Résultats des négociations Wallonie/BXL/Flandre d'avance condamnés?

29 July, 2010
Parlant du résultat des élections de juin 2010, Pascal Fenaux et Donat Carlier écrivent dans La Revue Nouvelle de ce mois que « le PS est parvenu , tant sur les plans économiques qu'institutionnels, à capitaliser les angoisses d'une opinion francophone bien éloignée du volontarisme institutionnel qui l'avait animée de la fin des années soixante jusqu'au début des années nonante ». 1 Les deux auteurs ne sont pas unitaristes, mais on sent déjà que les belgicains condamnent d'avance le résultat des négociations institutionnelles, qu'elles réussissent ou qu'elles échouent.

Un volontarisme institutionnel ? Quand ?

Ce n'est pas mesquin de dire une nouvelle fois que cette opinion francophone n'existe pas. L'opinion bruxelloise n'est pas la même en ce qui concerne la Belgique et son avenir que l'opinion publique en Wallonie. Mais ne chicanons pas. Il semble plutôt qu'il serait bon de se poser la question de savoir si l'opinion "francophone" (en fait wallonne), était animée du fameux "volontarisme institutionnel" dont parlent nos deux auteurs.

La première réunion du Conseil régional wallon eut lieu le 15 octobre 1980 au Novotel à Wépion - une enceinte parlementaire de fortune. J'y étais. Le caractère quasiment dérisoire de cette réunion explique que je m'en souvienne comme si c'était hier. Et plutôt des mauvaises choses que des bonnes. Le chef de groupe PSC , par exemple, insista sur le fait que la Région wallonne n'était quand même dotée que d'un pouvoir très secondaire et que l'essentiel était ailleurs. Les parlementaires « wallons » de l'époque étaient simplement les parlementaires nationaux, transformés en conseillers régionaux à leurs heures perdues (ils ne seront élus directement qu'en 1995). Quand Alain van der Biest se prononça à la tribune de circonstance du Novotel en faveur d'un accroissement du nombre des ministres wallons, alors au nombre de trois ! 2, on entendit dans les rangs du groupe PSC, grogner le mot « fromage ». Les Conseillers régionaux PSC tiraient de toute façon la tête, ennuyés de se trouver là. Et Pierre Lefèvre du journal Le Soir me glissa à l'oreille que le PSC n' croyait pas.

Mais, en dépit de cela, il occupera le pouvoir (comme on dit à La Revue Nouvelle), sans aucun état d'âme (il croyait aux mandats procurés : je le dis parce que c'est poujadiste de parler comme cela et pour montrer que l'on pourrait peut-être s'abstenir dans les bonnes revues de relayer le poujadisme ordinaire, en attribuant la soif de pouvoir au seul PS).

A peine un an plus tard, on retourne aux élections et une coalition des libéraux et des PSC-CVP (ceux-ci occupent le pouvoir national depuis des temps immémoriaux), se met en place qui va bloquer toute avancée de l'autonomie wallonne jusqu'en 1988, au nom de la priorité à donner aux problèmes économiques et sociaux, de la dette publique de l'Etat etc. J'entends encore les sarcasmes de François Martou sur le budget wallon (dérisoire), durant ces années. Mais je me souviens aussi, avec Michel Quévit et son livre récent, que, durant cette décennie, le CVP déclara qu'il n'y aurait plus un franc flamand pour la sidérurgie wallonne (cela dès 1982). 3 Cette menace était prise au sérieux : « Philippe Maystadt (PSC), qui fut ministre à l'époque, avouait, il y a quelques mois dans un entretien à La Libre, que ce fut son plus mauvais souvenir politique : « Les Flamands nous tenaient à la gorge. C'était l'époque où Luc Van Den Brande (CVP) disait à la Chambre : "Plus un franc flamand pour la sidérurgie wallonne". Même Willy De Clercq, ministre des Finances (PVV, devenu Open VLD), d'ordinaire assez modéré, réclamait un impôt wallon pour financer la sidérurgie... " Singulière façon, pour une Flandre devenue prospère, de concevoir la solidarité face au déclin wallon ! » écrivait Le Soir tout récemment 4

