombres ; l'inégalité des sexes et le déni de l'identité sexuelle comme choix personnel ; une économie capitaliste qui détruit le climat et exploite le tiers-monde » (p. 16). Il regrette aussi que le débat en Wallonie n'existe pas sur ces questions ou en tout cas, se développe bien moins. On peut avancer une explication à ce manque par le manque d'identité de la Wallonie. Mais il n'y a rien à craindre pour ce qui est des effets négatifs du wokisme chez nous : lorsque la RTBF a découvert récemment qu'il y avait trop de PFAS dans la distribution d'eau, cette télévision qui nous appelle rarement par notre nom au bénéfice du méprisant (et voulu tel), le « Sud-du-pays », s'est empressée de mettre en cause non plus le point cardinal de notre orientation par rapport à Bruxelles (qui ne concerne que Namur, Liège étant à l'est et Mons à l'ouest), mais la « Wallonie ». S'il est rarement question de sportifs, d'artistes, de scientifiques ou d'entreprises de pointe (tout ce qui peut valoriser un peuple) wallons, en revanche les armes par exemple, les politiques corrompus (et tout ce qui va mal en Wallonie), on en respecte alors scrupuleusementl'identité.

Vraies et fausses critiques de l'Occident

BDW illustre le wokisme par une série de noms qui se sont vus stigmatisés comme Churchill, Voltaire, Hume, Locke, Jefferson (celui qui a écrit [car c'était un vrai écrivain] la Déclaration d'indépendance US), Lincoln. Il admet les erreurs du mouvement flamand à partir des années 30. Il reconnaît aussi que le roi a eu raison d'exprimer ses regrets pour les crimes de la colonisation du Congo mais estime que Philippe Ieraurait dû citer le responsable principal au départ de ces crimes, Léopold II. Il compare aussi la façon dont en Occident on pointe la grave faute de l'esclavagisme, ce que ne font pas les Arabes et les Africains sur leurs propres responsabilités dans ce domaine jugées plus lourdes. Seul l'Occident semble invité (et s'inviter), à ce repentir (p. 31-44). Voilà des remarques très justes.

Il y a une critique à lui faire ici. Il me semble que comme la guerre d'Ukraine l'a montré ou les bombardements de Gaza par Israël, ce qui est vraiment à reprocher à l'Occident et qui lui est à mon sens spécifique, c'est que beaucoup de ses entreprises militaires depuis 1945 (et avant bien entendu), se sont souvent justifiées au nom des droits humains. Et que cela entre en contradiction avec les leçons de démocratie et d'humanisme qu'il donne sans cesse, même quand il envahit, colonise et tue. Et qui semble bien moins sévère face à la guerre menée aux Palestiniens par Israël par exemple. En revanche je lui donne raison quand il stigmatise le discours du président de la FIFA à la coupe du monde au Qatar jugeant l'Europe coupable de ce qu'elle fait depuis... 3.000 ans. Le wokisme sombre ainsi souvent dans le grotesque.

Le wokisme contre la nation

Je suis d'accord également avec BDW lorsqu'il regrette ceci : « L'idée qu'il existe quelque chose comme un peuple (dans le monde occidental), et plus encore que construire une communauté sur cette base est judicieux, est considérée comme dépassée et reposant uniquement sur des mensonges pour ne viser que le racisme et l'exclusion. » (p.50) Plusieurs journalistes en Flandre (et l'écho s'est répercuté en Wallonie), ont mis en cause le programme télévisé sur l'histoire de la Flandre ou l'établissement d'un « canon » flamand, effort que propose le gouvernement flamand, sur le modèle des Pays-Bas, en vue de fixer les éléments importants du passé de la Flandre. BDW cite à ce propos (ce qui m'a étonné), la remarque d'un historien, membre du PVDA (le PTB en Flandre), qui a fait observer que ces remarques critiques ne se seraient pas formulées, s'il s'était agi d'un canon « belge ». Il y a là, une vraie logique : Michaël Billig a montré qu'il existe un « banal nationalism » qui par toute une série de routines (les cartes des prévisions météo, la manière de dire LE Parlement, LE gouvernement, de distinguer politique intérieure et internationale), rappelle sans cesse l'appartenance à la nation (sans que l'on en soit conscient) comme une évidence qu'on ne discute pas alors que, en droit, elle est tout autant discutable. On a mis en cause les cartes de la Catalogne que la télé catalane utilisait pour le bulletin météo. Or cela relève du bon sens. Le site de la revue Toudi est à ma connaissance le seul endroit où existe une carte de la Wallonie qui n'apparaisse pas comme une demi-Belgique. Ce nationalisme banal, Flandre et Wallonie auront du mal à s'en débarrasser.

