"Pour l'Histoire" (I)

Analyse du livre de Léopold III
Toudi mensuel n°42-43, décembre-janvier 2001-2002

Il est des livres surprenants, certains par leurs qualités, d'autres par leurs manques, parce qu'on en attendait beaucoup. Le livre de Léopold III fait partie de ces derniers. Comme son règne d'ailleurs qui se présentait beaucoup plus consistant qu'il ne l'a été.

Dès l'avant propos,

Léopold annonce la couleur. En effet, que lit-on? «La France désarme et la Politique du Front Populaire mène aux pires excès en l'affaiblissant dans tous les domaines.»(p. 8) C'est un peu simpliste pour une période qui était loin de l'être! Les «pires excès du Front Populaire» - mai 1936, juin 1937 - pour reprendre son expression, où sont-ils? D'un côté, augmentation des salaires, semaine des 40 heures, deux semaines de congés payés, nationalisation des chemins de fer, des industries de guerre; de l'autre: freinage des investissements, évasion des capitaux, hausse des prix, chômage. A vous de choisir où sont les «pires excès»? De l'exemple français, Léopold passe en Belgique où il constate que «Les partis politiques et les syndicats sont des organismes irresponsables.» (p. 8)

Écrire cela en 1983, n'est-ce-pas un tant soit peu irresponsable! Poursuivant sur sa lancée, p. 9 «Les hommes gouvernant le monde occidental sont incompétents et incapables de comprendre à temps le problème allemand.» On se croirait au Café du Commerce! Tous des incapables! Les hommes gouvernant le monde occidental, à l'époque, jouaient la carte allemande - Berlin contre Moscou - et Léopold en faisait partie! Le problème allemand pour ces hommes était secondaire. Tous défendaient la civilisation occidentale contre la barbarie rouge. Le problème allemand cité par Léopold n'arrive qu'en mai 1940. Poursuivant sa critique en Belgique, Léopold stigmatise les suites du suffrage universel en ces termes: «Au lieu de construire une saine démocratie (...) nos politiciens de l'époque aboutissent par démagogie à un nivellement par le bas et à un affaiblissement de l'autorité.» (p. 9 et 10). La saine démocratie pour Léopold ne s'apparenterait-elle pas à l'Ancien Régime? A lire ces lignes on peut se le demander? «La question linguistique amène les Flamands à vouloir dominer le pays entier et les Wallons développent un esprit séparatiste.» (p. 10) Pas de Bruxellois à l'horizon royal qui pose le problème de l'existence de la Belgique, mais il n'y répond que par une accusation. «Les gouvernants ne sont plus que des parlements en miniature, cette faiblesse des gouvernants conduit à la ruine de l'État.» (p. 10).

Ce qu'il faut souligner ici, c'est le mépris de Léopold pour le Parlement et l'outrance du langage en ce qui concerne l'État. A cause: «Des aspirations de plus en plus exigeantes de la liberté, de confort et d'argent, nous voyons se détruire progressivement notre société.» (p. 10) Si Pétain a déclaré à peu près la même chose en 1940 en France et le Cardinal Van Roey en Belgique, c'était dans «L'air du temps» du pouvoir! Que Léopold repasse ce plat en 1983, c'est que la cuisine idéologique royale était complètement faisandée!

Au chapitre III

Léopold s'explique sur le choix de la défense du territoire national échelon en profondeur, à partir d'une position solide, plutôt que sur la défense du territoire à partir de la frontière. Son choix était pour la position solide, tandis que celui du Ministre de la Défense Nationale A. Devèze était pour la défense de la frontière. «Slogan électoral irréalisable militairement» (p. 17) décrète Léopold. La position solide c'est une ligne de défense d'Anvers à Namur; la frontière c'est à partir du Canal Albert, les forts d'Eben-Emael et de Liège, la défense de la province du Luxembourg jusqu'à la ligne Maginot. Cette ligne de défense sous-entend que l'ennemi principal est l'Allemagne. Pour l'état-major, la forêt ardennaise est déclarée une fois pour toute: IMPRENABLE! Quelques Chasseurs Ardennais à vélo suffiront pour la défendre! On connaît la suite, hélas!

Le ministre ne se laisse pas faire et le chef d'Ètat-major Général est démissionné au grand dépit de Léopold qui impose la position solide.