C'est vrai. Et puisque j'en suis à évoquer encore un peu mes « souvenirs » (mais je l'espère de la manière la moins subjective qui soit ou, du moins, la plus partageable), je dirais que, dans ces années-là, il y avait de quoi désespérer de la Wallonie. Le sentiment que j'ai gardé de tout cela, c'est que nous n'en sortirions jamais. Robert Devleeshouwer, qui n'a jamais été très optimiste, en était profondément convaincu. Si j'ai évoqué, il y a quelques lignes, le livre de Quévit c'est à cause de ce sentiment que j'ai gardé longtemps, malgré tout (tout en luttant intensément contre lui), d'une pauvreté de la Wallonie acculée à la mendicité. Or, l'aveu de Maystadt est révélateur : la situation de la Wallonie, alors, n'était pas tellement celle d'une Région pauvre que celle d'une Région dominée. Ce n'est nullement parce que la sidérurgie était sans avenir ou un tonneau des Danaïdes que le CVP jetait son slogan peu solidaire. Mais on l'a cru ! 5 C'était le fait du Prince, voilà tout ! Car, dans le même temps où la sidérurgie wallonne se voyait couper les vivres de l'Etat national, selon les calculs de Quévit, 200 milliards « nationaux » de l'époque allaient quand même se déverser encore dans les charbonnages du Limbourg et cela durant la décennie de l'austérité. Ils fermèrent en 92, alors que la sidérurgie wallonne occupe encore aujourd'hui 9.000 travailleurs. 6 Or, au milieu des années 80, plus personne n'y croyait. Tel était l'état d'esprit des Wallons hier. Et aujourd'hui ?

Les Wallons ne peuvent que s'appauvrir d'une plus grande autonomie ?

Les deux éditorialistes de la RN écrivent que « jamais les partis francophones ne se sont trouvés dans une position plus difficile pour négocier une réforme de l'Etat qui ne soit pas synonyme d'appauvrissement de la Wallonie et de Bruxelles » (p.8).

Mais pourquoi dire cela ? Cette opinion a toujours existé, que ce soit aujourd'hui dans les années 90, 70, 80 ou 60. Personne n'a jamais dit que l'avenir de la Wallonie serait radieux si elle était autonome. Au contraire, le souvenir qui pèse sur toute la mémoire de la Wallonie, c'est quelque chose comme le grognement sceptique des élus PSC au Novotel à Namur, le 15 octobre 1980. Et l'angoisse de Maystadt. On peut d'ailleurs se demander si cette opinion de Pascal Fenaux ou Donat Carlier ne participe pas étrangement du même état d'esprit que celui qui était le mien en 1982. Ou de celui de Maystadt.

Mais ils confondent moyens trop limités, pauvreté objective, manque de perspectives (etc), et domination par la Flandre. Quand on est dominé (c'est-à-dire vaincu et englué dans un certain échec), on se donne tous les torts dont les autres vous accusent. Comme de profiter des transferts !

