Etats-Généraux de Wallonie et Livre Blanc du MMW: en guise de préfaces et réflexion (nouvelle édition)

6 May, 2009

Edition du 10 mai

On peut lire ici la motion finale des Etats-Généraux Motion finale des Etats Généraux qui comporte à notre sens des erreurs. Il nous semble inexact de dire que ce serait le fédéralisme qui aurait fait de la Flandre une région riche. Les compétences dévolues aux Régions dans l'Etat belge ont été fort restreintes jusqu'au milieu des années 1990. La Flandre a dépassé la Wallonie en termes de PIB/habitant dans les années 60. Donc bien longtemps avant l'instauration du fédéralisme, ce fédéralisme voulu par la Flandre pour sauver sa culture et sa langue qui restent menacées et qui ont reculé à Bruxelles, une ville de plus en plus francophone. Mais la Flandre dirait-elle que ce fédéralisme qu'elle a voulu sur le plan culturel "est un échec"? Non. Et à notre sens, elle aurait raison. Son combat se justifie sur ce plan. Nier cela, c'est avoir une conception nationaliste au sens le plus péjoratif du mot (certes les EG ne le font pas).

Et cela prouve que les Flamands sont plus persévérants, une qualité dont devraient faire preuve plus de Wallons...

C'est seulement à partir de la moitié des années 1990 que le fédéralisme est devenu une réalité en Belgique. L'idée selon laquelle la Wallonie vit aux crochets de la Flandre date de 1979. Elle n'est plus si souvent mise en avant aujourd'hui. Plusieurs articles de cette Une le soulignent.

On ne peut pas établir un bilan crédible dans le domaine économique en quelques lignes, mais au moins rectifier un peu l'idée d'un échec dans ce domaine: la Wallonie a progressé à certains égards depuis la moitié des années 90 (exportations, investissements étrangers, diminution du chômage notamment).

Il y a également une erreur politique dans la motion adoptée. Elle ne dit rien de la capacité actuelle de la Wallonie d'agir comme l'Etat qu'elle est effectivement devenue, ayant même la capacité d'exercer ses pouvoirs sur la scène internationale, un Etat aujourd'hui doté de la moitié des compétences étatiques (avec la Communauté Wallonie-Bruxelles), exercées autrefois par l'Etat unitaire. Elle ne dit rien non plus du fait que les grandes forces sociales organisées (le patronat, les deux grands syndicats de travailleurs, le syndicalisme agricole et les organisations qui regroupent les PME), s'associent, dans le cadre de leur travail qui est celui de la société civile autonome par rapport à l'Etat, à l'action du Gouvernement wallon. Serait-ce le cas si le fédéralisme était un échec?

On ne mesure pas le bien-fondé d'un Etat, d'une nation à ses seules performances économiques. On peut noter que depuis la réforme de l'Etat (l'Etat étant toujours créateur de société, même si la société crée également l'Etat), la Wallonie s'est également imposée clairement au moins dans un domaine culturel: le cinéma. Il y a en effet aujourd'hui, de manière peu contestable, un cinéma wallon et même l'ébauche d'une structure économique venant à l'appui de son effort créatif (Wallimages). On ajoutera à cela que dans un domaine comme l'historiographie - ceci aussi dans l'autonomie de la société civile - les Wallons ont commencé à véritablement écrire leur histoire. L'Encyclopédie du mouvement wallon est la seule Encyclopédie historique d'un mouvement politique ou idéologique propre à la Wallonie et Bruxelles. Il faut rappeler que si plus d'une centaine de thèmes y sont traités longuement, plus de 6.000 militants y trouvent leur biographie, parfois en quelques mots, parfois sur plusieurs pages. L'effort est d'autant plus impressionnant (près de 1800 pages en format encyclopédie et dont une suite va encore être écrite), qu'il s'agit sans aucun doute d'une des écritures historiques belges les plus mal financées de toute l'histoire. Citons encore - exemple parmi combien d'autres? - la réussite de la reconversion du Grand Hornu en un Musée des arts contemporains qui reçoit 80.000 visiteurs par an... Voyez enfin un aperçu un peu plus long de cette question de la culture wallonne : La culture wallonne depuis vingt ans...

122 votants?

Si l'on en croit certaines sources: Le choix de la France

Edition du 6 mai

[La manipulation rattachiste est-elle bien réelle?]

