Commentaires sur "Pouvoir et Monarchie"

Toudi mensuel n°54-55, avril-mai 2003

Ce livre, Pouvoir et Monarchie*, dégèle le mur de glace construit depuis 1831 entre le pouvoir politique et la monarchie. En 1830, le législateur belge a voulu innover dans la répartition des pouvoir en faisant une concession à l'Ancien Régime par le biais d'une monarchie héréditaire d'une part, face à l'expression d'un nouveau régime démocratique représenté par un Parlement élu d'autre part. Le roi nomme les ministres mais ne peut agir seul. Le pouvoir du gouvernement est limité par le Parlement. Chacun devra s'en accommoder.

Cette dualité au sommet est comparable à celle de la base puisque la Belgique est composée de Wallons et de Flamands. À terme, cette double composante, monarchie et gouvernement, dans le haut, et Wallons - Flamands dans le bas ne fera que s'accentuer dans des conflits qui ne seront jamais résolus et mettent en cause actuellement aussi bien le maintien de la monarchie que l'existence de la Belgique. Une masse énorme de documents, livres et témoignages ont été dépouillés, lus et transmis dans plus de 400 pages de ce livre traduit en français puisque ce livre a d'abord paru en néerlandais. À partir de Léopold Ier qui « veut attirer à lui le plus de pouvoir possible » (p. 190) jusqu'à la nouvelle constitution qui limite l'influence d'Albert II (p. 241) on assiste à une lente mais inexorable érosion du pouvoir royal au profit des partis politiques. Léopold Ier s'en plaindra le plus, Léopold II se constituera une garde rapprochée, Albert Ier contournera l'obstacle, le Régent Charles s'en accommodera, Baudouin s'en consolera par un discours moral intransigeant et Albert II s'installera dans un assoupissement belvédérien .

Au fil des pages, on s'aperçoit d'une attitude constante de la monarchie dans ses rapports avec les familles politiques, celle d'une querelle de pouvoir qui culmine avec Léopold III.

Aussi on peut écrire que tous les partis politiques ont été «plus que moins» pour la monarchie à l'encontre de la monarchie qui a été «moins que plus» pour les partis politiques.

Après plus de 150 ans d'existence, la concession à l'Ancien Régime du début a perdu le terrain gagné par la démocratie.

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p. 21 La révolution de 1848 « qui a touché les pays voisins » a également touché la Belgique. Plusieurs études ont été publiées à ce sujet signées : Garsou, G.-H. Dumont, J.-C. Delhez, D. Olivier, L. Lejeune, E. Ned. Un livre très documenté vient de sortir et s'intitule : Le printemps Lorrain, La Révolution de 1848 en Lorraine Belge. J.C. Delhez. Thonne-la-Long 2002), Gand, Tournai ont fait trembler le trône de Léopold Ier à tel point que celui-ci a envisagé d'abdiquer moyennant une pension confortable. (Le Fil du Temps. Ecrits sur la Belgique, Paris 1975 Voir annexe.)

Léopold III, le Régent Charles, Lilian, vie dite «privée», vie publique...

p. 45 Au sujet du mariage de Léopold et d'Astrid, envers et contre les proclamations de la Reine Élisabeth à l'époque, nous savons que ce mariage a été arrangé comme celui de Baudouin et de Fabiola. Tel père, tel fils ?? (Léopold III, p. 37, 38. Ed. Complexe, Bruxelles, 2001).

p. 47 Dans ses entretiens avec G. Kirschen, Bruxelles 1984, Léopold se plaint de ne pas avoir été politiquement formé par son père, contrairement à ce que vous écrivez (G. Kirschen, L'éducation d'un prince, Didier Hatier, Bruxelles, 1984).

p. 48 Léopold n'a jamais refusé de faire intervenir ses convictions religieuses dans ses prises de position politique. Le discours du Trône en 1934 se termine par : « Puisse la divine providence nous assister. » Le 4 septembre 1939, message radio au pays se termine par :« Dieu protègera la Belgique. »

Le 27 octobre 1939, message à la nation américaine :« Si nous étions attaqués - et Dieu nous préserve d'un tel sort - » Le 10 mai 1940, proclamation au peuple belge :« La cause de la Belgique est pure, avec l'aide de Dieu, elle triomphera. »

Le 25 mai 1940 à l'armée :« La Providence nous aidera. »Le 7 juin 1944, message au peuple belge :

« Dieu continuera à protéger la Belgique et nous rendra bientôt la paix, la concorde et la liberté. »

p. 48 Il faut préciser que ce qu'on lit dans les notes de R. Capelle, secrétaire du Roi : « Le remède était très doux et que le patient pourrait difficilement mettre fin à la cure. » est un constat de la Reine Élisabeth qui a fait entrer Lilian dans l'intimité du Palais en 1940 (La Princesse Lilian, E. Raskin, p. 112, Ed. L. Pire 1999).

p. 49 La majorité des francophones n'est pas particulièrement indignée par le mariage de Léopold III. Les francophones sont choqués mais restent royalistes. Ce sont les Wallons qui sont révoltés parce qu'en se mariant, Léopold veille plus à son sort et ne respecte pas sa proclamation du 28 mai 1940 : « Je tiens à veiller sur votre sort et celui de vos familles. » Aucune prise de position publique de sa part sur le sort des prisonniers de guerre wallons. L'opinion publique ne se désintéresse pas du cas du souverain, au contraire, les clans vont se former et s'affronteront au grand jour dès 1944. (Voir Jean Stengers, Léopold III et le gouvernement, Duculot, Gembloux, 1980, p. 172)Si la solution finale de la question royale est trouvée en 1950 en désignant Baudouin comme Prince Royal, contrairement à ce que vous écrivez, Léopold n'a pas abdiqué en 1950 mais en 1951. Lilian est certainement déçue, mais pas du tout parce qu'elle perd une position importante dans la vie sociale, mais bien dans la vie publique.

p. 51 En septembre 1983, à la mort de Léopold III, la Belgique a trop bien digéré la question royale. En un peu plus de trente ans, Baudouin a redoré le Trône que son père avait passablement délavé. L'héritage n'était pas flamboyant ! « Les biographes et les romanciers qui publient des informations "non conformes" sur elle - la Princesse Lilian - ou sur Léopold sont menacés de procès. » En écrivant cela, vous allez trop vite en besogne. En effet, les deux seuls biographes de la Princesse Lilian sont E. Raskin et J. Cleeremans qui n'ont reçu aucune menace. E. Raskin, après avoir sollicité à plusieurs reprises la Princesse Lilian, n'a reçu qu'un silence méprisant. Quant à J. Cleeremans, lui, ce fut un silence... encourageant !

Le seul procès est celui du romancier P. Mertens. Pourquoi ? Parce que la Princesse Lilian s'est sentie trahie par ce monsieur qui avait fait des ronds de jambe pour s'introduire à Argenteuil et n'avait pas respecté dans ses écrits le contrat d'hospitalité que la Princesse Lilian lui avait accordé. Un silence princier aurait mieux valu ou au maximum un communiqué de presse stigmatisant la trahison. Le scandale n'a provoqué que l'augmentation des ventes d'un livre dont le contenu n'est qu'un ensemble de fantasmes d'un publiciste en quête de notoriété facile.

p. 54 C'est Léopold qui a interdit, dans les années 30, à Charles d'épouser une roturière. Dix ans après, personne ne lui signifiera la même interdiction. Au contraire, sa mère patronnera le remariage et le cardinal Van Roey bénira les amours du roi prisonnier avec une ... liane Baels ! (G.Bricmont-Barre, Le Prince Charles m'a dit, Bruxelles, 1993). Léopold ne se trouve pas dans «l'impossibilité de régner », seulement à la libération, mais bien depuis mai 1940 par le gouvernement et depuis juin 1940 par les juristes, Deveze, Hayoit de Termicourt et Pholien appelés par Léopold (voir J.Stengers, op. cit., pp 51-52)

p. 55 J'ignore où vous allez chercher qu'au début de la régence, les deux frères semblent s'entendre plus ou moins bien. En septembre 1944, les deux frères n'avaient aucune relation puisque Charles était Régent dans la Belgique libérée et Léopold était en Allemagne en tant que prisonnier. Peut-être est-ce parce qu'ils étaient séparés qu'ils s'entendaient ! « Les Frères se rencontrent à plusieurs reprises en Suisse. » Les Frères ne se sont rencontrés qu'une seule fois en Suisse, à Berne le 25 avril 1949 en présence de P.H. Spaak et de H. Moreau de Melen. Il n'y eut donc jamais aucun entretien fraternel en Suisse entre Léopold et Charles. De même, la Reine Elisabeth n'ira jamais voir son fils et ses petits-enfants en Suisse. Pour eux deux, la distance vis-à-vis de Léopold n'était pas que géographique ! (pour tout ceci voir H.Moreau de Melen, Mémoires, Bruxelles, 1980, p. 97 et Velaers et van Goethem, Leopold III, Lannoo, Tielt, 1994)

p. 55 Léopold III n'est pas arrivé à Bruxelles le 22 juillet 1950 « dans la matinée » mais à 7 h du matin et conduit au plus vite à Laeken. Pour l'accueillir, il y avait plus de soldats en armes le long des rues et des boulevards que de public. Il n'y a pas eu de « déménagement immédiat » du Prince Charles en juillet 1950. Ce n'est qu'en octobre 1950 que Charles a été sommé de quitter le Palais. « Il s'est passé cette semaine une goujaterie sans nom : le Prince Charles a été expulsé du Palais de Bruxelles par ordre de son frère Léopold III et sous les yeux de ses gendarmes. Le Prince m'a dit : "Vous voyez, voilà mon frère." J'avais bien fait de prévoir et de marquer mon linge. C'est un gangster tout simplement. » (Mémoire de Valérie Montens, La vie politique, quotidienne et artistique de 1940 à 1950 à travers le journal d'Alfred Bastien artiste peintre (sous la direction de Jean Stengers année académique1989-1990, Cahier Alfred Bastien n° 15380, 7 octobre 1950).