Alors qu'on peut montrer que les fameux transferts dont la Flandre parla tant (bien moins aujourd'hui), ne sont pas aussi importants, à supposer qu'ils soient même des transferts, ce dont on doit douter, car le mot fait songer à des dons quasiment unilatéraux, ce à quoi la Flandre ne nous a guère habitués. C'est ce qu'ont démontré en 2006 Giuseppe Pagano, Miguel Verbeke, Aurélien Accaputo 7. Le 31 janvier 2007, Yves Leterme, alors, président du Gouvernement flamand, insistait sur le fait que la Wallonie était le principal marché d'exportation des produits flamands, ce qui relativise quand même très fort la perspective d'appauvrissement à laquelle nous serions amenés, puisque cela condamnerait la Flandre à un appauvrissement proportionnel. Ceux qui se vantent dans la petite bourgeoisie de « faire vivre dix chômeurs » (par les cotisations sociales qu'ils payent car ils sont riches), participent de ce même esprit néolibéral qui imagine les individus et les entreprises libres comme des dieux (et les régions riches). Alors que les riches sont les premiers à bénéficier des subsides publics (les régions riches aussi). Rilke a dit un jour que les pauvres sont les gens les moins incommodants du monde. Ils ne coûtent rien et les logements sociaux, de Paris à Charleroi et de Chirac à Despi, génèrent aussi l'argent dont se servent petits et grands dirigeants politiques. Si les Wallons sont pauvres, c'est qu'ils profitent à la Flandre. Et qu'ils ne méritent aucun subside. Mais peut-être ne le sont-ils pas tant que cela. On sait que la balance commerciale wallonne est en boni de 9 milliards d'€, que le chômage diminue depuis le début de l'année, que le pays wallon attire à nouveau les investissements étrangers. Le Centrum voor Sociaal Beleid de l'université d'Anvers estime que, en moyenne, en 2050, les Wallons toucheront encore 24 € d'allocations sociales de plus par mois que les Flamands. Malgré le vieillissement de la population flamande. On verra à ce moment-là ! Mais c'est déjà une fameuse évolution et d'ici quarante ans... 8

« Avec plus d'autonomie, nous perdrons plus encore »

On peut rappeler ici que la Belgique est, de tous les pays européens, celui où les transferts (si le mot a un sens), sont les plus faibles. Une comparaison a d'ailleurs été faite en 2006 avec le Nord-Pas-de-Calais, une région qui dispose d'une métropole et de trois ports de mer importants. Les chercheurs qui ont travaillé à cette comparaison n'estiment pas que la Wallonie ferait moins bien, au contraire 9. On regrette d'ailleurs à ce point de vue que Serge Govaert ait encore pu écrire dans Le Monde Diplomatique de juin que la Wallonie vivait « sous perfusion». Voilà bien un journal qui, depuis toujours, s'est avéré incapable d'écrire la moindre ligne sur la Wallonie, stimulante intellectuellement. Ce journal français laisserait-il dire ou écrire que Lille vit sous perfusion?

Finalement, l'édito de La Revue Nouvelle ressemble à cette conduite de perdant. Ses deux auteurs écrivent : « Peut-être que le scénario d'une réussite des négociations [entre le PS et la NVA], n'est envisageable que si les réformes négociées sont suffisamment profondes pour être présentables par la NVA et que si, en cornaquant un approfondissement radical de la réforme de l'Etat, le PS, en tant que gestionnaire inamovible de la Région wallonne et de la Communauté française, peut en retirer des bénéfices. En d'autres termes, et au risque de céder à une certaine caricature , il n'est pas impossible qu'un compromis « belge » ou « néo-belge » puisse être formulé entre une force politique socialiste francophone d'occupation du pouvoir wallon (PS) et une force politique nationaliste « néo-flamande » de retrait du pouvoir belge (NVA)... » (p.8).

Les milieux chrétiens fantasment aussi depuis la grève renardiste de 1960 sur la volonté socialiste d' « occuper le pouvoir en Wallonie », ce qui est certainement juste, mais qui peut être dit de tous les partis. Et au moins le PS a-t-il eu le mérite (mais en étant cornaqué combien de fois par la juste colère de la rue ?), de faire la Wallonie. Mais ce n'est pas cela qui me semble le plus critiquable dans le texte de Fenaux et Carlier. Peut-être les auteurs ne s'en rendent-ils pas compte, mais, à force de supposer que l'accroissement de l'autonomie wallonne va appauvrir les Wallons (ou pourrait les appauvrir, mais cette supposition n'est pas loin de la certitude), et qu'il servira au PS à « occuper le pouvoir » de manière inamovible, ils justifient la timidité des partis francophones depuis dix ans qu'ils critiquent par ailleurs. Et ils déshonorent cette autonomie d'avance !Ils ressemblent aux PSC grognards du Novotel en 1980 qui sont parmi les rédacteurs de la Constitution belge dont Klinkenberg a mis en cause le vocabulaire qui vise justement à dégrader l'autonomie. 10