Au chapitre IV

Léopold défend son discours du 14 octobre 1936 sur la neutralité, suite à la réoccupation par l'Allemagne de la rive gauche du Rhin le 7 mars 1936 en violation du traité de Locarno. Il oublie de signaler qu'un jour avant, le 6 mars 1936, il a changé les rapports d'Ètat-major avec la France. «Par consentement mutuel, fin de l'accord franco-belge du 7/9/20.» (p. 13). Les contacts d'Ètat-major sont maintenus sans engagement politique ou sans obligation quelconque quant à l'organisation de la Défense Nationale des parties intéressées. C'est-à-dire, chacun pour soi et les Allemands pour tous! C'est «La politique exclusivement et intégralement belge.» (p.195). Elle ne peut que favoriser l'Allemagne placée sous le même pied que la France et l'Angleterre en tant que belligérant potentiel! N'est-ce pas ahurissant.

Au chapitre V

Léopold attaque sur l'affaire Martens. Martens est ce médecin activiste flamand pendant la guerre de 1914, il fut amnistié en 1937. «Dont les titres scientifiques sont quelconques»(p. 22), affirme Léopold III. Il ajoute: «Martens était le médecin d'un certain nombre d'hommes politiques dont tous n'étaient même pas flamands et dont certains faisaient partie du gouvernement.»(p. 22) Qu'est-ce à dire, sinon que si Léopold voulait lancer la suspicion sur les hommes politiques, il n'agirait pas autrement. Ce n'est pas à son honneur!

On pourrait facilement lui renvoyer la balle, puisque, avant guerre, il allait régulièrement se faire soigner, non pas chez des médecins flamands, mais chez des médecins allemands et qu'il a continué à le faire pendant la guerre!... Alors! Il poursuit sur l'affaire Martens «Alors que la nomination de Martens n'avait pas été discutée au Conseil de Cabinet.» (p. 12). Ce qui est faux. En effet, le 25/10/38, le Ministre Merlot a présenté au Conseil des Ministres un arrêté royal instituant une Académie de Médecine composée de douze membres que le Conseil approuve (voir Spaak - M. Dumoulin éd. Racine p.127)

Les Flamands soutiennent la nomination de Martens, tandis que les Anciens Combattants et la Légion Nationale exigent sa démission. Agitation dans la rue, interpellation à la Chambre! Les Ministres libéraux posent un ultimatum: la démission de Martens. Ne l'obtenant pas, ils quittent le gouvernement et de nouvelles élections ont lieu.Le roi en fait une scène de ménage au Conseil des Ministres qui l'encaissent mal. Pour eux c'est une péripétie, pour Léopold, «Ce sont des errements politiques, les principes constitutionnels sont méconnus, la séparation des pouvoirs n'est plus respectée.» (p. 212)

Conséquence pour Léopold. Après les élections, au lieu du souple Spaak, il y aura le robuste Pierlot comme Premier Ministre et Léopold le désigne immédiatement, dès avril 1939: «Responsable du tragique malentendu de mai 1940.»(p. 43) Pourquoi cette hâte? A la fin de ce chapitre, pour bien montrer le degré de turpitude des politiciens(!), Léopold évoque une démarche d'un envoyé de Camille Huysmans, celui-ci «Se faisant fort d'obtenir la démission de Martens ... en échange d'avantages accordés aux Flamands! Je l'ai éconduit, indigné de tels procédés.» (p.24. Envoyé de C. Huysmans, nous, on veut bien, mais de là à y croire, c'est beaucoup nous demander.

Chapitre VI Grave Malentendu

Suite aux documents que deux officiers allemands avaient bien malgré eux «confiés» aux militaires belges à cause d'un atterrissage forcé à Mechelen-aan-de Maas, en janvier 1940, Léopold est à l'origine d'un grave «Malentendu» avant Wynendael! Ces documents donnaient l'essentiel d'un plan de guerre dirigé contre la Belgique, la Hollande et la France. Sans consulter ses Ministres, Léopold, par l'intermédiaire de son ami l'amiral Keyes, fait une demande au gouvernement anglais de garanties pour son pays en cas de guerre. Keyes en fait part à son gouvernement par des communications télégraphiques difficiles. Churchill transmet la demande aux Français et c'est le branle-bas de combat en Angleterre et en France. Les deux gouvernements ont interprété la demande de Léopold comme une invitation à débarquer en Belgique et les armées françaises et britanniques sont prêtes à y entrer. Il n'en est évidemment pas question puisque la Belgique est neutre. Spaak seul est appelé à réparer la casse et Léopold conclut: «Mes Ministres qui furent rapidement mis au courant de ma démarche m'accusèrent, de bonne foi, d'avoir outrepassé mes prérogatives constitutionnelles.» (p. 28). Spaak est volumineux, mais de là à contenir tous les Ministres, il y a une marge!