Il ne s'est pas « installé » à l'Hôtel Métropole (page 55). « Il parle aussi d'aller s'installer à l'Hôtel Metropole pour faire enrager son frère. » (Cahier Bastien n° 15380, 17 octobre 1950 in Valérie Montens op. cit.). Il s'installe chez le peintre Alfred Bastien, chaussée de Vleurgat à Ixelles.

p. 56 Charles refuse tout contact avec sa mère. « Et ma mère, qui s'est si fort trompée sur le caractère de ses trois enfants, est punie de son erreur : elle est reléguée au Stuyvenberg.». (Cahier A. Bastien n° 15380). « La Reine admet qu'elle a eu des torts et fait une grande erreur en mettant sans cesse Léopold en avant. Au fait, la Reine mère est aussi maltraitée par Léopold et sa triste séquelle que le Prince Charles. » (Cahier A. Bastien n° 15384). Charles ne signe pas ses peintures Charles de Flandre mais Karel Van Vlaanderen.

p. 56 Il n'y a pas eu de suppression de sa dotation mais refus de sa part. Quelques années plus tard, désargenté (!), il l'a réclamée. En septembre 1980, c'est lui qui organise une vente publique volontaire de quelques objets. C'est plus folklorique qu'autre chose ! Sa fortune est au secret dans les paradis fiscaux. (G.Bricmont-Barre, op. cit. pp. 251-252)

p.. 59 Les Belges s'obstinent depuis 1945 à écrire Pregny avec un e accent aigu alors qu'il n'en possède pas. (Lettre de M.Brelaz à D.OLivier du 15/6/2002)

p. 60 Il n'y a pas eu de « référendum » en 1950 mais une Consultation Populaire. Le référendum n'existe pas dans la Constitution belge. Le référendum est une approbation ou un refus sur une question, tandis qu'une consultation populaire en est un sous-produit puisqu'il ne peut être qu'indicatif. Le major Arnold de Corswaren n' « aurait » pas lancé un fumigène au Parlement, mais a bien lancé ce fumigène. Il a d'ailleurs été condamné pour cette atteinte à la bienséance de cette réunion historique. (Jo Gérard-Libois et José Gotovitch, De l'an quarante à l'effacement, coll-Pol-His, Bruxelles, 1991, pp.199-200)

p. 61 La question royale n'a pas été la première fracture entre la Flandre et la Wallonie. Beaucoup d'autres ont précédé: les prisonniers wallons, la collaboration, la neutralité. Achille Van Acker n'était pas un « adversaire notoire » de Léopold. En mai 1945, il ne l'était pas, en juin, il a même préparé avec Léopold un discours du Trône. Mais il n'était pas seul. Son gouvernement s'est opposé. Il a alors proposé à Léopold une sortie honorable que celui-ci a refusé. (Jo Gérard-Libois et José Gotovitch, op. cit. pp.199-200).

p. 63 C'est Max Buset le responsable de «l'adoucissement du protocole belge »: il aurait dit à Baudouin : « Il y a deux choses que je ne ferai jamais: Vous parler à la troisième personne et marcher à reculons à la fin d'une audience. »

p. 65 Le retour du voyage de noces de Baudouin et Fabiola est mémorable ! Plus de meubles au Château de Laeken, Léopold et Lilian ont tout emporté ! Ayant perdu le Trône royal, ils veulent continuer à vivre dans l'ambiance royale, alors, comme il est impossible d'emporter le château, on déménage les meubles et on vivra meublé royalement ! (JA Fralon, Baudouin Ier, Fayard, Paris, 2001, p. 230).

Sur le sentiment républicain, Baudouin, l'affaire de l'IVG, sa mort...

p. 67 « Le sentiment républicain est minime, surtout en Flandre. » Depuis 10 ans, l'idée républicaine s'est plus répandue en Flandre qu'en Wallonie. Et à la vitesse où tout évolue en Flandre, la Wallonie risque à nouveau de se faire dépasser. (Voir Le Monde Diplomatique d'octobre 2002, Serge Govaert). Ceci dit, le sentiment "républicain" en Flandre recouvre aussi l'opinion Vlaams Blok...

p. 70 Baudouin a eu un problème « de conscience » face à l'I.V.G. votée par le Parlement. En 43 ans de règne, c'est peu alors qu'il n'en a jamais eu pour signer des milliers d'arrêtés royaux pour des pouvoirs spéciaux, pour des restrictions sociales. Pas de problème de conscience pour l'assassinat de Lumumba, ni pour soutenir la dictature sanglante de Mobutu ! (Philippe Larsimont, L'affaire royale d'avril 1991, in Les faces cachées de la monarchie, revue (annuelle) TOUDI, n° 5, 1991 pp. 265-281). Au sujet de l'affaire de l'I.V.G., vous écrivez : « L'épreuve est dure à supporter, tant pour le Roi que pour la Reine. » p. 69 - Voici un problème de deux personnes qui prédomine des problèmes de milliers de couples face à une naissance non désirée ou impossible à assumer à cause des restrictions sociales signées par le Roi ! Comme si n'importe quel couple de Belgique pouvait refuser une loi ! Si le couple royal a des pouvoirs de ce type, il faut les lui enlever. Depuis douze ans, la proposition de Martens de séparer les lois qui doivent être signées par le Roi et par le Parlement n'a pas encore... accouché d'une loi.

« Le citoyen ordinaire ne tiendra pas rigueur à Baudouin pour cette affaire d'avortement, au contraire. » Qu'est-ce que c'est que ce « citoyen ordinaire »,? C'est un attardé mental, une personne sans mémoire, sans « conscience » politique, sans conscience de la vie même s'il doit la faire interrompre ? Il y aurait donc le « citoyen ordinaire » et le « citoyen extraordinaire» ? Comme son père en 1940, Baudouin a capitulé. Léopold III était face aux Allemands, Baudouin face au Parlement. Baudouin s'en est sorti par une « entourloupe ». Il n'en sera plus de même à l'avenir ! Par ailleurs, personne n'a posé la vraie question qui est la suivante : pourquoi avoir dû se battre des années pour obtenir la dépénalisation de l'avortement, sinon qu'on l'avait imposé ? Quant, comment et par qui ? Trouvez la réponse ! La ligne de démarcation (p. 70) n'est plus entre royalistes et antiroyalistes, mais entre monarchie et république. De la mise en cause d'une personne - Léopold III - la question s'est déplacée pour atteindre le régime. Il ne s'agit pas d'une polémique entre croyants et non-croyants, c'est complètement dépassé. Les croyants sont devenus républicains, surtout en Flandre, et certains non-croyants l'ont toujours été.

p. 70 Il n'y a pas de mystère en matière de succession au Trône. Il est clair que le clan « charismatique » a sa candidate en la personne d'Astrid qui a ramené ses parents dans le droit chemin ! Mais le problème n'est pas là. La question est : y aura-t-il succession si Albert passe la septantaine ? En clair, Albert II est peut-être le dernier Roi des Belges. S'il avait fallu que le style de vie des rois et princes fût moralement irréprochable - allusion à celui du Prince Laurent, page 71, il est évident que la Belgique n'aurait pas eu de Roi depuis Léopold Ier ! (voir Questions royales, Labor, Bruxelles, 1994, pp. 14-15)

p. 71 Déjà lors de la mort du Roi Baudouin, la densité des foules avait été exagérée - de 30.000 le premier jour à 120.000, 500.000 à 1 million les jours suivants, d'après la presse. La file devant le Palais dura 20 heures, du jeudi 5 au vendredi 6 à 3 heures du matin et 16 heures le vendredi 6 de 7 à 23 heures. Si 1.200 personnes défilent en 1 heure, 43.200 auront pu passer devant le cercueil royal (Questions Royales, Ed. Labor p. 18). Votre citation de « nuit et jour » sans autre précision incite à nouveau à gonfler la réalité.

p. 73 Quant au château « entièrement rénové » du Stuyvenberg, il faut savoir que la pieuse Fabiola s'est installée dans les murs construits pour abriter les amours de Léopold Ier ! Ce château a été construit pour une de ses maîtresses, Arcadie Claret ! (voir J.Noterman, La République du Roi, Collet, Bruxelles, 1999, p.79).