« Nous allons avoir plus d'autonomie mais nous risquons d'y perdre », ce n'est quand même pas un pari enthousiaste sur le futur. Comme la remarque du chef de groupe PSC au Novotel : nous sommes ici dans une enceinte secondaire. Il y a des engagements wallons étranges.

Et en plus l'autonomie, c'est la honte !

La Libre Belgique de ce 28 juillet rapportait les propos de Philippe Mettens, le président du comité directeur de Belspo qui incarne la politique scientifique fédérale. Il considérait évidemment que toute régionalisation de cette politique ne pourrait qu'être nuisible, en insistant (selon le sophisme habituel), sur le fait que l'universalité de la science n'avait que faire des divisions régionales. Ce qui ne veut strictement rien dire, l'universalité en question pouvant tout aussi bien se déployer dans un cadre unitaire que dans le cadre de Régions fortes et souveraines. Il n'y a pas de rapports entre ces choses. Le journal insistait sur la station polaire Princesse Elisabeth qui porte bien haut l'étendard de la pérennité belge. Mais à part le fait que la famille royale ne donnerait plus le nom de ses enfants à des stations polaires, que perdra-t-on vraiment si celles-ci se régionalisent ? Les Wallons ont-ils vraiment gagné durant les 50 ans d'unitarisme dominés par la Flandre de 1950 à quasiment l'an 2000 ? Ont-ils beaucoup gagné en s'arrachant à ce système délétère ? On peut raisonnablement le penser.

L'édito de La Revue Nouvelle de ce mois donne, malgré qu'il propose d'y être vigilant, l'irrésistible sentiment que les Wallons ne peuvent sortir qu'appauvris d'une réforme qui leur donnerait plus d'autonomie. Ce à quoi La Libre ajoute sa pincée d'amertume en soulignant que cette autonomie appauvrissante serait en sus, honteuse, car opposée à l'universalité de la Science. Pascal Fenaux et Donat Carlier, écrivent enfin, après avoir insisté sur le fait que la réforme de l'Etat pourrait être synonyme d'appauvrissement pour les francophones (?), que ce seul constat « ne rend que plus vitale une réforme des structures institutionnelles qui balisent l'espace sociopolitique francophone » en ajoutant que La Revue Nouvelle le souhaite depuis dix ans. Et c'est vrai que nous avons mené à TOUDI bien des discussions intéressantes sur ce thème avec cette revue.

Seulement, je trouve qu'il y a là beaucoup de mots et peu de convictions finalement, car, face à l'appauvrissement quasi inéluctable de la Wallonie (supposé plusieurs fois par les deux éditorialistes), que signifie encore la nécessité vitale (vitale !) d'une « réforme des structures institutionnelles qui balisent l'espace sociopolitique francophone » ? Pourquoi s'exprimer de cette façon un peu creuse sans vraiment dire ce que l'on veut ? Lors d'un colloque de la Fondation wallonne à Louvain-la-neuve, une inspectrice de français nous apprenait que dans l'enseignement, le passage au fédéralisme était le plus souvent présenté aux élèves comme un échec. Malheureusement, il faut bien avouer que tout est fait dans les médias (et même certaines bonnes revues), pour que les Wallons se dispensent de toute estime de soi collective et haïssent d'avance les institutions par lesquelles s'exprimera et s'exercera leur citoyenneté à l'avenir. Pascal Fenaux et Donat Carlier, tout en mettant en cause la timidité des partis francophones depuis dix ans en matière de réformes institutionnelles, participent du même état d'esprit qu'eux en soulignant que l'autonomie risque fort de faire perdre les Wallons. Et en oubliant parfois (même si la RN a une position claire et ouverte sur BHV), que, par électoralisme, certains sont prêts à continuer à bloquer la Belgique comme Joëlle Milquet qui, ce 28 juillet, demandait encore que le droit d'inscription (se domicilier à Bruxelles fictivement) soit étendu à tous les Francophones de BHV. 11