L'attaque contre ce que nous sommes

Au chapitre IV de Woke, « L'attaque contre ce que nous sommes », BDW montre à travers une multitude d'exemples, qu'il s'agisse de la race ou du genre, qu'il existe une tendance à innocenter systématiquement les « victimes » et à culpabiliser les « bourreaux » : les femmes, par exemple, étant dans la première catégorie et les hommes dans la deuxième. Il prend la précaution à chaque fois d'admettre ce qu'il y a de vrai et de juste dans l'antiracisme ou le féminisme. Je le crois absolument sincère. Lors des premières négociations en vue de former un gouvernement belge auxquelles la NVA ait participé, Joëlle Milquet-une féministe-,fit l'éloge du comportement de BDW ce qui est probant vu la longueur de contacts pareils.

Il faudrait citer, puisque ces lignes sont écrites au moment de la guerre d'Israël contre le Hamas, les mésaventures survenues en France à la gauche radicale de Mélenchon, LFI. Il ne s'agit peut-être pas tout à fait de wokisme. Mais, malgré tout, cette manie de dénoncer au nom des identités a eu l'effet surprenant (et consternant), de mettre Jean-Luc Mélenchon au ban de la République. Un télex du Monde diplomatiquenous a appris le 17 novembre que l'agrégateur Europresse, avait relevé du 7 octobre au 7 novembre 2022, 4 occurrences où le mot « Mélenchon » intervient avec le mot « antisémite » dans les médias français. En 2023, sur la même période ; l'agrégateur a relevé cette fois 480 occurrences ! Toute personne de bonne foi sait que cet homme n'est pas antisémite. Mais il avait refusé de considérer le Hamas comme groupe terroriste. Le mérite du livre de BDW, c'est d'attirer notre attention sur de telles dérives qui obscurcissent les débats. Malhonnêtement.

La liberté devient l'ennemi

Au chapitre V « La liberté devient l'ennemi » BDW, cite De Potter (ce héros méconnu de 1830) : « Celui qui pense autrement ne doit pas faire taire l'autre, sinon l'autre le fera taire et l'opprimera à son tour [...] nous ne devons défendre les libertés que si elles s'appliquent à tous les citoyens, même ceux dont la doctrine s'oppose à la nôtre. » (p. 85). BDW regrette que les lois contre les actes discriminatoires se sont étendues à toute une série d'identités qui sont innombrables et enchevêtrées, avec comme conséquence selon lui qu'il s'agit d'un revirement par rapport à la liberté de 1830 qui protégeait les déclarations des citoyens. Ici on en arrive à la possibilité de se dresser en justice contreles déclarations des citoyens. L'historien Pierre Vidal-Naquet s'exprime un peu dans le même sens dans son livre L'histoire est mon combat, Albin Michel, Paris 2006 en ce qui concerne les lois contre le négationnisme :«Je suis contre, écrit-il, à cause de l'expérience soviétique. Il ne faut pas qu'il y ait des vérités d'État. Or, la loi Gayssot suppose que le massacre des juifs est une vérité d'État. Si l'on ne veut pas qu'il y ait des vérités d'État, il ne faut pas qu'il y ait des lois pour les imposer. J'ai toujours pensé, ajoutait-il, que la Shoah était l'affaire des historiens, mais pas l'affaire de l'État. » Mais si l'idée de BDW est bonne, il me semble donner un mauvais exemple en critiquant l'UNIA qui en arrive parfois à dresser la loi et l'État contre des entreprises privées, en transformant le licenciement d' un homme d'origine africaine en mesure discriminatoire, ce que la personne intéressée n'avait commencé à ressentir telle, que sous le conseil de l'UNIA et que la Justice a finalement mis à jour. Dans le cas d'espèce, BDW a raison, mais je dois dire que je remercie l'UNIA pour avoir montré entre autres que les policiers traduits devant les tribunaux ne sont quasiment jamais condamnés ou à des peines très légères n'allant pas plus loin que des TIG. C'est intéressant un organisme de ce genre dans la mesure où (je suis certain que c'est à son corps défendant), il est difficile pour un magistrat de condamner un partenaire nécessaire à son propre travail, un collègue en fait. BDW donne aussi l'exemple de Sarah Schlitz participant à une manifestation féminine qui était interdite aux hommes.