Sur Albert II, les Fondations royales

p. 78 Si Albert fut pendant plusieurs années le commis voyageur de commerce de la Belgique, sa présence a certainement bénéficié plus aux entreprises belges qu'à l'emploi. En effet, et cela se remarque de plus en plus : bénéfice d'entreprise égale perte d'emplois. Au plus elles font des bénéfices, au plus elles licencient. Le souci des interventions royales se porte sur les entreprises et pas sur les licenciés ! À force de fréquenter des hommes d'affaires, personne n'est à l'abri d'être influencé par leur comportement : dessous de table, chantage, ripailles somptueuses ... eros system ! Eurosystem Hospitalier fut tout cela, pour se terminer par une faillite ... royale ! Aucune investigation, chape de plomb ! Secret d'Etat ! Et des tas de secrets ! (voir Van Bosbeke et Willemns, Kirchen and Co, EPO, Bruxelles, 1987, pp. 114-115)

p. 80 La Fondation Reine Paola est une des treize fondations de la Famille Royale. Si on fait l'addition de ces treize machines principalement à dominante charitable, on en arrive à dix milliards et plus : pour l'Enseignement - (Prix annuel Reine Paola) - qui en manque au niveau fédéral, pour la médecine - (Fondation médicale Reine Elisabeth) - les budgets de l'O.N.E. et d'autres sont diminués - (Fondation Roi Baudouin) pour « l'amélioration des conditions de vie aux plans économique, social, scientifique et culturel » (Métier de Roi, p. 80, P.Y. Monette, Ed. Alice 2002), alors que Baudouin a signé toutes les lois de blocage des salaires, de l'index et autres diminutions des dépenses ... sociales, scientifiques et culturelles ! De la main gauche, on organise une misère économique pour beaucoup et de la main droite, on soulage quelques miséreux. Au XIXème siècle, le patronat exploitait à outrance et les dames patronnesses faisaient la charité en conscience. Le modèle n'a pas changé, sinon qu'il s'est agrandi !

Albert I, Première Guerre, Entre-deux-guerres, politique de défense

p. 111 On ne s'interroge plus sur le rôle exact joué par de Broqueville, Ingenbleeck et Elisabeth. Albert, encerclé à Anvers, voulut rester avec son armée et éventuellement se constituer prisonnier. Sous l'insistance des trois précités, il consentit à faire retraite vers l'Yser. (Voir Baudouin Piret, Le roi albert, l'histoire et la légende, in Les Faces cahées de la monarchie belge, revue TOUDI (annuelle), p. 200. Quant au repli de l'armée belge vers Calais, souhaité par Albert Ier, c'est une réaction énergique du Général Joffre, déclarant qu'il ne pouvait être question d'un repli jusque vers Calais, qui fit revenir le Roi sur sa décision (Léopold III et le Gouvernement, J. Stengers, op. cit., p. 35).

p. 122 Une des idées les plus néfastes d'Albert d'abord et de Léopold ensuite, face au péril allemand, c'est la soi-disant utilisation par la France de la Belgique comme « couloir de transit ». L'alliance victorieuse de 1914-1918, avec tous les problèmes qui y ont surgi, ne leur sert à rien. Parce que la stratégie de la France ne leur convient pas, ils choisissent une politique personnelle qui les isole de tous, alors que la seule politique efficace est l'établissement de la plus large coalition possible avec tous les problèmes qu'elle pose. Ils vont jusqu'à repousser le système de défense frontalier (p. 123). Face à l'économie de guerre de l'Allemagne dès 1933, face au comportement ambigu de l'Angleterre et aux caprices de la France, il aurait fallu un roi lucide et énergique dénonciateur du nazisme, prônant une alliance occidentale Rome, Londres, Paris, Moscou etc. Facile à dire ! Aussi facile que cela s'est fait en 1941. Pour Rome, c'était trop tard en 1941, mais possible dans les années 30. (Voir F. Van Langenhove, L'élaboration de la politique étrangère de la Belgique entre les deux guerres mondiales, Académie de Belgique, 1979, p. 103)

p. 124 Il fallait appuyer la politique de Devèze en 1934 au lieu de la contrarier: défense de la frontière et rétablir les accords franco-belges.

p. 125 Réfuter comme le fait Léopold, le système de défense des frontières intégral de Devèze par l'argument qu'il ne s'agirait que de « quelques villages frontaliers », c'est manifester une ignorance criminelle d'une élémentaire stratégie militaire. La défense de l'indépendance commence à la frontière et pas ailleurs. La politique d'indépendance pour « prouver à tous que ce pays n'est pas le petit frère docile de la France » est ridicule. C'est une gaminerie, un raisonnement politiquement infantile. Ce choix plaisait à l'Allemagne, choisi comme grand frère de la Belgique ! Et il l'était économiquement.(Voir l'article G.Truffaut in Encyclopédie du mouvement wallon, Institut Destrée, Charleroi 2002, tome III, pp. 1556-1557).

p. 129 Le Roi n'est pas préoccupé par la situation internationale, il ne l'est que de la situation nationale. Il n'a aucune vision internationale. Il ne se préoccupe que de placer la Belgique isolément en revendiquant une place qui « neutralise » ( !) une alliance des pays susceptibles d'être agressés par l'Allemagne. L'idée de Léopold que seul un système défensif fort doit pouvoir neutraliser n'importe quelle agression est fausse et irréalisable. Fausse parce que la meilleure défense c'est l'attaque et irréalisable parce que le budget militaire ne le permet pas. Comme l'Allemagne et l'U.R.S.S., il fallait organiser une économie de défense de guerre et pas de neutralité qui est synonyme de passivité qui mène à un développement militaire attentiste. Léopold ne tient aucun compte des conséquences de ses choix militaires sur ses voisins. La France et l'Angleterre perdent ainsi un allié potentiel. Il ne s'agit pas de dicter une politique à la Belgique mais d'établir un plan de sécurité collective face au militarisme allemand. La contradiction majeure du choix de Léopold est la suivante : en renforçant l'armée belge d'une part par sa politique de neutralité, il affaiblit d'autre part l'opposition à l'Allemagne. (voir Dumoulin, Vandenwijngaert, Dujardin, Léopold III, éd. Complexe; Bruxelles, 2001, p. 92)

p. 130 Mars 1936, Violation du Traité de Locarno par l'Allemagne qui réoccupe la rive gauche du Rhin. Janvier 1937, Hitler s'engage à reconnaître et à garantir la neutralité de la Belgique comme il avait reconnu le Traité de Locarno ! Plutôt que de s'enthousiasmer comme il le fait d'une déclaration d'Hitler, Léopold aurait mieux fait de s'interroger sur l'action d'Hitler : viol d'un traité.

p. 132 Avril 1937, Déclaration franco-britannique dite des « mains libres » qui donne à la Belgique, suite à l'insistance de Léopold, un statut de nation garantie mais non garante. Qu'est-ce à dire, sinon qu'elle peut être aidée mais qu'elle n'aide pas. Elle a les mains libres ... et les pieds paralysés. Position absurde dans une situation où les mouvements politiques, économiques, sociaux et militaires marchent et s'accélèrent (Guerre d'Espagne, Front populaire, récession).(Voir Robert Devlesshouwer, Henri Rolin, éd. de l'ULB, Bruxelles, 1994, pp.188-189).

p. 135 Il ne s'agit pas de sauver la paix en août 1939 - Guerre d'Espagne, Autriche, Tchécoslovaquie - il n'y a plus de paix depuis 1936, excepté dans la tête de Léopold. Tous les pays même le sien, militarisent. Le groupe d'Oslo est ridicule. Au lieu de se mettre clairement à temps dans un camp, on chante un air d'opéra dans une salle clairsemée. (Jean Rey, Discours à la Chambre du 19/12/1939).

p. 136 Si encore la déclaration de guerre de la France et de l'Angleterre en septembre 1939 avait servi pour déclarer « les pieds libres » ( !) et faire «un appel du pied » ( !) aux garants, non elle ne sert qu'à renforcer l'obstination de Léopold de ne « se laisser détourner de ses buts propres par aucune considération » ! Ce n'est plus faire l'autruche, c'est l'aveuglement total élevé au rang de fidélité à la parole donnée ! Cette parole donnée n'est valable que si l'interlocuteur la respecte dans ses actes. Sinon, c'est une duperie. (Voir P. D'Ydewallle, Mémoires, Tome I, Racines, Bruxelles, 1994, pp. 215-288).Ne pas changer de tactique sous le prétexte que l'Allemagne pourrait s'en offusquer équivaut à faire le baise-main à des doigts d'étrangleur. Le comble est atteint en janvier 1940. Léopold a tous les plans de l'invasion des Pays-Bas, de la Belgique et du Luxembourg par les Allemands. Au lieu de se montrer «garant» en faisant appel à l'aide militaire de la France et de l'Angleterre, Léopold exige des garanties ! Suite à une méprise sur la demande de garantie effectuée par Léopold sans en avertir le gouvernement, les Franco-Britanniques sont prêts à une intervention militaire en Belgique. Au lieu de refuser de couvrir la politique personnelle du roi, comme il aurait dû le faire, ce qu'il fera, mais trop tard à Wijnendael, le gouvernement, par l'entremise de Spaak, empêche les Franco-Britanniques de faire front à temps à l'invasion allemande. Rien n'est fait d'avance, mais il est certain que si les Allemands en mai 1940 s'étaient trouvés face aux troupes belges, françaises et britanniques, la campagne aurait duré plus que dix-huit jours.