Quant à l' Amiral, Léopold règle son compte en l'envoyant au-dessus du bastingage: «Il s'était imprudemment avancé.» (p.27) Ministres pas informés et Amiral trop avancé, il n'y a pas de politique personnelle de Léopold. Rompez!

Chapitre VIII

(Traite de Commandement de l'armée par le roi.) «Le 10 mai 1940, à l'exemple de mon père, je quitte Bruxelles à l'aube pour prendre le commandement de l'armée.» (p. 37)

Or Albert, avant de prendre le commandement de l'armée en août 1914, est allé au Parlement y faire un discours patriotique. Léopold ne suit pas, comme il l'écrit, l'exemple de son père. Il justifie son absence: «Les moyens mis en œuvre par l'ennemi sont rapides et écrasants.» (p. 37) À l'aube du 10 mai comme il le spécifie, l'ennemi en question n'avait pas encore été rapide et n'avait pas non plus écrasé grand-chose! Sa «présence indispensable au Grand Quartier Général de Breendonck» (p. 37) ne l'avait pas empêche de prendre le thé l'après-midi midi à Laeken avec la Reine Élisabeth! (M. Brélaz, Le dossier Léopold III, éd. des antipodes, p.65). Le matin, il avait reçu Pierlot et Spaak qui lui ont demandé d'aller au Parlement (M.Dolhet, Le dénouement de la Question royale, Mémoire UCL, 20001, p.10). En guerre, Léopold se considère seul chef militaire et lorsque Pierlot lui fait remarquer le 23 mai 1940 que «Le gouvernement porte seul la responsabilité des actes du chef de l'État.» (p. 37) Léopold le renvoie en «temps de paix», c'est alors qu'il aurait fallu une étude du problème (p.37). C'est en voyant agir Léopold en temps de guerre que Pierlot lui fait cette remarque, comment pouvait-il prévoir «dans le calme de la paix, l'attitude de Léopold dans l'agitation de la guerre»? (Mais Pierlot aurait dû le prévoir vu le précédent d'Albert Ier).

Chapitre IX

Nous amène de Bruxelles à Wynendaele pendant la campagne des dix-huit jours, après une partie de cache-cache entre le roi et ses ministres!

D'emblée, Léopold affirme que le général Denis, ministre de la défense nationale était «Pour ainsi dire»(p. 38), journellement à son État-major et il ajoute: «Ainsi le gouvernement fut-il quotidiennement informé de l'évolution des opérations militaires. (p. 38) Le «Pour ainsi dire» vaut son pesant d'imprécision. En fait, le général Denis était quotidiennement avec les autres ministres et occasionnellement à l'État-major. Il était avant tout ministre et accessoirement général de l'armée en campagne. Léopold force un peu sur le képi en le mettant à une place où il n'est pas. «Je reçus en outre le Premier Ministre accompagné de certains de ses collègues à de nombreuses reprises et pour la première fois le 15 mai 1940 où, il vint avec Denis.» (p.38) Cela veut dire que du 10 au 15 mai le gouvernement ne fut pas informé quotidiennement par le roi. Le relais ne s'est pas fait entre le général Denis qui était journellement à l'état-major et le gouvernement qui était à Bruxelles. Le 16 mai, Léopold informe Pierlot, Spaak et Denis du repli de l'armée belge sur l'Escaut suite à la conférence de Casteau du 12 mai 1940, où le général français Billotte était accepté en tant que coordinateur des opérations sur le front belge. Cela signifie d'une part que Léopold n'est plus seul chef militaire ainsi qu'il l'a toujours affirmé et d'autre part que la ligne fortifiée, (la position solide de 1936), Anvers - Namur est abandonnée sans combat!

Échec donc sur toute la ligne. En effet, le 10 mai, la politique de neutralité est en faillite, le 12 mai la stratégie de l'État-major est en miettes! Les deux piliers de la politique de Léopold s'écroulent en deux jours!

Dans les jours qui suivent, Léopold doit choisir: ou suivre le gouvernement pour continuer le combat, ou rester avec l'armée pour capituler et être prisonnier. Pourquoi ne suit-il pas l'avis de ses ministres qui le pressent d'assurer la retraite de l'armée vers la France et de continuer la guerre en restant chef d'État et de l'armée?