Ce sont des questions complexes. Il faut voir les cas d'espèce. Je comprends qu'on ait le droit de caricaturer le Prophète. Mais il arrive qu'on aille très loin dans l'exercice de cette liberté qui, certes, ne peut être mise en cause. Mais on en arrive parfois à faire de ces grossièretés le symbole de la liberté d'expression. Sans remettre en cause le droit des caricatures, il me semble que la liberté d'expression devrait être mise à profit dans le dialogue et que c'est plus fructueux. On a la liberté d'être grossier mais la liberté est plus que cela.

L'effondrement de la foi dans le progrès

J'ai aussi un problème avec le chapitre VI intitulé « L'effondrement de la foi dans le progrès ». Certains écologistes mettent en cause le capitalisme, d'autres répondent que c'est le productivisme qui est à mettre en cause puisque le productivisme a été aussi le fait de pays non capitalistes. Il est dangereux aussi de parler du terrorisme écologiste. À Sainte-Soline en France, en 2023, des manifestants ont voulu mettre en cause les « bassines » qui pompent l'eau des nappes phréatiques, eau qui manque à 15% d'agriculteurs grands consommateurs d'eau, avec tous les inconvénients pour tous les autres usagers s'agissant de ces réservoirs d'eau à l'abri dans le sous-sol mais non à l'air libre de toutes les pollutions comme dans les bassines. La gendarmerie française est intervenue avec une extrême violence blessant grièvement nombre de manifestants qui, en pleine campagne, ne menaçaient en définitive, ni biens, ni personnes. Mais simplement un énorme trou.

Aveuglement géopolitique

Au chapitre VII « Aveuglement géopolitique », j'ai encore plus de réticences. Il est vrai que nous nous aveuglons parfois sur l'Afrique et l'Asie (par exemple sur le fait que les négriers ont été aussi des Africains). Pendant toute la guerre d'Algérie, la gauche française a cru à une révolution d'abord socialiste en Algérie alors que c'était avant tout une révolution nationale, ce que De Gaulle, lui, avait sans doute mieux compris, d'où la nécessité dans laquelle il s'est trouvé de casser les dirigeants de l'armée française qui voulaient en fait la victoire militaire, mais aussi celle de l'Algérie française. Et lors du coup d'État d'avril 1961, 10 millions de grévistes à l'appel des socialistes et communistes, l'ont soutenu immédiatement. S'il y a eu un aveuglement géopolitique en France, chez les Français d'Algérie, c'est bien celui-là. Lors des massacres perpétrés dans le Constantinois par le FLN en 1955, qui avaient massacré près de 200 Français ou musulmans pro-français, la réaction de l'armée française et de colons a été de mitrailler des milliers d'Algériens, cette fois sans discrimination. Les historiens chiffrent le nombre de morts de 7 à 10.000. Comment a-t-on pu croire encore à la fraternité entre tous les habitants d'Algérie qu'ont mise en scène, sans doute sincèrement, les acteurs du 13 mai 1958 ? Quant au terrorisme islamiste, l'une de ces causes a été tout de même la deuxième guerre d'Irak à laquelle la France, la Belgique, le Luxembourg et l'Allemagne ont eu la lucidité de s'opposer, hélas sans effet à long terme. Sarkozy déclenchant une guerre tout autant dévastatrice en Libye peu après. Sur la guerre de la Russie en Ukraine, j'ai aussi des réticences sur la façon dont on y condamne la Russie. La lecture de Brezinski (Le Grand échiquier), interroge tout de même fameusement sur la volonté des USA de faire perdre à la Russie son statut de grande puissance. Ce qui selon Brezinski implique le contrôle de l'Ukraine, par son intégration à, l'OTAN et à l'UE, chose déjà faite par un accord avec l'Europe dont Pierre Rimbert dans Le Monde diplomatique montre dans « L'Ukraine et ses faux amis » (octobre 2022, p. 1 et 8), qu'il avait pour effet de supprimer la souveraineté économique de ce pays. Bruno Poncelet du Centre d'études de la FGTB wallonne avait déjà écrit, en 600 pages, dans Europe.Une autobiographie non autorisée. De la « paix américaine » à la civilisation « poubelle », CEPAG, Namur 2014 que « la finalité de l'UE » est la destruction de la démocratie politique, économique et sociale.