p. 140 En mars 1940, après être en possession des plans d'invasion allemands depuis janvier, Léopold entretient les ministres Pierlot, Spaak et Denis dans l'idée que mieux vaut adopter une politique sur ... l'intention que les alliés auraient, plutôt que sur les plans d'invasion que les Allemands ont !!! En avril 1940, suite à l'invasion par les Allemands de la Norvège et du Danemark, les alliés demandent d'amener des troupes en Belgique. Refus de Léopold, alors que depuis janvier, il est en possession des plans d'invasion. Jusqu'au 10 mai, Léopold parie que les Allemands n'oseront pas attaquer ! « Ne me frappe pas, mon père est agent de police ! » (Voir Général Van Overstraten, Albert Ier, Léopold III, Desclée de Brouwer, Bruges, 1946, p. 553.

p. 141 Pierlot n'a jamais pensé, écrit ou dit que la violation des frontières a bel et bien mis fin à l'indépendance belge. Il a pensé, dit et écrit, qu'il fallait continuer la guerre aux côtés des alliés et que Léopold était chef de l'Etat avant d'être chef de l'armée. En tant que tel, il se devait de suivre le gouvernement. Le sort des soldats était partagé entre ceux qui seraient prisonniers en Belgique et ceux qui seraient en France pour continuer la guerre. Pour décider de rester en Belgique, Léopold n'a pas eu besoin d'Henri de Man. Quand Léopold a pris sa décision le 25 mai à Wijnendael, Henri de Man était avec la Reine Elisabeth et n'assistait pas à l'entrevue avec Pierlot, Spaak, Vanderpoorten (et Denis que vous avez oublié). Si Henri de Man a influencé Léopold - encore faut-il examiner dans quelle mesure Léopold se laissait influencer -, ce n'est pas sous l'influence de de Man que Léopold a pris la décision de rester en Belgique. Il l'avait déjà prise dès le 10 mai 1940. Si les Allemands ont traversé les Ardennes avec une facilité déconcertante, c'est d'abord que dès 1936, Léopold avait refusé la défense des frontières ainsi que l'entrée des alliés en Belgique en septembre 1939, en janvier, mars et avril 1940. De plus, dès le 10 mai 1940, les Chasseurs Ardennais postés d'Arlon à Neufchateau ont reçu des ordres de repli pendant que les Français montaient en ligne à partir de Virton ! Les premiers combats ont eu lieu à Etalle entre Allemands et ... Français ! (Voir J.C. Delhez, Gaume mai 1940 - Lenclos 1996). Alors qu'aucun allié n'a signifié à Léopold qu'il n'était d'aucune aide dans le combat engagé, Léopold décide seul d'arrêter les combats. Si personne n'a le droit de sacrifier inutilement des vies humaines en cas de guerre, chacun a le devoir de continuer le combat jusqu'à la victoire. (Voir, HF Van Haal, Télémémoires, CRISP, Bruxelles, 1971, pp. 70-71)

La capitulation de mai 1940, l'occupation, De Man, 1945...

p. 144 Capitulation, reddition, armistice ont une seule signification, celle de déposer les armes. L'état de guerre subsiste et on négocie entre chefs d'armées, le général Derousseaux pour la Belgique et Reichenau pour l'Allemagne. (G de Lovinfosse, Au service de leurs majestés, Byblos Bruxelles, 1974, p 61 et Jours de guerre Tome II, Crédit Communal, Bruxelles, 1991, p. 36)

C'est Léopold à nouveau qui considère que déposer les armes équivaut à mettre fin à la guerre, alors que Léopold Ier a mis fin à la guerre de 1831 avec les Hollandais en 1838, Albert Ier celle de 1914-1918 en 1919 et pour celle de 1940, c'est le Premier Ministre J. Pholien qui signe la fin de l'état de guerre en 1951 Compte rendu analytique du Sénat du 12/7/51 (Remerciements à Monsieur Amaury du ministère des affaires étrangères pour ce renseignement). Contrairement à ce qui a été écrit depuis lors par tous les historiens, il y eut des conditions pour déposer les armes : sur le jour, l'heure, le matériel militaire, les soldats, les officiers, les réfugiés, la famille royale, etc.

p. 142 Pendant la campagne des dix-huit jours, Henri de Man n'a jamais été l'unique conseiller de Léopold ; il y avait les ministres, la Reine Elisabeth, le Prince Charles, l'État-Major et surtout son conseiller particulier, le général Van Overstraeten. La résignation existait dès le 10 mai 1940 au niveau de l'État-Major de l'armée et le pacifisme dans l'esprit de la population. Pierlot n'a jamais dit que la décision de capituler était illégale, il a parlé d'ouverture des négociations et de traiter avec l'ennemi suite à la demande d'un blanc-seing de Léopold pour former un gouvernement en Belgique occupée. Ce qui est illégal pour Pierlot, ce n'est pas sa décision de capituler puisque Léopold l'a prise lorsqu'il n'était pas soumis au pouvoir de l'occupant, mais bien de former un gouvernement. Les juristes Pholien, Devèze, de Termicourt, à la suite de Pierlot, ont confirmé l'impossibilité de régner. (Jours de guerre Tome II Crédit communal p 95 1991).

p. 143 La fureur d'Henri de Man ne date pas de juin 1940, il a plus été déçu de la politique des Allemands que de la politique de Laeken. Sa fureur s'est développée après la guerre contre la politique de Pirenne suivie par Léopold pendant la Question Royale. Quant à la lettre du Cardinal Van Roey, elle ne fait pas que défendre le roi, elle ne proteste pas contre l'agression allemande, au contraire, elle la décrit comme « Une action exceptionnelle de la divine Providence qui manifeste sa puissance par des événements énormes ».. « Hitler envoyé de la divine Providence»., c'est plus fort qu'Henri de Man qui lui ne parlait que de libération ! Si le 29 juin, Léopold sollicite un entretien avec Hitler, vous oubliez de signaler que le 28 juin, il a approuvé le manifeste de de Man qui appelle à « se soumettre à l'hégémonie allemande dans un parti unique, celui du peuple belge uni par sa fidélité à son roi et par sa volonté de réaliser la souveraineté du travail. » (Voir Michel Brélaz, Léopold III et Henri de Man, Antipodes, Genève, 1988, pp 66-176)

p. 144 Ce que Léopold craint le plus, ce n'est pas une victoire totale des alliés ni une Belgique dans le Reich allemand après une paix de compromis, mais surtout le bolchevisme. « Nos compatriotes ne se rendent pas compte du fléau épouvantable que représente le bolchevisme ... Sans être admirateur d'Hitler, il faut reconnaître qu'il essaie de mettre de l'ordre dans son pays et d'inculquer l'esprit de discipline dans la jeunesse. » - Léopold à Capelle le 8 août 1941.

p. 145 La rédaction du « Testament politique du 25 janvier 1944 » ne revient pas à l'influence maléfique de R. Capelle, au contraire, à sa lecture, il éprouva des « appréhensions ». (R. Capelle Au service du Roi, Tome II, Dessart, Bruxelles, 1949, p. 171). Ce testament est le meilleur dossier écrit en 1943 par Léopold pour ne plus régner après la guerre !

p. 146 Léopold ne pouvait être rapatrié en mai-juin 1945, la régence n'était pas supprimée et la loi de septembre 1944 sur l'impossibilité de régner était toujours en vigueur.

p. 149 « En 1949, Léopold approuve les conclusions de la commission qui déclare qu'en temps de guerre, le roi ne doit plus assumer le commandement de l'armée », d'après vous. Le roi est en exil à Pregny et ne règne plus. C'est le Régent qui approuve cette directive!

p. 151 Baudouin « souligne le fait que les militaires ne sont pas là pour faire la guerre, mais pour défendre la paix ». C'était la conception de Léopold III avant 1940. On sait où cela a mené ! Baudouin persiste:avec « une armée forte à même de dissuader les agresseurs potentiels ». Les armées de l'OTAN, armées défensives, c'est un euphémisme ! Les interventions de l'armée belge à l'extérieur du pays - Congo - Katanga - Rwanda - Somalie - Yougoslavie - etc., pour « dissuader les agresseurs potentiels » ??? Sans oublier qu'à l'intérieur du pays, l'armée sert aussi au maintien de l'ordre - 1950, 1960 et pas qu'au défilé du 21 juillet.

p. 163 « Maintenir l'intégrité du pays », c'est une aberration, puisque intégrité veut dire: qui ne subit aucune altération. Or, l'altération fondamentale était l'occupation allemande. La politique de Léopold III sous l'occupation est une politique de présence pour garder son Trône et de compromission avec Hitler pour garder sa place en cas de victoire allemande. (Velaers et van Goethem, in Leopold III, op. cit. Complexe, Bruxelles, 2001, pp. 158-161).

p. 172 Tous les Nothomb, depuis Jean-Baptiste jusque Charles-Ferdinand, ont toujours été prêts à « satisfaire les exigences du Roi et des catholiques», à l'exception de Paul Nothomb, navigateur dans l'escadrille Malraux pendant la guerre d'Espagne, dirigeant du Parti Communiste belge, résistant, prisonnier politique, évadé, campagne d'Allemagne en 1945, condamné, réhabilité, écrivain, professeur. (Paul Nothomb, Le délire logique, Phoebus, Paris, 1999).