On se demande de quoi certains partis "francophones" ont réellement peur. D'un mauvais avenir pour la Wallonie ou de leurs résultats électoraux à Bruxelles ? Quand Javaux a dit que Milquet ne connaissait rien au monde chrétien, c'était une façon de dire que cette personne était coupée de ses racines wallonnes et chrétiennes. Parce que, en définitive, il y a pas mal de chrétiens qui ont fait beaucoup pour la Wallonie. Même à travers certains éditoriaux alambiqués, la RN en demeure le témoin. Mais aussi le témoin du fait que les Wallons ont peur. Et comme le disait l'autre, la seule chose dont nous devons avoir peur, c'est de la peur elle-même.


  1. 1. P.Fenaux et D.Carlier, Belgique : le grand chantier, p-3-8, p. 4, in La Revue Nouvelle, n° 7-8, juillet août 2010.Belgique: le grand chantier
  2. 2. Jean-Maurice Dehousse, Melchior Wathelet père et Elie Deworme voir Philippe Destatte, L'identité wallonne, IJD, Namur, 1980, pp. 347-348.
  3. 3. On lira dans le compte rendu de ce livre capital de Michel Quévit que, pourtant, dans le total des aides reçues alors par des entreprises belges, la Wallonie ne prenait qu'un peu plus de 23%. La sidérurgie wallonne encore moins : Critique : Flandre-Wallonie. Quelle solidarité ? Michel Quévit (Couleurs livres).
  4. 4. Le Soir du 22 juillet, pages « économie »
  5. 5. Il suffit de demander en Wallonie quels charbonnages ont coûté à l'Etat : tout le monde citera les charbonnages wallons, pas ceux du Limbourg qui ont coûté des centaines de milliards et ont survécu, sans être plus rentables, trente ans et plus aux charbonnages wallons.
  6. 6. Michel Capron, La sidérurgie wallonne entre craintes et espoirs, pp. 11-14 dans le même numéro de La Revue Nouvelle. On ne trouve guère ce genre d'analyses développées dans les revues de gauche publiées sur papier glacé... ce que n'est pas la RN, il faut le lui laisser.
  7. 7. La fausse réalité des transferts flamands [ un article de 2006 demeuré actuel]
  8. 8. Guy Tegenbos, Meer sociale uitkeringen naar Vlaanderen, in De Standaard, 27 juillet: ''De berekeningen tonen dat het aandeel van Vlaanderen in de sociale uitkeringen toeneemt, maar tot 2050 nog onder het Waals niveau blijft (2050: Vlaanderen 463 euro per maand per iwoner, Wallonië 487).''2010.
  9. 9. Comparaison Wallonie/Nord-Pas-de-Calais
  10. 10. Les positions du professeur liégeois sont bien résumées dans Wallonie, Etat fédéré, M. Rudy Demotte
  11. 11. De Standaard, 29 juillet 2010.