Si l'on en croit le blog d'Alex Remacle, les travaux en commission le matin, pour ce qui concerne l'option "Fédération Wallonie-Bruxelles" (sur laquelle un vote devrait intervenir l'après-midi en même temps que sur la Wallonie indépendante ou la Réunion à la France), sera défendue par Joseph Dôme, un candidat du parti Rassemblement Wallonie-France. On pourrait donc craindre que cette option sera mal défendue? D'autant plus que l'un des animateurs de la Commission, Alex Remacle, a décidé de ne pas se rendre à Liège le 9 mai? Le Professeur Bernard Remiche qui était annoncé est également excusé en raison de sa présence à l'étranger. Il avait été question aussi de José-Alain Fralon qui s'abstiendra de paraître. On est quand même un peu perplexe devant cette appellation d' Etats Généraux. Surtout peut-être en raison du succès médiatique que va à coup sûr connaître cette réunion. En effet, on peut vraiment se poser la question de savoir si les personnes présentes seront réellement représentatives de la Wallonie et même du mouvement wallon. Nous avons appris de source sûre que le président du mouvement Wallonie Libre par exemple, en la personne de son président Jacques Dupont, s'opposerait à la manière dont cette réunion se déroule. Que le Mouvement du manifeste wallon (qui présentera bientôt un livre blanc qui sera publié sur ce site), a décidé de ne pas assister comme tel à la journée. Il n'a pas été invité en tant que tel à participer à la démarche et l'ordre du jour des Etats-Généraux était fixé d'avance. On a pu lire aussi dans Le Soir du 27 avril qu'il s'agissait d'une réunion manipulée par les rattachistes, accusation relayée par Claude Dejaie qui, hier, 5 mai, lors d'un contact, confirmait ces accusations.

Nous avons reçu aussi un appel public de Jules Gheude qui insistait pour que le plus grand nombre de Wallons soient présents, la Belgique, selon Jules Gheude, pouvant imploser à l'automne. Certes, tout est toujours possible. Mais le champ des possibles est lui-même comme la suite des nombres : infini. Et, quelque part, la répétition des annonces de la fin de la Belgique depuis que François Perin l'avait annoncée en 1980, au moment où s'entamait la construction de l'autonomie de la Wallonie, donne également le vertige.

Le monde associatif (syndicats ouvriers et employés, classes moyennes, grand patronat, agriculteurs), sera-t-il présent à Liège? Ou simplement représenté? Comme il l'a été dans les Etats-Généraux de Bruxelles? Ou à la réunion du MMW du 29 février de l'an passé? Probablement même pas représenté. A ce propos, précisément, quels sont les régionalistes bruxellois qui seront présents à Liège ce 9 mai comme ils l'étaient à Namur le 29 février 2008? Il est clair que les travaux préparatoires aux Etats Généraux sont substantiels. Mais on aurait sans doute plutôt aimé une confrontation préparatoire à la réunion entre experts dans le domaine économique, politique et culturel. Dans le domaine économique, les constats du rapport sont discutables. Il y a une contradiction, sur le p^lan institutionnel et politique, à vouloir augmenter l'autonomie de la Wallonie en France dans un Etat français indivisible qui se réserverait la politique étrangère, alors que la Wallonie a présentement des compétences dans ce domaine. Dans ces conditions, quel pourrait bien être le sens du vote final qui interviendra? Avec combien de participants? En 1945, les membres du Congrès national wallon étaient près de 1500 et le Congrès avaient dû refuser la venue de certaines personnes. De très très nombreux parlementaires, plusieurs ministres, de nombreux syndicalistes étaient présents. Sur la question de la culture wallonne, il nous semble impossible de considérer, comme semble le faire le rapport, que François Perin aurait le dernier mot dans le domaine. Cette question de la culture wallonne, en outre, ne se tranche pas dans une assemblée politique, ni dans un rapport où peu de personnalités de la culture ont été sollicitées et aucun des signataires des manifestes wallons (sauf Jean Pirotte).

Ce que l'on peut craindre par-dessus tout, étant donné que les Etats Généraux seront fortement médiatisés, c'est que, en définitive,la cause wallonne ne sorte pas grandie de la rencontre. Nous connaissons certains journalistes qui vont là-bas écouter et filmer pour s'en payer une tranche et rigoler. Marx a dit que l'histoire se répète toujours deux fois: une première fois comme tragédie, une seconde comme comédie. Nous sommes trop solidaires de tous ceux qui veulent une Wallonie libre pour nous en réjouir.