Ce n'est pas, à mon sens, se culpabiliser que de prendre conscience de ce que nos avancées démocratiques inouïes (la Sécurité sociale en particulier), d'une part arrangent bien nos compatriotes originaires du Sud de la planète, fait envie aux autres, mais ne nous autorisent pas à traiter ce Sud comme si c'étaient encore nos colonies (les USA en Amérique latine, la France en Afrique, où Sarkozy et Macron ont été grossièrement humiliants etc.). Dans notre intérêt il y a à chercher à revoir de fond en comble ces relations. Et les bavures policières en France mais aussi chez nous me semblent montrer qu'il y a un racisme systémique, la plupart des bavures policières concernent des personnes issues de l'immigration, bien souvent intégrées de longue date. Mais c'est plus leur appartenance sociale qu'ethnique qui me semble visée.

Le dérapage néolibéral

Le chapitre VIII « Le dérapage néolibéral » emporte ma conviction. Le wokisme, pense-t-il, « ne laisse que l'argent pour unir les personnes et l'humanité ». Il met en cause le fait que banques d'affaires et banques de dépôt ne soient plus séparées comme Roosevelt l'avait imposé. Il écrit, p. 119, « Les postmodernes rêvent d'une institution politique mondiale à laquelle tout le monde participe par cosmopolitisme convaincu [...] les profits exorbitants du capitalisme ne se sont souvent pas bas ssur une réelle activité économique. Les pouvoirs publics, pendant ce temps, lâchent les rênes financières comme jamais auparavant, ce qui, une fois que la bulle a éclaté, complique les investissements nécessaires, tue des emplois, fait fondre les avoirs des gentils épargnants et alourdit la charge fiscale. Seule l'élite économique et financière mondiale y échappe. » (p.119). Il exprime des réticences à l'égard de la libre circulation des personnes et de l'immigration. Certes, sur ce point il y aura des désaccords. Mais Le Monde diplomatiqueénonce des critiques analogues, estimant comme lui que la politique inconsidérée de l'immigration au Royaume uni est une des causes du Brexit. Je crois cependant que d'autres pratiques de l'Union européenne y sape la démocratie sociale comme la mesure des travailleurs détachés, la primauté du droit européen sur le droit national, les mesures technocratiques comme l'imposition d'une même politique de contrainte, par exemple en matière budgétaire, dans la zone euro, alors que les économies s'y différencient radicalement. L'imposition d'une monnaie unique qui avantage outrageusement l'Allemagne. Je n'arrive pas à comprendre comment les fonctionnaires de la Commission européenne se permettent de juger des politiques des pays membres. Alors que ces pays sont parmi les plus avancés du monde. Je n'arrive pas non plus à comprendre comment il se fait que les États européens qui ont tant de mal à s'entendre, se soient si rapidement unis derrière la bannière étoilée quand Biden a assisté à leurs discussions en 2022. Je n'arrive pas à comprendre non plus comment il se fait que les pays européens n'ont pas réussi à trouver les terrains d'entente et de coopération avec la Russie. Ils ont au contraire poursuivi une politique d'extension de l'OTAN - soit le dessein de l'impérialisme US conseillé par Brezinski - pour rapprocher le plus possible de Moscou l'alliance militaire la plus puissante au monde dont les budgets sont supérieurs à ceux, tous additionnés, de toutes les autres armées de la Planète. Mearsheimer est une voix aux USA qui plaide en faveur de la compréhension d'une Russie acculée à défendre son statut de grande puissance. Il voit même comme dans l'attaque désespérée du Japon à Pearl Harbour, non pas du désespoir mais quelque chose d'une angoisse existentielle que nous avons mal comprise. Et nous comprenons mal aussi que l'armée russe à ce point mise en échec en Ukraine qu'on doit douter de la menace réelle qu'elle représente. A chaque génération il nous faut un nouvel Hitler.