Comments

La presse flamande informe seule

Il faut lire la presse flamande pour être informé. L'opposition semble se situer entre ceux qui veulent aller vers plus d'autonomie et ceux qui ne veulent pas. Comme ces derniers sont supposés être les "francophones" (le terme par lequel on tente de nier qu'il y a aussi des Wallons en Belgique), si ces négociations échouent, ce sera évidemment un échec. Si elles réussissent, on dira aussi que c'est un échec aussi comme on l'a dit, même de la régionalisation de l'agriculture en 1999. L'autonomie de la Wallonie serait donc une "concession" faite aux Flamands...? La pire des choses qui puisse arriver à la Wallonie serait-il vraiment qu'elle soit libre? On peut estimer que les intérêts de Bruxelles doivent aussi être rencontrés, mais on lisait dans De Standaard hier que même pour la Justice les "francophones" ne voulaient pas aller trop loin. Quel est exactement l'intérêt de la Wallonie et de Bruxelles que la Justice soit encore seulement une matière fédérale? Et s'il y a une différence d'approche entre Wallons et Bruxellois, il faut le dire, car, après tout, nous ne savons pas si la position dite "bruxelloise" (défendue par Milquet par exemple), se soucie d'abord de la Ville et de sa vie ou avant tout des électeurs de la périphérie qui apportent un siège fédéral de plus au CDH. Il faut transférer les compétences aux Régions dit Demotte. Avec cela nous devons, nous Wallons, être d'accord et faire comprendre aux Flamands que c'est la simple justice.

Les Wallons et les Francophones ne comprennent pas

''On se demande si les francophones ont réellement compris les leçons du 13 juin" écrit Carl Devos, politologue à Gand, dans ''Le Soir'' du 31 juillet. Le sentiment que l'on peut avoir, c'est que Devos a raison dramatiquement: non, ils n'ont pas compris. Sauf quelques leaders de la FGTB wallonne, surtout à Liège, qui sont aussi isolés que ne l'était Renard en 50 et 60. Le fait même que Di Rupo soit obligé de dire que l'on doive aller vers la révolution copernicienne (les Etats fédérés deviennent centraux et l'Etat fédéral devient secondaire), à cause des Flamands indique le degré d'enthousiasme qui anime les ''Wallons'' qui négocient en dépit de certains politiques plus lucides comme Bernard Wesphael. La grande masse semble encore râler que les Flamands ne répondent pas en français sur les lieux de villégiature, elle ignore tout des réalités économiques (sauf qu'elle gobe l'histoire des transferts), elle ne voit dans les institutions wallonnes que, au mieux, une machine de guerre PS, au pire: rien. Il n'est pas étonnant dès lors que le succès du livre de Michel Quévit s'amplifie. Il est à peu près le seul à contrer toute la machine de guerre et de propagande flamande mais surtout belgicaine (et wallo-belgicaine), qui fait placer d'immenses drapeaux belges à la Une de tous les journaux francophones, au moindre prétexte. Ciné Télé Revue lance des enquêtes sur l'attachement à la Belgique qui, curieusement, rencontrent un succès immense. Les régionalistes wallons ont toujours été isolés. L'erreur de Fenaux et Carlier, c'est de croire qu'il y aurait eu des périodes différentes. Sauf, c'est vrai, en cas de grève générale. On peut douter fort qu'il y en ait une prochainement. Les Flamands ont incontestablement un leader qui, sans charisme excessif et, au contraire, intelligemment, poursuit l'émancipation de la Flandre et agit en fonction de cela. Les autres leaders wallons se croient toujours en Belgique et accepteront même peut-être de profondes réformes sans en tirer les conséquences sur la nature de l'esprit public qu'ils auraient à créer en adéquation avec une Belgique à ce point dégradée, non plus national belge, mais national wallon. Michel Gheude fait - si c'est possible - pire encore. Au lieu de se soucier de l'encéphalogramme plat de l'opinion wallonne, au lieu de soutenir Quévit, Wesphael, les régionalistes bruxellois, ils souhaitent pour les Wallons un refus de la liberté bien pire encore en souhaitant (via le rattachement à la France) que la Wallonie se dépouille de l'autonomie qu'elle a cependant conquise et dont l'exercice (entamé depuis trois décennies), permet à certains d'ouvrir quand même les yeux. L'échec récent de la manifestation belgicaine est plus qu'anecdotique. Voir Manifestations pour l'unité de la Belgique (1963-2010). C'est un vrai espoir. Et Milquet a perdu les élections en se raccrochant à un slogan belgicain, comme le PLP en 1968.