L'antiparlementarisme des années 30, la politique de neutralité, à nouveau l'occupation...

p. 185 Les résultats électoraux de 1936 sont interprétés par Léopold en fonction de ses idées préconçues. D'après lui, la population veut un pouvoir plus fort parce que 11,49 % de l'électorat a voté extrême-droite à Bruxelles et en Wallonie et 7,12 % en Flandre, soit 18,61 %. Il oublie volontairement les 66,25 % - gauches et droites réunies, qui veulent, eux, plus de démocratie. La perte de pouvoir des partis traditionnels est très relative, puisque les partis traditionnels vont continuer à exercer le pouvoir et qu'il n'y aura pas de « pouvoir plus fort » selon le vœu de Léopold. La démocratie sera plus « forte » que Léopold. (Voir Noël De Winter, Élections et gouvernements, Creadif, Bruxerlles, 991, p. 109)

p. 187 Les politiciens socialistes n'étaient pas tous « tournés vers le neutralisme », loin s'en faut. Il y avait plus d'anti-neutralistes dans le parti socialiste que dans les autres partis. Les Wallons menés par G. Truffaut étaient opposés à la neutralité. (Voir Micheline Libon, Georges Truffaut, Institut Destrée, Charleroi, 2003, p. 70) Si, à l'époque, il y avait eu un Parlement wallon, la neutralité n'aurait pu être imposée aussi facilement.

p. 206 Dans son livre Pour l'Histoire, Léopold écrit : « J'ai connu en six ans, du 23 février 1934 au 10 mai 1940, six crises majeures et en outre dix-huit remaniements ministériels. » (p. 88) Vous en comptez vingt-deux. Qui dit mieux ? En réalité, il n'y en eut que huit ; les voici :

  • G. Theunis 20 novembre 1934
  • P. Van Zeeland 25 mars 1935
  • P. Van Zeeland 13 juin 1936
  • P.-E. Janson 23 novembre 1937
  • P.-H. Spaak 15 mai 1938
  • H. Pierlot 21 février 1939
  • H. Pierlot 18 avril 1939
  • H. Pierlot 3 septembre 1939

En six ans, Léopold a collaboré avec huit Premiers Ministres et non vingt-deux. De plus, sur ces huit, deux l'ont été plusieurs fois, cela donne cinq Premiers Ministres en six ans. C'est loin des vingt-deux ! Il faut ajouter que les grands ministères ne changent pas souvent de titulaire. On est loin de cette instabilité soi-disant permanente proclamée haut et fort ! (Noël de Winter, Elections et Gouvernements, op. cit.).

p. 208 L'antiparlementarisme des années 1936 ne réside pas dans l'idée de supprimer le Parlement, comme on a pu le constater dans les projets établis après l'invasion allemande, mais dans le but de l'améliorer, d'en supprimer les abus, afin de le rendre plus efficace. Aucun parti antiparlementaire n'a déserté le Parlement. Ils s'y sont installés et, dans l'ensemble, ils s'y sont conduits d'une façon conforme aux parlementaires qu'ils vomissaient quand ils n'étaient pas au Parlement !

p. 209 « Ragots» et «ne pas dire à Léopold toute la vérité de la part de Van Zeeland » ne vont pas bien ensemble. Van Zeeland a admis qu'il avait reçu certaines sommes de la banque nationale en étant Premier Ministre, en prétendant qu'elles servaient à rémunérer ses attachés de cabinet ! Dujardin et Dumoulin, P.Van Zeeland, Racines, Bruxelles, 1997, p. 98).

p. 212 L'incapacité de régner a été constatée d'abord par le gouvernement le 28 mai 1940 et en juin par les juristes appelés par le Roi. Mais entre-temps, il y eut l'affaire du blanc-seing demandé par Léopold pour la démission des ministres et la nomination d'un ministre nouveau. Cette demande est interprétée par tous, c'est-à-dire : le gouvernement, le chef du cabinet du roi, Frédéricq présent à Paris, R. Capelle, secrétaire du Roi, trois ministres d'Etat, le président de la Chambre et celui du Sénat, comme quoi, si Léopold veut constituer un nouveau gouvernement, c'est pour négocier avec l'ennemi. Pour tout ce beau monde, c'est la suite logique de Wynendaele. Ils parlent même de 12 balles dans la peau pour Van Overstraeten ! Dans la bousculade des événements depuis le 24 mai 1940, on ne peut pas leur donner tort. Prenant quelques audaces avec l'article 82 de la Constitution, constatant l'impossibilité de régner de Léopold qui est sous le pouvoir de l'envahisseur, le gouvernement exerce le pouvoir du roi. Mais pouvait-il pour une fois ne pas être audacieux ? Il s'agissait de sa survie! À l'encontre du gouvernement qui va réaliser sa politique après une dérive pendant le mois d'août, la politique personnelle du roi, elle, restera loin de sa réalisation: corporatisme, pouvoir fort, intégration dans l'ordre nouveau. Par sa présence et son influence, il cautionnera les actions de tous ceux qui s'inscrivent dans cette nouvelle forme d'État en participant aux structures existantes du pays, laissées en activité par l'occupant allemand. Tous se réclameront d'un patriotisme royal sans être explicitement désavoués par celui au nom de qui ils vont se compromettre. Pour eux, lorsqu'il s'agira de rendre des comptes, le silence sera encore... royal ! (Jean Stengers, Léopold III et le gouvernement, op. cit., p. 47-53).

p. 214 H. de Man s'est trompé jusqu'en novembre 1941 et il en tire les conséquences en quittant volontairement le pays, ne voulant pas être pris en otage par les Allemands. Ce qui l'a affecté le plus, c'est l'attitude de Léopold vis-à-vis de lui après 1945 ! (Voir M. Brelaz, Le dossier Léopold III, Ed. Antipodes, Genève1988). Contrairement à ce que vous écrivez, le Roi a plusieurs fois influencé les secrétaires généraux. Gérard Romsée, ancien député, gouverneur de la province du Limbourg a.i. depuis 40, fut nommé en mars 1941 au Ministère de l'Intérieur et de la Santé Publique. En mai 1941, la révocation d'Henri Baels, gouverneur de la Province de Flandre Occidentale en mai 40 et beau-père de Léopold, est annulée. (E. Raskin Princesse Lilian.,. L. Pire, Bruxelles,1999) Victor Leemans, secrétaire général des affaires économiques et administrateur de la Banque d'Emission, était en rapport constant avec le Cabinet du Roi pour le ravitaillement. Toutes les nominations des secrétaires généraux - Verwilgen, Custers, De Winter, etc., recevaient l'approbation de l'occupant allemand avant de passer par le roi, l'Église et les banquiers ! (Voir W. de Bock, Les plus belles années d'une génération, EPO, Bruxelles,1976)

p. 216 La régence de Charles a duré de septembre 1944 à juillet 1950 et non 1951. En juillet 1951, c'est l'abdication de Léopold. Et d'août 1950 à juillet 1951, Baudouin est Prince Royal. Si Léopold avait été chevaleresque, il aurait abdiqué en 1945 et la Régence aurait pu se poursuivre à la satisfaction de tous.

p. 217 Léopold n'a pas accepté la consultation populaire pour la simple raison que c'est lui qui l'a proposée dans sa lettre au Régent de juillet 1945. (Livre Blanc, p. 416 tome 1 1946). Le gouvernement refuse la proposition et jusqu'au 14 juillet, les discussions sont virulentes, le gouvernement poussant Léopold à l'abdication. Le 14 juillet, dans une lettre au Régent, Léopold prend une position définitive. « ... Dans une pensée d'apaisement, je renonce à rentrer au Pays avant qu'une consultation nationale ait pu avoir lieu. » (Livre Blanc, p. 435, 1946).

p. 219 Vous écrivez : « Les socialistes ratent d'un siège la majorité absolue à la Chambre » (N. de Winter, Elections du 26 juin 1949 Creadif 1991). Si c'était vrai, quelle joie ! Malheureusement pour vous et pour eux, ce sont les Catholiques, avec 105 sièges, qui ratent la majorité absolue, de 2 sièges. En effet, les libéraux ont 29 sièges, les socialistes 66 sièges et les communistes 12 sièges, ce qui donne 107 sièges. Pour avoir la majorité absolue, il manque deux sièges aux Catholiques. En guise de consolation, les Catholiques obtenaient la majorité absolue au Sénat. Depuis 1949, ce siège manqué, qui n'a jamais existé, fait partie du patrimoine des erreurs historiques de tous les commentateurs. Enfin Olivier vint !!! Si le Régent Charles est moins enthousiaste à propos de la consultation populaire, ce n'est pas du tout parce qu' « il sait que ce qu'un référendum décide peut être défait par un autre », mais parce qu'il prévoit que, puisqu'il n'y a qu'un seul parti qui fait campagne pour le retour du roi, celui-ci sera manifestement le roi d'un parti et plus du pays.