Conclusion

Bart De Wever propose que la Flandre rejette le wokisme et s'assume en tant que nation démocratique : « Nous vivons sur un bout de terre au bord de la mer du Nord, nous parlons le néerlandais et nous avons construit ensemble un réseau culturel, social et économique qui nous permet de faire fonctionner une saine démocratie. Le logiciel des Lumières tourne sur cette machine... » (p. 126-127). Beaucoup de gens condamne la NVA parce qu'elle veut mettre fin à la Belgique. Mais en Wallonie, on devrait s'abstenir de cette critique. Malgré tous ses défauts, la Wallonie a prouvé qu'elle était capable d'assumer son autonomie, y compris sur le plan international quand elle a mis en cause le CETA. Sur ces questions, il ne peut pas y avoir de divergence avec la Flandre sur les principes, sauf l'avenir de Bruxelles. Ce qui me semble devoir être dit aussi, côté wallon, c'est la mise en cause de l'Union européenne qui est une machine à détruire, la démocratie économique, politique et sociale. Seule une grande nation comme la France me semble à même de casser cette orientation malencontreuse du continent. Il y a urgence dans la mesure où ces trois dimensions de la démocratie me semblent menacées car elles sont sans cesse détricotées. Et la mise progressive au pas des syndicats me semble annoncer un avenir où nous allons vers de plus en plus d'injustices et de plus en plus de servitudes. Je ne suis pas partisan de la réunion de la Wallonie à la France mais l'année que les Français viennent de vivre ne me rassure pas comme socialiste et républicain. Parce que la France est trop importante pour l'Europe et encore plus pour la Wallonie. Il est étonnant d'ailleurs que les médias alternatifs en France cite souvent nos avancées sociales et que nous échappons, nous, à la monarchie républicaine.

En tout cas, ce petit livre est à lire. Il est aussi de nature à dédiaboliser la NVA. Étant donné la configuration des rapports de force politiques en Flandre, nous avons intérêt à ce que ce parti sorte renforcé des prochaines élections.

Post scriptum
Le wokisme à l'université en Flandre

Il ne me semble pas que ce que Bart De Wever dit de l'université flamande vaille pour l'université en Wallonie ou en France mais, le wokisme y bat son plein de manière ahurissante. Je ne donnerai que l'exemple des toilettes. Bart De Wever raisonne ainsi : « Je peux concevoir que [...] la mise à la disposition de toilettes pour les utilisateurs qui ne peuvent ou ne veulent aller dans les toilettes pour hommes ou pour femmes pour une question physique ou de genre n'est évidemment pas problématique en soi. Mais les concepts d'homme et de femme doivent-ils être balayés pour autant ? Si l'on part de l'idée woke que le genre n'est pas une question de biologie, mais d'éducation, alors certainement. Que toutes les toilettes soient neutres du point de vue du genre devient alors un cheval de Troie symbolique important. » (p. 142-143).

En français ce wokisme envahit la langue écrite avec l'écriture dite inclusive (« iel » par exemple pour neutraliser « il » et « elle »). On peut aussi se servir du féminin générique italisé. Tous les noms de profession qui pourraient être aussi féminins sont écrits en italiques tout en restant masculins. La formule se veut plus souple. Mais une journaliste du « Monde diplomatique » rendant compte d'un livre dans le dernier numéro de ce mensuel (12/2023), qui utilise cette technique écrit : « Dommage que l'auteur ait choisi d'user systématiquement du « féminin générique italisé » qui perturbe considérablement la lecture et détourne les acquis de son précieux travail. Céder à l'époque ne sert pas nécessairement le propos. » Il y a quelques mois « Les linguistes atterrés », des spécialistes de la langue de toute la Francophonie ont publié un « tract » chez Gallimard (publication légère et qui a la dimension d'une brochure un peu conséquente) : Le Français va très bien, merci. C'est une réponse aux conservateurs de la langue qui crient périodiquement à son déclin. Comme le français ne possède pas de genre neutre, c'est le masculin (jugé « neutre »), qui l'emporte dans une phrase où les deux genres se présentent. Ce que ces linguistes proposent surtout c'est d'accorder massivement métiers et fonctions au genre de la personne qui l'exerce et de s'efforcer d'user de plusieurs techniques. Ce sera la plus employée qui l'emportera.