Parce que, comme il l'écrit clairement: «Je ne voyais pas l'autorité dont en chef d'État, je pourrais disposer en France.»(p. 39) plutôt chef d'armée qui capitule, que chef d'État qui guerroie! Pour lui cette guerre qui était déjà européenne et s'annonçait mondiale, il la réduisait à un problème d'autorité personnelle dans un pays étranger! Quelle envergure!

En admettant, comme il l'affirme à ses ministres, qu'il était militairement impossible de faire passer l'armée belge en France, il n'en reste pas moins qu'à ce moment là, le corps expéditionnaire britannique commençait à rembarquer pour l'Angleterre. Des Français et des Belges embarquaient pour les îles Britanniques. Pourquoi pas l'armée belge? Léopold choisit de se couper des armées alliées et d'être acculé à la capitulation.

Choix défaitiste qui n'augmente pas son crédit auprès des Alliès.
S'il avait fait le choix inverse, il aurait triomphé ... cinq ans plus tard! Il triomphe dans la défaite, la majorité des Belges le sacralise, mais son triomphe actuel annonce sa défaite future!

Le Chapitre X.

C'est Wynendaele

Wynendaele, Wynendaele ... sombre château de cartes

Dans les circonstances de mai 1940, il fallait des épaules solides pour cumuler les fonctions de chef de l'État et de chef de l'armée. Ne se faisant épauler (!) que par des militaires qui vont de défaite en défaite, la notion de chef de l'État dans l'esprit de Léopold s'amenuise pendant que, paradoxalement, celle de chef de l'armée augmente, alors que celle-ci se liquéfie!

Les militaires, et à leur tête, Léopold, identifiaient en plus l'armée à l'État. l'armée devenait sa seule préoccupation - pré...occupation! Si l'armée est battue, l'État l'est tout autant et le chef de l'État est prisonnier du chef de l'armée avant de l'être par l'ennemi.

Dans ces conditions, Wynendaele ne pouvait qu'être une séparation et non un «MALENTENDU», entre un gouvernement qui veut que l'État reste une arme, même si le roi met bas les armes! La décision de rester dans le pays consistait à maintenir son trône plus qu' «À servir mieux son pays» (p. 42). En fin de compte, son choix le desservira complètement auprès des alliés, auprès du gouvernement et auprès de son peuple.

Chapitre XI

C'est l'affaire du Blanc-Seing. Resté seul, avec son entourage, sans ministres, il reconnaît pour une fois s'être trompé: «Ma grande erreur fut de ne pas avoir exigé qu'au moins un ministre restât à mes côtés.» (p. 43) Erreur qui n'en est pas une puisque, même s'il l'avait exigé, aucun Ministre ne serait resté à ses côtés. Il voulait la démission du gouvernement tout entier.

Léopold se soucie enfin de «gérer les affaires de l'État» (p. 44). Mal conseillÉ ... ce n'est pas la première fois, ni la dernière fois, par les plus «éminents juristes du royaume». Ceux-ci décident de la nécessité d'un contreseing d'un ministre en exercice pour établir «Des contacts avec l'ennemi en vue d'une reddition» (p. 47). H. De Man, ancien ministre, dont «L'influence et sa position politique dans le pays étaient très fortes» (p. 47) plutôt que A. Devèze, ancien ministre de la défense nationale, va servir de facteur et envoyer aux ministres une demande, via l'ambassade belge à Londres, d'un blanc-seing pour obtenir la démission du gouvernement et en nommer un autre. C'est la voie royale vers un vrai malentendu puisque les ministres ont quitté le roi en très mauvais termes sur des choix totalement opposés. À Paris où les ministres se réunissent le 26 mai, la demande de blanc-seing leur prouve que si le roi veut constituer un nouveau gouvernement, il est clair que c'est pour négocier avec l'ennemi, tandis que pour le roi ce n'était qu'en vue d'une reddition. Qui peut dire qu'un nouveau gouvernement n'aurait pas fait plus qu'une simple reddition et gouverné sous l'occupation? Ce qu'on peut constater, c'est que la demande de Léopold était maladroite aussi bien dans son esprit que dans ses termes et Léopold enfourche ce cheval: «ses termes - la lettre de De Man - sont malheureux»(p. 47), ainsi Léopold peut accuser De Man d'avoir «outrepassé sa pensée»(p. 47). Ce n'est pas la demande de blanc-seing qui est «malheureuse», ce sont les termes, d'après Léopold qui fait porter le chapeau à De Man.La réponse du gouvernement est unanimement négative, pas du tout à cause des termes, mais uniquement à cause de la pensée. Après ce grave malentendu, que constate-t-on, sinon que Léopold collectionne les malentendus. Après «Pierlot responsable du tragique malentendu de mai 1940» (p. 23) «Keyes, l'amiral qui s'était imprudemment avancé»(p. 27) «c'est De Man qui a outrepassé sa pensée»(p. 47).Ça commence à bien faire!