p. 221 Il y eut quatre tués à Grâce-Berleur et pas par la police, mais par la gendarmerie. Ils ont pour noms: Houbrecht, Vervaeren, Thomas, Cerepana.

p. 237 Le scénario de 1990 est comparable à mai 1940 sur l'impossibilité de régner, puisque le gouvernement a pris tellement de distance vis-à-vis de Baudouin qu'il a fait voter la loi sur l'I.V.G. Baudouin a autant voulu suivre son propre chemin que Léopold, au risque d'une nouvelle Question Royale. (Voir Ph.Larsimont, in Les faces cachées de la monarchie belge, op. cit.)

p. 238 Baudouin s'est toujours affirmé le Roi croyant et donc le Roi des croyants. Au fur et à mesure que le nombre de croyants diminuaient, sa foi augmentait! La soi-disant vertu qui l'a poussé à ne pas signer la loi sur l'I.V.G. date de l'époque des Rois Catholiques de l'ancien régime, dont Baudouin était nostalgique comme son père. Baudouin n'était pas de son siècle et aurait dû être descendu ou descendre de lui-même de son socle.

p. 239 Il n'y a pas de comparaison entre les élections de 1936 et 1991. 1936 a été un état de fièvre momentanée, 1991 est un état de température perdurante. Rossem ne pouvait qu'être éphémère, tandis que Vlaams Blok et Écolo sont toujours là et sont bien implantés. Ils sont les sous-produits l'un d'une Flandre qui ne parvient pas à se débarrasser de ses diablotins linguistico-racistes, l'autre est le dépotoir des verts pâturages cléricaux! Les deux, bien qu'ennemis, votent souvent ensemble à la Chambre.

p. 240 La popularité croissante de Baudouin est une popularité de paillette, de show-biz royal; les derniers feux de la rampe d'une Tribune royale qui jette ses dernières cartouches. La preuve en est que l'idée républicaine est sous-jacente à l'indépendance de la Flandre et que le rattachement de la Wallonie à la France est ouvertement républicain. Albert II n'est pas dans la ligne de Baudouin. Autant l'un est poussif, mafflu, jouisseur, poisson mou d'élevage en mer chaude, autant l'autre était hautain, sec, ascète, poisson dur élevé en mer arctique. Albert II assure tant bien que mal l'héritage endeuillé de son frère. C'est le chien-chien qui court de la porte fédérale à la régionale en passant par la communautaire pour qu'il n'y ait pas trop de courants d'air, tout en sachant que la tempête s'annonce !

p. 244 Dans l'affaire des disparitions et des assassins d'enfants, Albert II a sauvé les politiciens comme ceux-ci avaient sauvé son frère lors de l'I.V.G. Au moment où tout pouvait basculer: Trône, gouvernement, gendarmerie, magistrature, il s'est mouillé pour contenir la vague, c'était la dernière digue « avec la pleine adhésion du gouvernement », comme vous l'écrivez. Mais quatre lignes plus loin, vous écrivez le contraire : « Or, Albert s'oppose au gouvernement » ! Il faudrait savoir ! Adhésion d'un côté ou opposition de l'autre ! Depuis, Albert II laisse pisser le mérinos. On a tout saucissonné, Dutroux est... isolé, Nihoul est en liberté, l'enquête est... (L')engluée (!) et Albert II s'est retiré. Magistrats et avocats peuvent s'en donner à cœur-joie!

p. 246 En annexe, vous trouverez un article sur les événements de 1848 pendant lesquels Léopold Ier a effectivement proposé d'abdiquer. (Daniel Olivier, Le drapeau rouge (républicain) sur Virton, in revue TOUDI (mensuel), n° 10 mai 1998).

p. 256 Le Roi « au-dessus des partis », ça n'existe pas. Si les partis dominent, comme vous l'écrivez, alors il est en-dessous ! En réalité, il est entre les partis. Depuis la guerre de 1914-1918, il n'y a plus de parti qui domine, la coalition est dominante, à l'exception des années 1950-1954. Qui dit coalition dit nécessairement manœuvres entre les partis. C'est ce que fait le Roi lors des crises gouvernementales. En dehors de cela, il reçoit du monde, visite ses sujets, voyage, ... accumule et gère sa fortune! (Annexe 340 p 774 Recueil de documents établis par le secrétariat du roi,1936-1949).

p. 257 En 1950, quelques ultras du P.S.C. sont prêts à s'engager dans une « confrontation directe avec la gauche ». Pourquoi ne pas écrire ce qu'ils voulaient faire, c'est-à-dire sortir l'armée et tirer non pas sur la gauche, mais sur le peuple? De Vleeschauwer, Ministre de l'Intérieur, était pour : «Sire, on sera ainsi tranquilles pour vingt ans. » Dans la nuit, Léopold a convoqué trois parlementaires P.S.C. et a tenté d'influencer un ou deux ministres pour former un gouvernement. La majorité des ministres est restée solidaire de Duvieusart et la tentative a échoué. (Manu Dolhet, Le dénouement de la Question royale, Mémoire UCL, année académique, Louvain 2000-2001). Le pouvoir de Baudouin n'a pas grandi d'année en année, au contraire. Il était farouchement opposé au fédéralisme. En 1987, il refuse le poste de Premier Ministre à De Haene parce qu' « il a poussé trop loin la fédéralisation de la Belgique lors des négociations gouvernementales » (votre livre, p. 236). Il avait de l'influence pour retarder, il n'avait plus le pouvoir d'arrêter et le fédéralisme se fera. Il faisait beaucoup de causeries, il a, dit-on, confessé deux générations d'hommes politiques. Tout le monde sait qu'après la confession, on peut recommencer à pécher. Ces hommes politiques devaient se dire: cause toujours!

p. 259 Staf de Clerq n'a pas été remplacé par H-J. Elias, qui lui a succédé suite au décès du fondateur du V.N.V. en 1942. Remplacer : prendre la place. Succéder : venir après.

p. 260 L'U.D.B. n'obtient pas suffisamment de voix pour avoir des élus, il y en eut un par apparentement à Nivelles, Paul Levy, journaliste à l'INR., correspondant de guerre, professeur à l'Université de Louvain, à l'Ecole Européenne de Bruges, créateur du drapeau européen. Il démissionnera immédiatement, parce qu'il se serait senti trop seul à la Chambre ! (Pierre Stéphany, La Belgique sous la Régence, Quorum, Bruxelles, 1989, p. 157).

p. 264 John Cockerill n'est ni un fabricant et encore moins un Liégeois. C'est un industriel et un Anglais né à Haslington. S'il a utilisé la machine à vapeur, il utilisa surtout une machine aux hauts fourneaux, une deuxième aux laminoirs et deux autres pour les marteaux. C'est le début de la sidérurgie liégeoise qui propulse la Belgique dans les cinq pays les plus industrialisés du monde. (La Wallonie, le pays et les homes, Histoire et sociétés, La renaissance du livre, Bruxelles, 1975, Tome II, p. 338).

p. 272 « Selon la conception courante de l'époque, c'est le lot des travailleurs. » (Travail des enfants, taudis, salaires de misère). Cette conception est courante chez ceux qui justifient cette situation par la fatalité. Les dirigeants se doivent d'exploiter le peuple pour que ceux qui le composent gagnent leur ciel - on faisait la prière avant le travail - et pour que les autres gagnent... sur terre ! Le travail acharné ne donnait pas la richesse, contrairement à ce que vous écrivez. La richesse venait de l'exploitation acharnée qui ne produisait que de la pauvreté.

p. 274 Les grandes grèves de 1886 ont d'abord provoqué des morts par les soldats du roi, plus d'une vingtaine de tués et des centaines de blessés. « La loi du marché » était déjà le culte du gouvernement catholique, les lourdes condemnations, la vocation des magistrats et les tirs lourds, celle de l'armée. Mettre en parallèle les efforts de Beernaert pour «assouplir la législation électorale et les lois sociales » avec les grèves, c'est un peu fort de café. Le 30 mars 1886, Beernaert annonce des travaux publics, la constitution d'une commission d'enquête, mais rien sur une quelconque réforme. Il tient le discours libéral classique : « C'est le capital qui souffre, c'est le capital qui est à plaindre. » (1886, La Wallonie née de la Grève, Labor, Bruxelles, 1987, pp. 121-122). La réforme se traînera jusqu'en 1894. La « récompense » de Beernaert dont vous parlez, il faut la chercher du côté de l'État indépendant du Congo et pas ailleurs! Beernaert a été l'instrument privilégié de Léopold II pour s'accaparer le Congo. (Van Groenweghe, Du sang sur les lianes, Didier Hatier, Bruxelles, 1986, p. 85)

p. 276 Coquille exemplaire en ce qui concerne Léopold II à Ostende, la... vice d'Ostende est agrandie!

p. 279 Le mythe de la « reine-infirmière est né ». Pour Charles son fils, ce fut pénible : « Ma mère revenait de ses tournées dans les hôpitaux empuantant l'acide phénique. Je détestais cette odeur. Elle me répugnait. » (Le Prince Charles m'a dit p.83-LG Briemont-Barre 1993). Comme quoi le soulagement aux uns empuante l'autre ! Le Bœuf, un médecin belge prénommé Paul est administrateur de la Croix-Rouge de Belgique, il fait partie du Comité National de secours et d'alimentation. Il est aussi le frère d'Henry le Bœuf, banquier, fondateur et financier du Palais des Beaux-Arts de Bruxelles.