Nous ne voudrions pas que le mouvement wallon, dans toutes ses composantes, sorte de toute cette affaire diminué. Le mouvement wallon est divisé. Ces divisions sont probablement difficiles à surmonter. Elles étaient moins visibles en 1945 alors que la Wallonie n'était rien. Ici elle est un quasi-Etat exerçant d'ores et déjà la moitié des compétences autrefois belges (avec la Communauté Wallonie-Bruxelles). Certes, il s'agit ici d'une initiative citoyenne, mais enfin le Gouvernement wallon n'est pas celui d'un Etat totalitaire et une grande majorité de Wallons ne conteste nullement sa légitimité. Comment ne pas tenir compte de l'existence de l'Etat wallon, de son Parlement, de son Conseil économique et social, des forces politiques, sociales, patronales qui y sont représentées et qui sont enracinées dans la société wallonne?

Edition du 2 mai

Nous avons tenu à mettre nos lecteurs en possession de documents et dossiers de nature à préparer les Etats-Généraux de Wallonie qui se dérouleront à Liège le 9 mai prochain et qui coïncideront avec la mise en ligne du Livre Blanc du MMW, déjà paru en septembre 2008 et dont nous pourrons lire ici une deuxième édition, notablement augmentée.

Dans cette deuxième édition à paraître du Livre Blanc, les questions de la gouvernance, de la culture, des langues endogènes, du territoire wallon, notamment, ont été réabordées en profondeur. Comme cela a été proposé, la revue TOUDI publiera, ici même, ce travail collectif et indépendant d'experts, intellectuels, artistes, écrivains, politiques et syndicalistes.

Les Etats-Généraux se profilant en quelque mesure dans l'ombre du Congrès national wallon d'octobre 1945, nous avons tenu ici à reproduire les extraits (choisis par Jean Louvet et qui en respectent la dramaturgie) des Discours de Dehousse et de Plisnier au Congrès national wallon de 1945. Ce sont des textes relativement faciles à lire et qui, en un certain sens, n'ont pas vieilli. Mais difficiles à trouver. Assez injustement, on a surtout retenu du Congrès de 1945 le discours de l'écrivain Plisnier alors que le Professeur Dehousse y fut le plus vivement applaudi et que sa proposition ne cesse d'être réalisée au jour le jour. Et qu'il est un morceau d'éloquence comme en trouve peu en Wallonie. Ce sont aussi des textes peu disponibles. Si nous en donnons seulement des extraits (mais très fidèles à la logique de ces textes), c'est avec l'arrière-pensée de les éditer en version complète.

Les solutions de 1945 sont toujours défendues aujourd'hui, notamment par Paul-Henry Gendebien dans Pourquoi le réunionnisme devient le courant dominant du mouvement wallon aujourd'hui., texte d'il y a quelques années, mais qui n'a pas vieilli, de Francis Bismans dans Pour un modèle confédéral. La situation actuelle de la Wallonie est bien celle (d'un point de vue juridique et institutionnel), analysée par Dehousse et Charles-Etienne Lagasse dans Conversation avec Jean-Maurice Dehousse et Charles-Étienne Lagasse [les institutions de l'Etat belge], conversation d'il y a quelques années.

Les questions de l'identité wallonne sont évidemment bien présentes en cet état de la réflexion en Wallonie, de sorte que le travail de Jean-Marie Klinkenberg que TOUDI avait publié en 1988 demeure d'actualité: L'identité wallonne: hypothèques et faux papiers. Enfin, c'est avec son talent d'écrivain que Jean Louvet s'exprime dans Ce qui doit, nécessairement, s'écrire.

Hors de ce site, on lira avec profit, toujours sur la question de l'identité le travail d'un chercheur universitaire, Hubert Watelet, travaillant avec Luc Courtois de la Fondation wallonne:

Réflexions sur les projets de société du Québec et de la Wallonie du point de vue identitaire

[Dans un livre collectif paru en 2006 : Brigitte Caulier et Luc Courtois (directeurs), Québec-Wallonie, Dynamiques des espaces et expériences francophones, Presses de l'Université de Laval, 2006.]

De même qu'un avis plus récent opposant les démarches des Etats-Généraux et du Livre Blanc du MMW:
[Aller voir dans la rubrique "Chroniques de Vigile" après le 3 mai]
Cet écho qui vise surtout à informer pourra être complété dans les jours qui viennent. Mais on peut dire aussi qu'il existe pas mal de textes sur tout le site de la revue qui pourraient être désignés comme des lectures nécessaires dans ce cadre. Notamment sous l'onglet "Archives" en ce qui concerne la question de la nation en général, de la Wallonie, de la France, la Flandre, Bruxelles et l'Europe.