Chapitre XII

Traite de la reddition de l'armée belge en mai 1940 et de ses conséquences.

Léopold emploie directement la grosse artillerie, jugez-en:

  • Les Allemands utilisent «des méthodes jusqu'alors inconcevables» (p.49);
  • La Rhénanie, la Tchécoslovaquie, l'Autriche, la Pologne... inconnues au bataillon!
  • «Les Franco-Britaniques se sont laissés prendre au piège» (p. 49);
  • Le Canal Albert, Eben-Emael, le Luxembourg belge... connaît pas, l'armée belge n'a aucune responsabilité dans la défaite de 1940!
  • «Les armées alliées sont en retraite depuis le 15 mai» (p. 49) et les Belges depuis ... le 11 mai (p. 29) «repli sur une position principale», «le 15 mai repli sur l'Escaut» (p. 29) «le 21 mai, Ordre des troupes belges de se replier sur la Lys» (p. 30). Peut-être que pour Léopold «retraite» condamne les Alliés et «repli» disculpe l'armée belge!
  • «Personne ne répond ni à nos appels à l'aide, ni à nos suggestions en vue de desserrer l'étau qui nous écrase.»(p. 49) Dès le 10 mai 1940, les Franco-Britaniques ont répondu aux appels à l'aide et le 12 mai, lors de la conférence de Casteau, les Belges ont accepté le plan de bataille de l'État-major allié qui délimitait à chacun un secteur de front.
  • Si «la désorganisation est complète» (p. 50) c'est en grande partie à cause de la politique de neutralité qui empêchait avant 1940 d'organiser la lutte contre l'Allemagne.
  • Que l'armée belge fût acculée, tout le monde le voyait, mais personne ne pouvait prévoir comment Léopold réagirait. C'est son refus de poursuivre la lutte qui l'a mis en accusation. Les avertissements de la capitulation aux alliés, couvertures principales pour Léopold, n'ont pas eu autant d'impact sur eux que celui de la capitulation et de se laisser faire prisonnier.

Léopold avait perdu une bataille et ne croyait plus gagner la guerre!

Chapitre XIII

Définition de mon attitude politique à partir du 28 mai 1940.«Je n'ai certainement pas attendu pour la déterminer, ni le discours de Pierlot du 28 mai 1940, ni la consultation juridique»(p. 53). Le 25 mai, aux ministres qui lui demandent quelle va être son attitude politique, il répond: «je n'en sais rien encore.» (p. 42) Trois jours plus tard, le 28 mai 1940, au plus fort de la bataille, il a fait son choix. N'est-ce pas un peu hâtif, vu l'ampleur des problèmes; à savoir: ses rapports avec l'Angleterre et la France, son attitude vis-à-vis de l'Allemagne, sa situation de chef d'État prisonnier sans gouvernement. De plus, n'ayant pas de vue plus lointaine que sur son pré - carré- Parc de Laeken 300 hectares - il termine son ordre du jour du 28 mai 1940 ainsi: «Demain nous nous mettrons au travail avec la ferme volonté de relever la patrie de ses ruines.»(p. 55) «Demain au travail» (Ce «demain» aurait été après la paix survenie quelques semaines plus tard). N'est-ce pas la première pierre de la collaboration puisque le pays est occupé par l'ennemi?

Pour bien se faire comprendre, Léopold mobilise un cheval de retour, ancien ministre, qui en 1940 préconisait un nouveau gouvernement sous l'occupation et en 1942 passait du côté des alliés! Tschoffen était charge de faire dire à cette phrase ce qu'elle ne voulait pas dire. C'était digne d'un principal de jésuite! À ce compte là, pourquoi ne pas proclamer que «se mettre au travail» est un appel à la résistance!

Pour se sauver de ce mauvais pas, Léopold cite un extrait de sa lettre au pape d'octobre 1940, reprenant une pensée de Guillaume le Taciturne (Taciturne: morose, sombre voir Le Petit Robert): «Subir n'est pas accepter, se taire n'est pas approuver, attendre n'est pas renoncer.» (p. 55) .

subir: se soumettre volontairement (Le Petit Robert)

se taire: ne plus se faire entendre (idem)

attendre: ne rien faire (idem)

Tentative de sauvetage qui prend l'eau de toute part!