Monarchie, bourgeoisie, classe ouvrière et colonisation

p. 281 « Le Roi veut offrir à M. Tout-le-Monde les conditions matérielles qui leur permettront de s'épanouir physiquement, moralement et intellectuellement. » Discours du 22 novembre 1918. Quinze ans après, en 1933, le film Borinage de J. Ivens et H. Storck montre la situation de M. Tout-le-Monde, pour reprendre votre expression qui ne correspond par ailleurs à rien. M. Tout-le-Monde n'existe que dans les discours lénifiants des personnages « haut-placés » qui veulent faire peuple. (Voir G.Place, La grève générale révolutionnaire de 1932, Cercle d'Histoire H.Guillemin, La Louvière, 1994, p. 63)

p. 283 Après « M. Tout-le-Monde » vous remettez le couvert avec « l'homme de la rue » auquel Albert porte de l'intérêt (!). Ce qu'il fait passer avant tout et pas seulement dans « les moments décisifs » c'est l'intérêt (!) de sa couronne et de la situation du pays. Les rapports étroits P. de Launoit-Albert Ier-Kreuger et Toll, Union Allumetière belge montrent l'intérêt (!) qu'Albert porte à « l'homme de la rue »! (Les plus belles années d'une génération, W. De Bock, E.P.O., p.109).

p. 285 « En juin 1932, grève dans le Limbourg. » Mais où avez-vous été chercher ça ? Il y eut quelques grèves partielles dans le Limbourg, mais dès avril 1932 jusque septembre, la grève générale s'étend dans toute la Wallonie. C'est une des plus grandes grèves du mouvement ouvrier. L'armée investit le Borinage en autos blindées. Le Hainaut est en état de siège. Le Roi Albert était actionnaire d'une mine à Marchienne ! (La grève générale révolutionnaire de 1932. G.Place Mineurs en Lutte Cercle d'Histoire H.Guillemin- et G.Vereeken, Juillet 1932, Fondation J.Jacqmotte 1989).

p. 286 Henri de Man n'était pas seul ! Le PLAN du travail est élaboré par le Bureau d'Etudes Sociales du Parti Socialiste. Et comme les trois mousquetaires, ils étaient quatre particulièrement actifs : Jef Rens, Max Buset, Paul-Henri Spaak et Henri de Man. «Rien que le PLAN, tout le PLAN » resta en PLAN ! Dès l'entrée des socialistes en mars 1935 dans le gouvernement Van Zeeland. Le gouvernement choisit dans le PLAN les mesures qui lui convenaient à l'exception de la plus importante à savoir la nationalisation du crédit et le contrôle sur les holdings (L'exécution du plan du travail, éd de Sikkel, Anvers, 1935).

p. 292 Si effectivement l'U.T.M.I. compte des représentants des syndicats chrétiens, socialistes et libéraux, il est important de signaler que les quatre circonscriptions provinciales wallonnes des syndicats chrétiens ont refusé leur participation à l'U.T.M.I. (A.Dantoing La collaboration du Cardinal, Ed. De Boeck, 1991 p.194 et 198). Cette décision est due à Henri Pauwels. La majorité flamande s'en retira en août 1941 et H. de Man en novembre 1941. Sur le rôle de de Man lors de la fondation de l'U.T.M.I. il faut lire : M. Brelaz Le dossier Léopold III, Ed. des Antipodes,, op. cit., p.338 à 349. 1988 H. de Man se retira de la vie politique en Haute-Savoie volontairement et non «contraint et forcé ».

p. 292 Il n'y a pas que le comte Lippens qui travaille à un corporatisme socio-économique inspiré du modèle nazi, Léopold III lui-même se renseigne auprès de Goebbels : « Il a maintenant grand plaisir à étudier le national-socialisme. Je lui offre des livres sur le sujet. » Goebbels J. Die Tagebücher, série 1, vol. 9, E. Fröhlich, p. 282 2001.

p. 294 C'est exactement l'inverse qui s'est passé. Léopold réunit « Quelques personnalités du monde des affaires, du patronat, du monde ouvrier » (Pour l'Histoire, Léopold III, 2001 p.77) pour savoir s'il convient de faire un éclat, protester publiquement contre le travail obligatoire, les déportations et l'approvisionnement insuffisant. Tous pratiquant de la politique du « moindre mal » c'est-à-dire, s'adapter à l'occupation, déclarent que « Des manifestations politiques ne pouvaient qu'être vaines. » (Pour L'Histoire, Léopold III, p.78) «Votre simple présence même silencieuse est trop nécessaire pour maintenir l'unité du pays. » (p.78) Surtout pas de vagues, le silence royal est le bien le plus précieux pour nos affaires ! Les affamés, les déportés et les travailleurs forcés apprécieront ! Léopold n'a jamais permis que l'on fasse connaître ses protestations puisqu'ils n'y en avaient pas. C'est une lettre personnelle de Léopold à Hitler qui mit celui-ci en colère.

p. 297 L'outil industriel wallon est sorti presque indemne de la guerre et les industriels l'ont usé jusqu'à la corde. Les bénéfices avant tout et les investissements attendront. La Wallonie a été victime de la rapacité des industriels et Baudouin a laissé faire en tant qu'actionnaire de la Société générale (voir p.304 « important porte-feuille ») sa grande conscience sociale n'a jamais été perçue par le monde ouvrier. Il a signé toutes les lois de récessions sociales sans problème de conscience comme pour l'I.V.G. Loi unique, pouvoirs spéciaux, blocage de l'index et des salaires, etc.

p. 300 La Fondation Roi Baudouin visant « à améliorer les conditions de vie de la population belge » est une supercherie limitée à quelques projets partiels qu'une élite choisit suivant ses convenances. Pour améliorer les conditions de la vie de la population belge, il faut des lois et des décisions économiques qui favorisent le progrès social, l'enseignement et l'entreprise publique. Tout ce qui n'a pas été fait durant le règne de Baudouin.

p. 303 « Il (Baudouin) entretient de très bons contacts avec les mondes industriel et financier. » Il vaudrait mieux écrire qu'il entretient de TROP bons contacts avec le monde industriel et financier !

p. 306 Il y a eu ni négligence, ni erreurs de la justice et de la gendarmerie dans l'affaire Dutroux qui était un indicateur de Police. Dutroux avait un casier judiciaire aussi chargé qu'un chargeur de mitraillette. Dans un cas comme le sien, lorsqu'il y a des bavures, dans le langage de la magistrature «on ferme les portes », c'est-à-dire que l'enquête jusqu'au niveau le plus haut est fermement (!) et adroitement orientée dans des impasses. Cela commence par le dessaisissement d'un juge d'instruction qui n'est pas dans la ligne pour donner à un autre qui marche dans les clous. Le procès, s'il n'y a pas « suicide » en prison, ne sera qu'une parodie de justice où les effets de manches prendront tellement de place qu'elles occulteront complètement les assassinats des enfants. (Voir Françoise van de Morteel, Intimes convictions, EVO, Bruxelles, 1999).

p. 308 Concernant la fortune royale et les milliards de Baudouin en Amérique. Albert et Fabiola peuvent déclarer n'importe quoi et ils ne s'en privent pas. Cela reste n'importe quoi tant que tous les livres ne sont pas ouverts et publiés. Une indication importante est donnée par Léopold II, voir p. 338, déjà des dizaines de millions de francs or (10 milliards actuels), au siècle passé, sous le règne d'Albert Ier, Léopold III et Baudouin, l'accumulation du Capital a augmenté, alors, les 500 millions d'Albert, c'est de l'argent de poche et les milliards démentis par Fabiola, c'est vrai, car il faut les multiplier, mais on ne sait pas par combien ! « Ils (Fabiola et Baudouin) se servent de la Donation Royale instituée par Léopold II. Chaque année, rien qu'en intérêts, elles se gonfle de centaines de millions. Le capital s'élève aujourd'hui à des milliards. » (Le Prince Charles m'a dit, L.-G.Bricmont-Barre, p. 941).

p. 309 Le 5 mars, Albert II exprime sa vive inquiétude au sujet des fermetures d'entreprises. Pourquoi pas ! Le 21 juillet, il plaide pour un abaissement du coût de la main-d'œuvre, une plus grande flexibilité à l'intérieur des entreprises et une redistribution du travail. C'est exactement la politique du patronat qui produit des fermetures d'entreprises ! Hypocrisie, inconscience, démagogie? Vous n'y êtes pas. On joue sur les deux tableaux et tant que ça marche, on reste en place.

p. 310 Affaire Fortis-Général de Banque-Lippens-Jansen. Le Roi appelle Jansen à Pâques 1998, p.309. La cour renforce ses pressions, p.310. Juin : Fortis gagne. « C'est un cadeau d'anniversaire pour le Roi. », p. 310. De Haene, Premier Ministre, déclare : « Le Roi n'a joué aucun rôle politique dans cette affaire. » p. 310. Et quand le Roi joue un rôle dans une affaire, comment fait-il ???

p. 311 Lippens et Davignon se présentent pour... changer « les meubles » et pas pour les sauver! Les meubles, c'est qui ? Le 15 février 2002, la DAT prend le nom de SN Brussels Airlines... et combien d'emplois perdus ? « Il est clair que le Palais les soutient dans cette démarche... Dans son message de Noël, le Roi Albert leur adresse ses encouragements. » Avec la SABENA, vous y seriez déjà... au chômage ! Vive le Roi ! tous pouvoirs confondus 2003 (Voir G.Geuens, Tous pouvors confondus, EPO, Bruxelles, 2003, p.240).

p. 317 « Un négociant juif de nationalité française. » C'est drôle que vous n'écrivez pas : le commandant Van Haverbeke... catholique négocie pour Léopold Ier ... protestant ! A l'époque, l'État juif d'Israël n'existait pas, pourquoi alors cette spécification de juif, de plus, ce négociant devait avoir un nom, pourquoi ne pas le citer par son patronyme ?

p. 319 « L'idée de déporter les criminels et de leur faire exécuter des travaux forcés est assez largement répandue. » Largement ? Pas tant que ça, uniquement par la minorité au pouvoir. De plus, on ne déportait pas que les criminels, on a condamné au bagne des voleurs de poules, des communards, des politiques, etc. Et... le capitaine Dreyfus ! Le bagne ne fut jamais un moyen de lutter contre le chômage et la pauvreté. La preuve en est que ces deux fléaux n'ont jamais diminué durant toute l'existence des Bagnes rétablis par Napoléon et supprimés en 1942 en France.

p. 325 « La colonisation du Congo est une page noire ( !) de l'histoire de la dynastie belge » surtout pour... les NOIRS ! « Fait régner l'ordre et la sécurité » !!! Travail forcé, mutilations, déportations pour le cuivre, l'or et le caoutchouc rendant le pays plus exploité et non prospère comme vous le reprenez. On estime à 10 millions le nombre d'Africains qui périrent. Le livre d'Adam Hochschild dont vous citez la référence en néerlandais (p.365) a paru en français en 1998 sous le titre - Les Fantômes du Roi Léopold - Un holocauste oublié. Ed. Belfond. Jules Marchal, fonctionnaire territorial au Congo belge (1948-1960), conseiller technique au Congo-Zaïre (1960-67), diplomate (1968-89) a écrit: L'Histoire du Congo 1876-1900, 2 volumes et L'Histoire du Congo 1910-1945, 3 tomes 1996. Lectures très utiles !

p. 325 Les hôpitaux, les ponts, les écoles et les routes construits par ... les noirs, dont les colonisateurs se félicitent font pâles figures, c'est le cas de le dire, face à l'exploitation forcenée et gigantesque des habitants et des ressources du Congo. A partir de l'histoire réelle de la colonisation, il faut bannir à tout jamais les deux mots : « ŒUVRES CIVILISATRICES ».

p. 340 « Sa politique congolaise repose avant tout sur l'exploitation à outrance » c'est le principal. Qu'à la fin du dernier quart du XIXème, cette attitude soit monnaie courante ( !), elle est avant tout... trébuchante. Moralité : il faut faire trébucher les idées courantes et rendre la monnaie de sa pièce à ceux qui les rendent ...sonnantes !

p. 353 Cela m'étonnerait beaucoup que l'uranium du Congo soit vendu au prix coûtant. De mai à septembre 1944, le gouvernement belge à Londres et Sengier, administrateur-délégué de l'Union Minière du Haut Katanga à New-York entretenaient une correspondance très importante sur la fourniture et le prix de l'uranium à fournir aux américains. Dans une des lettres de Sengier à Gutt, ministre des Finances, il y est question « de bénéfices ou à des avantages de nature quelconque. » (Documents diplomatiques belges 1941-1960, Académie Royale de Belgique, 1998 p.158, Tome I).

p. 354 Si la visite du Régent au Congo est contestée par certains Léopoldistes, pour Charles, ce fut un pénible périple : « Monseigneur n'a pas aimé l'Afrique profonde avec ses bruits, ses cris et ses moiteurs. Il avait une peur bleue d'être contaminé. Aussi, pour signer des registres appelés les livres d'or, il ne s'était jamais départi de ses gants. Il craignait les serpents, les araignées, les bestioles exotiques. » (L.-G. Bricmont-Barre Le Prince Charles m'a dit, , op. cit. p.140 1993.). Au sujet de la Régence du Prince Charles, à la différence de Léopold III qui, la plupart du temps s'opposait à ses ministres, Charles n'eut aucune difficulté avec eux : « Lorsqu'il s'agissait de décider d'une chose importante, j'en discutais d'abord avec Spaak qui savait tout et aussi avec Van Acker, qui était plein de bon sens. J'avais ma propre opinion mais j'en parlais et je téléphonais à de Staercke, mon chef de cabinet pour en débattre. Quand j'avais décidé qu'il fallait orienter les choses suivant une façon de voir, j'invitais mes ministres avec leurs bobonnes (sic) à Ciergnon : une fois qu'ils étaient au château, tout marchait comme sur des roulettes. » (, L.-G. Bricmont-Barre Le Prince Charles m'a dit, p.133, 134). Léopold aurait dû prendre exemple sur son frère !

p. 361 Baudouin ne menait pas une politique parallèle à celle du gouvernement. Le 22 juillet 1960, Gaston Eyskens, Premier Ministre, envoie son chef de cabinet-adjoint, le comte Harold d'Aspremont Lynden à Elisabethville pour y prendre la tête de la mission technique belge auprès des autorités du Katanga indépendant. (J. Van Bilsen, Congo 1945-1965, Ed. Crisp, 1994 p. 276).

p. 378 La lettre de Destrée contient un certain mépris de la langue flamande. L'arrogance anti-flamande des francophones et des fransquillons de Flandre est une forme de racisme dont on peut trouver l'écho dans d'autres écrits de Destrée : la critique du métissage lorsqu'il parle des Bruxellois (encore qu' il vise surtout la médiocrité des fonctionnaires) et d'un certain antisémitisme qui va jusqu'à refuser de signer la lettre de protestation des intellectuels contre le procès fait à Zola dans l'affaire Dreyfus. Après, Jules Destrée changea du tout au tout. Sur cette controverse Jean-Philippe Schreiber : Jules Destrée, entre Séparatisme et Nationalisme in Anne MORELLI dir., Les Grands mythes de l'Histoire de Belgique, de Flandre et de Wallonie, Bruxelles, Vie ouvrière, 1995,pp; 243-254. Philippe DESTATTE, dans Jules Destrée, l'antisémitisme et la Belgique. Lettre ouverte à tous ceux qui colportent des mythes éculés sur les Wallons et leur histoire, Institut Jules Destrée, Charleroi, 1995 a bien montré que Jules destrée avait renié cet antismétimse desa jeunesse qui d'ailleurs ne pouvait avoir le même sens à l'époque qu'ajourd'hui.

p. 385 Borms n'a pas été « fait prisonnier ». Il a été arrêté le 8 février 1919. Son procès se déroule en septembre 1919. Il est condamné à mort mais sa peine est commuée en détention à perpétuité. En 1928 , il n'est pas condamné à mort une deuxième fois (il le sera en 1945), il est élu à la Chambre par une écrasante majorité de 80.000 voix, lors d'une élection partielle à Anvers alors que la chambre débat d'une première loi d'amnistie. La chambre invalide son élection mais suite au vote par le Parlement de la loi d'amnistie, Borms est libéré en janvier 1929. Il sera exécuté en 1946, à 68 ans, suite à sa collaboration pendant la seconde guerre mondiale. Il est le symbole sublimé du nationalisme flamand (Nouvelle Biographie Nationale, 2001 tome VI, p.44-45).

p. 389 En 1937, Léopold III refuse aux anciens combattants le référendum qu'ils demandent parce qu'il n'est pas prévu par le système constitutionnel belge. Fort bien ! Mais en 1950, il fait voter par le Parlement un sous-produit : la Consultation Populaire. Il s'agissait de garder ou non sa place et pour ce faire tout est permis ! De plus, ce ne fut ni une consultation puisqu'elle fut interprétée comme un plébiscite, ni populaire puisque le peuple refusa le résultat. 2/7/37 Communication de Léopold aux délégués des anciens combattants in R.Capelle Au service du roi Dessart 1949, p 242).

p. 390 S'il y a des francophones rendus furieux par le mariage du Roi, ce n'est pas pour les mêmes raisons que les Wallons. Les francophones, dont le nombre est principalement composé d'aristocrates et de bourgeois, réagissent les premiers en trouvant que, par son mariage avec une bourgeoise, Léopold a trahi sa classe et les seconds sont jaloux parce que Léopold n'a pas épousé leur fille. Les prisonniers wallons sont les seuls à réagir sainement: Léopold n'a pas respecté son serment de mai 1940 : « Quoiqu'il arrive, mon sort sera le vôtre


  1. *. M. Vandenwÿngaert, L. Beullens, D. Brants, éd. L. Pire, 2002